• un article assez complet pour comprendre le lien en le développement de la personnalité et l'attachement, les notions d'individuation et séparation entre autre (les films n'y figurent pas dommage ...)

     


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  • Pierre Moisset – Petit 1 Lille – 13 octobre 2010

    Education partagée ou coéducation

    Le thème de cette rencontre petit 1 est « tous acteurs ». C'est pourquoi je me propose de vous parler aujourd'hui de coéducation, ou plutôt de débattre autour de la question de la coéducation appliquée à l'accueil des jeunes enfants. Avec la coéducation, parents et professionnels sont sensés être acteurs – chacun depuis leur place propre – dans l'éducation d'un enfant qui, du fait de son accueil, connaît plusieurs scènes éducatives et se trouve donc – théoriquement – en situation de coéducation.           
    La coéducation est un terme, une notion en vogue aujourd'hui tant dans l'accueil de la petite enfance que dans d'autres politiques publiques comme la protection de l'enfance ainsi que dans des réflexions plus générales sur la parentalité et certaines fragilités parentales. Ce terme et cette attention refléterait notamment l'accent nouveau mis sur la nécessaire richesse relationnelle dans l'éducation des enfants. Comme le note Marine Boisson[1] « La fille-mère, stigmatisée hier du fait de son écart par rapport à la norme familiale traditionnelle (la famille conjugale), se retrouve, en tant que “parent isolé”, de nouveau à distance de la norme familiale, nouvellement conçue comme une “co-éducation” avec la mise à disposition de l’enfant de soutiens multiples (maintien des liens avec l’autre parent et avec la famille élargie, établissement avec un nouveau conjoint, négociation d’une co-éducation avec des professionnels, etc.) ». Ainsi, d'après le même auteur « La valorisation des “nouvelles parentalités” semble traduire un impératif social d’abondance relative des ressources relationnelles, la pauvreté relationnelle apparaissant désormais comme un des principaux écarts par rapport à la norme éducative dominante. » (Ibid)

    Parallèlement à cette sensibilité aux ressources relationnelles nécessaires à l'éducation d'un enfant, l'importance du thème de la coéducation renvoie à la volonté de placer les parents et citoyens – usagers de service de la petite enfance ou d'autres services publics – dans une position active, participative, correspondant à une évolution de la démocratisation des relations. Il s'agit de faire avec les parents, de coéduquer avec eux afin de ne pas les laisser dans une position passive ou extérieure à la structure d'accueil. De fait, la notion de coéducation porte avec elle l'idée d'une participation égale, ou du moins sans relation de hiérarchie, des parents et des professionnels à l'éducation d'un enfant et ce depuis des places différenciées « En matière éducative, chaque adulte doit connaître sa place et la conserver. D’où l’impérieuse nécessité de définir les rôles des uns et des autres. Jusqu’où partage-t-on l’éducation de l’enfant ? Sur quoi porte le partage ? Il est important que chacun comprenne sa spécificité et celle de l’autre. Autant de questions qui s’inscrivent dans la démarche de co-éducation. »[2]

    Ces notions de partage de l'éducation, d'élaboration de places différenciées permettent d'échapper apparemment à tout ce que la thématique du soutien à la parentalité charrie : des parents en difficultés, ou démissionnaires qui auraient besoin d'être accompagnés, soutenus. On passe d'une charge et d'une responsabilité supplémentaire pour les professionnels de la petite enfance (soutenir les parents, savoir lire leurs besoins et demandes), à une perspective plutôt positive : coéduquer avec eux. La notion de coéducation supposant une place et des compétences parentales que le soutien ou l'accompagnement à la parentalité suppose moins consistantes, plus soumises à des difficultés.

    Pour autant, une fois que l'on a remarqué cette nécessité pour la coéducation que chacun identifie clairement sa place par rapport à l'enfant, les problèmes commencent. En effet, une phrase fétiche ressort lorsque l'on évoque la coéducation « Il faut tout un village pour élever un enfant ». Si elle souligne la nécessité d'une communauté éducative et l'importance des ressources relationnelles, cette phrase fait justement référence – en terme d'image – à une communauté villageoise que l'on peut supposer relativement indifférenciée, une communauté d'adultes face à une communauté d'enfants. Or, il n'en est pas de même dans nos sociétés différenciées et individualistes, et il en est encore moins de même dans l'accueil de la petite enfance où se retrouvent face à face des parents et des professionnels, des personnes donc qui sont loin de constituer de manière évidente un « village ». Comment se définit la place des parents et des professionnels autour de l'accueil d'un jeune enfant dans la perspective d'une coéducation? Jusqu'où va le rôle des uns et des autres? En quoi est-il possible de s'articuler autour de cet accueil du jeune enfant? Il me semble que, pour répondre correctement à ces questions pour ce qui concerne le champ particulier de l'accueil de la petite enfance il faut justement prendre en compte le cadre particulier que constitue l'accueil d'un jeune enfant. Plus précisément, il faut prendre en compte que l'enjeu de la coéducation va alors se poser entre des parents qui recourent à un service d'accueil de leur jeune enfant et des professionnels de l'accueil des jeunes enfants. On verra que derrière leur apparente évidence, ces expressions renferment nombre d'enjeux.

    En effet, une des principales lacunes à mes yeux, dans la perspective qu'a ouvert la notion de travail avec les demandes des parents, et en écho celle de coéducation vient du fait qu'elle ne précise pas en fonction de quels critères, au nom de quelle spécificité, les professionnels de l'accueil de la petite enfance peuvent s'articuler avec les demandes des parents? En fonction de quels critères peuvent-ils coéduquer. En l'absence de tels critères, on peut avoir l'impression que les professionnels, s'ils ne veulent pas rester dans leur ancienne position d'experts et de « professionnels » ne peuvent que suivre les demandes des parents. Qu'ils n'ont rien à leur opposer, en tout cas rien de légitime. D'où, selon moi, un malaise et le possible retrait de certains professionnels sur l'intérêt et les besoins de l'enfant utilisés comme critère ultime de positionnement professionnel. D'où également l'affirmation de deux figures repoussoirs des parents liées à cette mise en avant de leurs demandes : le parent consommateur (celui qui veut et demande en perdant de vue le fait que l'accueil de son enfant n'est pas tout à fait un produit) et le parent démissionnaire (celui qui ne demande rien ou bien si peu qu'on a l'impression qu'il se moque et de son enfant et de son accueil)

    Aussi, je vous propose dans cette communication d'explorer non pas des modalités concrètes de coéducation dans le domaine de l'accueil de la petite enfance mais plutôt – à travers différents exemples – les conditions nécessaires à cette coéducation.  
    Une dernière remarque avant de rentrer dans le vif du sujet, au niveau des textes encadrant l'accueil de la petite enfance – que ce soit les décrets ou les livrets d'accompagnement au projet éducatif et au projet social des structures -on ne trouve pas le terme de coéducation, mais plutôt celui de places, de participation et d'accueil des familles, d'implication des parents. Pourquoi alors parler de coéducation alors que les professionnels de la petite enfance ont déjà bien assez à faire avec le décret du 7 juin 2010 remettant en question la qualité de leurs missions et leur professionnalité? Comme je vous l'indiquais plus haut, il me semble intéressant de parler de coéducation déjà parce que cette notion traduit aussi toute une sensibilité sociale à l'ouverture des institutions d'éducation envers les parents (évolution qu'il s'agit d'encourager), mais également parce qu'elle permet de s'interroger sur ce qui constitue la consistance propre des espaces d'accueils, sur ce qui constitue votre professionnalité. Aussi, ce thème de débat me semble aussi utile dans une perspective de résistance et de proposition à l'encontre d'une politique petite enfance revue à l'aune d'une perspective gestionnaire. Elle permet justement de faire voir, de souligner tout ce que la mise à mal des taux d'encadrement, les débordements de taux d'occupation remettent en question à rebours d'une évolution profondément démocratique.

    Coéduquer dans le cadre de l'accueil de la petite enfance

    Coéduquer contre les parents

    On pourrait déduire de l'idée de coéducation qu'il faut pour les professionnels être toujours en accord voire en harmonie avec les parents. Qu'il faudrait pouvoir se mettre d'accord le plus rapidement possible.   
    Aussi, la coéducation est-elle compatible avec le fait que les professionnels refusent certaines demandes des parents? Voyons cela avec le témoignage d'une assistante maternelle – Isabelle Fabre.[3] Cette assistante accueille une petite fille qui a de sérieux problèmes d'alimentation. L'accueil se passe bien hormis le fait que la fillette n'a pas grand appétit ce qui finit par devenir de plus en plus présents dans les demandes de la mère :

    Au sujet des repas, la maman a choisi de les préparer, elle connaît ses goûts, ses habitudes. Que ce soit chez ses parents ou chez moi, Alix a un petit appétit, elle  ne réclame jamais ses repas. Elle n’est pas enthousiaste devant son assiette, et n’est pas curieuse et envieuse de l’assiette des autres enfants. La maman est soucieuse des repères alimentaires, afin de se rassurer, elle me questionne sur les quantités de nourriture prises par son enfant. Les questions fusent, Alix a t’elle mangé des légumes, de la viande, des laitages ? Cela devient une véritable obsession pour la maman.

    Au fil des mois, la situation empire, les demandes et les inquiétudes de la mère deviennent de plus en plus présentes :

    Les jours passent et après plusieurs mois, je vis très mal le questionnement quotidien de la maman. Je me surprends même à envisager de répondre positivement à ses questions. Mais cela ne reflèterait pas la réalité. Plus les repas sont « négatifs », plus la maman est inquiète. Les conflits journaliers autour de la prise de nourriture me pèsent de plus en plus, et je ne peux plus gérer les angoisses d’Alix.

    On voit que cette assistante maternelle se sent envahie dans son accueil et dans sa relation à cette petite fille par les demandes de la mère, aussi elle demande conseil autour d'elle pour trouver la bonne attitude (PMI, psychologue, collègues)

    Suite aux innombrables questions que je me pose depuis des semaines, je me fixe la règle à suivre. Le fait de renseigner la maman sur la nourriture engendre un malaise constant et je décide de concentrer l’information journalière, information donnée à la maman en soirée, sur les différents éléments de la journée en faisant abstraction de tout ce qui à un lien avec la nourriture.

    Cependant, j’ai l’obligation d'informer au préalable la maman d’Alix de cette décision.  Je me suis préparée à cet entretien, pour le bien d’Alix, il est indispensable de le faire.

    A la surprise de cette assistante, la mère accepte bien cette décision. Elles conviennent ensemble d'une attitude commune autour des repas et il s'ensuit des effets plutôt positifs :

    Les jours suivant notre conversation, je n’ai pas remarqué de changement relationnel entre nous. Bien au contraire, j’ai trouvé une maman soulagée de ne plus gérer seule le problème alimentaire de sa fille et de pouvoir enfin se détacher d’une inquiétude obsessionnelle. Au fil du temps, nos relations et nos partages se sont concentrés sur d’autres points forts de la journée. Il n’y a plus eu de focalisation sur un point en particulier.

    Ce changement d’habitude a permis à Alix de vivre autrement ses repas, qu’on lui fasse confiance sur ses besoins alimentaires, de "sortir" des angoisses parentales. En effet, l’enjeu affectif entre la maman et sa petite fille était trop fort.

    On voit bien dans ce dernier extrait, que face à cette question de l'obsession de la mère au sujet de l'alimentation de la jeune fille, il s'agissait pour cette assistante maternelle de « protéger » son espace d'accueil. D'éviter que l'angoisse de la fillette face aux repas se « transmette » également chez elle et qu'elle finisse par reconduire « l'enjeu affectif » existant entre cette mère et cette fillette. Et c'est au nom de la protection de cet espace d'accueil qu'elle a interpelé la mère, parce qu'elle voulait éviter que sa propre relation à l'enfant devienne une « annexe » de la relation de cette mère à cette fillette, qu'elle en reproduise les tensions. Cette assistante ne s'est donc pas prévalue de sa professionnalité, ou d'une expertise sur les problèmes d'alimentation de l'enfant, elle a invoqué le fait que – dans le cadre de la circulation de cette enfant entre deux espaces de vie – elle souhaitait que son espace soit préservée d'une tension particulière.

    A-t-on à faire à un exemple de co-éducation? Non, si on considère que l'assistante maternelle et la mère s'oppose à un moment sur la question des repas de la fillette et le fait que l'assistante décide – après en avoir informé la mère – d'arrêter de lui parler des repas. L'idée de « co »éducation est mise à mal par cette séparation, cette opposition à un moment. Par contre, le dénouement de l'histoire le fait que la mère accepte le comportement de l'assistante maternelle et que cela aboutisse à un mieux être de la fillette chez son assistante maternelle, renoue avec l'idée de coéducation puisque et l'assistante et la mère convienne que cette décision a été finalement bénéfique. 
    Cet exemple sensibilise à deux éléments très importants à garder à l'esprit concernant la coéducation :  celle-ci ne signifie pas un accord, ou une mise en accord constante entre parents et professionnels. Elle peut et probablement elle générera des divergences, puisque cette coéducation suppose qu'existe plusieurs scènes éducatives sur lesquelles l'enfant a des comportements différents, sur lesquelles il joue des choses différentes. Mais, point important, il me semble que ces divergences, du côté des professionnels, ne pourront plus se justifier par un savoir professionnel que les parents ne seraient pas sensés avoir, mais par la nécessité de préserver ce qui se joue sur leur scène éducative, on y reviendra avec notre troisième exemple.

    Coéduquer sans les parents

    Autre question redoutable que pose aux professionnels la notion de coéducation : comment coéduquer avec des parents qui ne disposent pas des pratiques, savoir faire et savoir être pour se sentir parents? C'est-à-dire des parents qui instaurent, de par leur situation, une asymétrie du rapport parents-professionnels. Une asymétrie qui ne semble pas permettre un travail avec ces parents une coéducation, mais plutôt un travail « sur » au nom du savoir que les professionnels ont et que ces parents demandent. Une responsable de halte-garderie[4] aborde cette question avec le cas d'une jeune mère ne disposant pas des connaissances culinaires de base pour faire des repas suffisants pour sa fille. 

    Lilou a douze mois quand elle arrive à la crèche, c'est une petite fille menue de petit gabarit, sa maman est jeune (21 ans) elle vit seule avec elle, c'est un premier enfant. Lilou vient trois après midi par semaine.

    Dès son arrivée sa maman nous explique qu'elle nous a mis un biberon de lait qu'elle risque de réclamer très vite car elle n'a rien mangé à midi. En effet très vite Lilou hurle et nous comprenons qu'elle a faim.

    A travers le décalage entre le discours de cette mère disant que sa fille n'a rien mangé avec elle et l'appétit de la fillette dans la structure, la responsable découvre bientôt que cette jeune mère ne sait pas quels repas préparer à son enfant :

    Au prochain accueil de Lilou je demande à sa maman si elle a du temps à m'accorder pour que nous discutions des repas de sa fille. La maman de Lilou saisie vite mon offre puisque nous discutons immédiatement et à travers son discours je découvre que cette maman est « perdue » qu'elle n'a pas de modèle auquel se référer pour élever sa petite fille et qu'elle ne sait pas vraiment comment faire. Je ne veux pas lui donner des conseils je ne veux pas être celle qui sait face à celle qui ne sait pas par conséquent je lui donne des revues que nous « collectionnons » à la crèche sur la diversification alimentaire et les besoins des enfants mais aussi un document ou il y a des menus types. Elle est ravie et nous en restons là.

    Cette jeune mère demande donc des conseils que l'équipe lui donne sous différentes formes.  Premièrement, via des supports (revues et menus types) qui évitent l'instauration d'une relation asymétrique professionnel-parent. Mais aussi, à l'inverse, en personnalisant le conseil pour qu'il ne semble pas émaner que d'une professionnelle.

    Quand elle revient à 16h30 elle me demande si je connais la semoule fine car on en parle dans les menus pour le repas du soir ; je lui explique, je lui dit aussi comment je l'agrémentais pour mes enfants.

    Aussi, même si, du fait de la situation de cette jeune mère, la responsable se retrouve obligée de travailler « sur » elle, sur sa demande, elle le fait en évitant de se confondre avec une position purement professionnelle. Ce afin de rester aussi « avec » cette jeune mère, au nom d'une commune confrontation à la maternité.    
    Dans ce deuxième exemple, la coéducation parait impossible du fait qu'il manque un des partenaires (le parent). De fait, sur la question de la nourriture (qui ne résume pas toute la question de l'éducation) la mère est en position d'élève face aux professionnels. Par contre, il me semble que la façon de faire de l'équipe permet une possible coéducation parce que même si elle transmet des contenus à la mère, elle le fait de telle façon à ce qu'elle ne sente pas élève face à des professionnels, donc comme quelqu'un qui saura toujours un petit peu moins bien qu'eux. Mais comme un partenaire que l'on réintroduit dans la ronde ou dans la danse par une manière de dire et de faire qui là encore ne se présente pas comme principalement professionnelle mais animée par un souci commun de l'enfant.

     

    Coéduquer avec et malgré les parents

    Comment mettre en place une coéducation avec des parents qui ne veulent pas travailler avec les professionnels? En effet, des parents peuvent recourir à un accueil de leur enfant sans vouloir se coordonner ni se mettre spécialement d'accord avec les professionnels. Comment alors permettre une coéducation? Et surtout au nom de quoi interpeller les parents pour qu'ils se « mettent en réseau » avec les professionnels. Nous retrouvons la halte-garderie de notre exemple précédent. La responsable nous livre là un exemple[5] où elle estime avoir travaillé à tort sans une mère. J'interprète cet épisode autrement. Faisons en d'abord le récit :

    Il s'agit du cas d'un petit garçon de deux ans et demi qui a une grande soeur et dont la mère est enceinte d'un troisième enfant.

    Paul vient 2 fois par semaine dans la structure c'est  un enfant réservé (il parle peu, sourit timidement, joue souvent seul), il aime les jeux calmes (encastrement, dessin, livres, peinture...), à la maison il n'a pas accès à la télévision, il est habillé de façon classique....

    Si je pose ce contexte de vie c'est pour dire que cette famille a choisi son mode éducatif et elle en parle très bien. La maman de Paul est peu causante quand elle vient elle nous dit bonjour mais prend par contre le temps de dire au revoir à son fils de façon posée et sereine. Quand elle revient le chercher elle ne pose aucune question elle semble se contenter de récupérer son fils et s'adresse d'ailleurs à lui plutôt qu'à nous.

    L'équipe constate au fil des mois que Paul devient de plus en plus renfermé et moins serein dans son rapport à la halte-garderie :

    L'équipe se dit que la grossesse de sa mère doit le « perturber » et c'est normal « peuchère »il va changer de rang dans la famille; la place du milieu c'est la moins facile etc ....alors l'équipe essaie de « compatir » avec l'enfant.

    J'essaie d'en parler avec la maman qui ne semble pas avoir envie d'aborder la question alors pendant des semaines je lui parle de tout autre chose, d'elle de sa grossesse de la grande qui est à l'école de mes propres enfants j'essaie d'entrer en relation et de créer le lien qui va me permettre ensuite de lui parler de Paul.

    Au bout de ces différentes approches, cette responsable parvient enfin à parler avec cette mère du comportement de son fils :

    Quand je sens que le dialogue est établi j'en profite pour lui dire que je trouve que Paul à changé de comportement à la crèche et que je pense que c'est peut-être lié à sa grossesse. Elle me répond : « oui mais c'est comme ça il faut qu'il  fasse avec et tout ira bien parce-que je l'aime »

    Ce jour là je me suis pris « une gifle » et d'un coup j'ai vu la situation autrement, d'un coup cette maman en m'offrant sa vision de la situation m'a permis de comprendre que nous faisions fausse route avec cet enfant, qu'évidemment l'arrivée d'un bébé pouvait se voir sous un autre angle tout dépendait de comment on voulait regarder ! J'ai transmis à l'équipe cette phrase et ensemble nous avons discuté de notre vision des choses pour nous rendre compte qu'il fallait regarder autrement et que si nous arrivions à le faire, nous serions aidantes pour l'enfant et non compatissantes !

    Pour cette professionnelle, la mère, en livrant sa vision, a dédramatisé la situation. Elle a montré qu'elle prenait acte et qu'elle comprenait le changement de son fils mais qu'elle était prête à y faire face, à l'accompagner parce que : elle l'aime. Aussi, cette responsable en tire une rude leçon :

    Nous avons décidé donc de changer de tactique d'être positives avec cet enfant de le bousculer un peu , de jouer avec lui de rire de parler du petit frère qui allait arriver  et Paul s'est ouvert petit à petit et s'est remis à jouer. Si cette maman et moi n'avions pas mis en commun notre pensée sur son enfant , l'équipe de la crèche aurait continué à faire fausse route et n'aurait pas joué son rôle de professionnelle pour cet enfant.

    Alors si les parents eux n'ont pas besoin de nous nous nous avons besoin d'eux et nous ne pouvons pas faire l'impasse de se dialogue avec eux au nom du bien être de leur enfant, c'est notre devoir me semble t-il !

    Mais on peut aussi reprendre cet exemple dans un autre sens. C'est-à-dire pour signaler que la coéducation demande aussi un effort aux parents, une participation de leur part. En effet, cette mère a tendance à travailler sans les professionnels., à se maintenir seule en position d'éducatrice bien que son fils aille en halte-garderie. Or le mal-être de son enfant s'exprimait dans l'établissement, et à ce titre il concernait les professionnels et les impliquait. Même si cette mère souhaite faire sans les professionnels et est parfaitement au clair dans son rapport à son enfant, son absence de communication a mis à mal l'équipe en ce sens où elle ne lui a pas permis de recueillir rapidement sa vision et son rapport à son enfant. Aussi, alors que la responsable n'a pu recueillir la vision de cette mère qu'à l'issue de tout un travail relationnel et d'établissement de confiance, elle aurait aussi pu faire remarquer à cette mère qu'elle ne peut se passer d'une coordination minimale avec les professionnels parce qu'elle est impliquée avec eux  dans une même coéducation. Il nous semble que les professionnels peuvent interpeller les parents qui ne souhaitent pas travailler avec eux au nom de cette commune implication dans une coéducation de leur enfant[6]. Et cette interpellation, encore une fois, ne se fait pas essentiellement depuis une position de professionnel mais depuis la position de personnes qui prennent soin et ont aussi à charge l'enfant et doivent donc se coordonner avec les parents.

    L'espace de délégation, un espace co-construit

    A travers ces trois exemples, nous avons décidé d'explorer la coéducation par ses marges, là où elle est problématique, remise en question. Qu'est ce que cela nous permet d'observer? Par rapport à cette image du village et cette idée d'un réseau de figures d'éducation autour des enfants, il me semble que ces exemples soulignent le fait que la définition des rôles ne se fait pas tant par un partage entre parents et professionnels, mais par la mise en réseau des différentes scènes éducatives autour d'un enfant. Bien sûr parents et professionnels n'ont pas la même place autour de l'enfant. Mais leur mise en accord, ou en tout cas leur travail ensemble passe beaucoup par le fait que chacun puisse d'une part affirmer la consistance, la nécessité de préserver sa propre scène, et puisse faire référence aux autres scènes éducatives, puisse les prendre en compte. Et cela ne se fait pas principalement depuis des positions statutaires : parents, professionnels.... Mais depuis une place dans un réseau, une place spécialisée en fonction du statut (parent, professionnel) mais d'abord une place. Ainsi, dans le premier exemple, l'assistante maternelle parle moins en tant que professionnelle qu'en tant que « carer », soignante d'un enfant qu'elle veut préserver sur sa scène d'un enjeu avec sa mère. Dans le deuxième exemple, les professionnelles aident la mère en tant que personnes également concernées par son enfant, expérimentées auprès des enfants et enfin, dans le dernier exemple, les professionnels auraient pu interpellé cette mère en tant qu'elle est mère d'un enfant accueilli.

    En effet, il me semble que la coéducation nécessite un double décalage pour devenir plus qu'un voeu pieu. Elle demande que les professionnels ne soit pas que des professionnels mais des « professionnels de l'accueil des jeunes enfants », dont la maîtrise et la responsabilité s'exerce dans ce contexte spécifique d'un accueil. Et elle demande que les parents ne soient pas que des parents, mais des parents d'enfants accueillis, qui doivent donc à ce titre se coordonner et faire avec l'équipe ou les professionnels qui accueillent leur enfant et non pas camper sur leur position singulière de parent particulier. Ce qui nous amène à la notion d'espace de circulation de l'enfant. Cet espace est justement ce qui est rendu possible par ce double décalage, il est constitué par la circulation de l'enfant entre plusieurs scènes éducatives qui, au-delà de leurs différences de positions et de statuts, se réfèrent les unes aux autres parce qu'elles sont concernées par un même enfant. Autrement dit, ce n'est pas parce qu'il y a accueil de l'enfant qu'il y a espace de circulation à mon sens ou coéducation. Cet espace s'instaure quand ces différentes scènes se réfèrent les unes aux autres. Ce que le curriculum écossais de la petite enfance désigne très bien en indiquant « L'expertise et l'expérience tant des parents que des éducateurs de la prime enfance ont plus de valeur quand elles sont partagées. »

     

    Pour conclure, en quoi ce détour par la coéducation et l'espace de circulation de l'enfant permet d'interroger la politique actuelle de la petite enfance. Parce que, même si la coéducation demande à ce que les professionnels se décalent de leur position initiale, elle nécessite aussi qu'ils soient professionnels, qu'ils puissent être professionnels, de même qu'elle demande à ce que les parents soient des parents d'enfants « circulants » et qu'ils aient donc le temps de se coordonner avec les accueillants de leur enfant. Aussi, l'idée de coéducation demande que l'on reconnaisse la spécificité des pratiques, des regards et des liens que les professionnels de l'accueil nouent aux jeunes enfants. Elle demande donc à ce qu'ils soient reconnus comme des professionnels de l'accueil, des professionnels que l'on ne peut donc pas surchargés sans réfléchir, que l'on ne peut pas faire exercer dans n'importe quel cadre, qui ont une certaine formation. La coéducation demande aussi à ce que les parents ne soient plus placés en position de responsables tout puissant de leurs enfants, mais comme des parents d'enfants « circulants » encore une fois, qui doivent avoir le temps, les moyens (supports de communication, lieux spécifiques au sein des lieux d'accueil), ce qui suppose – pour élargir le débat – des conditions de travail moins tendues, des horaires moins décalées, moins irrégulières, une réflexion élargie sur les temps de vie....

     



    [1]               Boisson Marine, 2008, Petit lexique contemporain de la parentalité. Réflexions sur les termes relatifs à la famille et leurs usages sociaux, Informations sociales n°149, pp.8-15

    [2]              Cécile Ensellem « La responsabilité parentale : une question politique ? », in Que veut dire être parent aujourd'hui ?, érès, 2008, p. 139-150.

    [3]              Témoignage issu de son article « A propos de la coéducation : un exemple chez une assistante maternelle. », Pour un accueil de qualité de la petite enfance : quel curriculum?,. Sylvie Rayna, Catherine Bouve, Pierre Moisset (dir), Editions Erès, Toulouse, 2009.

    [4]              Lucile Rouillé dans son article « Travailler avec sur et sans les parents », , Pour un accueil de qualité de la petite enfance : quel curriculum?,. Sylvie Rayna, Catherine Bouve, Pierre Moisset (dir), Editions Erès, Toulouse, 2009.

    [5]              Dans le même article que celui cité précédemment.

    [6]              Interpellation au nom d'un espace de délégation partagée qui n'a rien à voir à nos yeux avec l'interpellation des parents au nom du bien-être de l'enfant ou des besoins de l'enfant dont les professionnels se placeraient en interprètes légitimes et privilégiés.


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  • Des pulsions du jeune enfant aux pratiques quotidiennes en crèche : l’implication éducative de l’adulte, parents et professionnels 

                Marie-Paule Thollon-Behar, Psychologue, docteure en psychologie du développement        

    La petite enfance est le moment où l’enfant commence à passer du principe de plaisir au principe de réalité, ce qui va lui permettre de se socialiser, c'est-à-dire de faire partie d’un groupe en en respectant les règles. Ce processus de socialisation peut se mettre en œuvre grâce à l’éducation qui est apportée. Or, nous allons voir qu’il est difficile d’éduquer aujourd’hui pour différentes raisons. L’une d’entre elle est que nous vivons dans une société de consommation qui privilégie la satisfaction immédiate des désirs, c'est-à-dire le principe de plaisir : « faites vous plaisir tout de suite, vous paierez plus tard ».

    Je m’appuie dans cette présentation sur la psychologie du développement, qui est centrée sur ce qui est observable, c'est-à-dire ce qui est visible. Je pars également de ma pratique de psychologue, exerçant auprès de professionnels de la petite enfance et de l’enfance.

    La question articulant les pulsions et les pratiques quotidiennes en crèche, interroge la relation entre les parents et les professionnels autour de l’éducation. En effet, les parents sont maintenant et à juste titre, pris en compte par les professionnels, ce qui n’a pas toujours été le cas. Il faut donc travailler à une complémentarité entre parents et professionnels dans les places et les rôles de chacun, pour aider chaque enfant accueilli à grandir.

    J’ai choisi un fil rouge dans cette présentation en évoquant trois petites histoires tirées de séances d’analyse de la pratique :

    - La maman de Célia, 1 an tout juste, annonce un matin que Célia n’a plus de sucette. La sieste se passe très mal, Célia ne parvient pas à s’endormir, elle est grognon dans la journée… les jours passent et le comportement de Célia ne s’améliore pas.

    - La maman de Nina, 2 ans et demi,  ne supporte pas qu’elle se salisse, elle demande à ce que Nina ne joue pas dans le sable. La directrice, un jour, un peu contrariée,  lui demande : vous préférez qu’elle soit propre et qu’elle s’ennuie, ou qu’elle se salisse et qu’elle s’amuse ? La maman de Nina répond : «  qu’elle soit propre et qu’elle s’ennuie ».

    - Sofian, un petit garçon de 3ans adore se déguiser avec une robe à fleurs et à volants et des chaussures à talon orange. Le papa de Sofian ne supporte pas de retrouver son fils déguisé ainsi. Il demande aux professionnels d’interdire à son fils de mettre ces vêtements là.

    Que se passe t-il du point de vue de l’enfant ? 

             L’enfant doit apprendre à contenir ses pulsions pour se socialiser. Cette contenance va passer par la compréhension des limites. Pour cela, il doit faire le lien entre l’action qu’il effectue et l’effet que cela produit sur l’adulte. Il s’agit d’une compétence socio-cognitive, la causalité interpersonnelle qui se manifeste vers l’âge de 8- 9 mois.

             Pour que ce lien s’établisse, l’adulte doit réagir d’une façon cohérente, toujours plus ou moins de la même façon, sinon le lien ne pourra s’effectuer. De la même façon, il faudrait que tous les adultes réagissent entre eux, de la même façon, vis-à-vis de ce qu’il fait.

             Petit à petit, l’enfant va intérioriser progressivement ces limites, et vers l’âge de 6 ans, cette intériorisation permettra la construction des valeurs : le bien, le mal, la justice, l’amitié, le mensonge etc.

    Auparavant il doit accepter des limites et vivre des frustrations. Il peut exister un paradoxe entre le respect du rythme de chaque enfant qui est préconisé dans la petite enfance et les contraintes de la vie en collectivité, sources de frustration. Ne sommes nous pas à certains moments dans une idéalisation de la vie que peut avoir un enfant en collectivité, idéal impossible à atteindre et donc qui va générer un sentiment de culpabilité chez les professionnels ?

    Fil rouge : la sucette de Célia renvoie au stade oral, les jeux avec le sable, le fait de se salir au stade anal et le déguisement de fille de Sofian rappelle la différenciation des sexes du stade phallique.

     Que se passe t-il du point de vue des parents ?

    Il existe un certain nombre d’obstacles à la contenance éducative:

    -          La culpabilité  de le laisser « en garde » pendant toute la journée, de ne pas passer suffisamment de temps avec lui. On dit souvent aux parents que la qualité de la relation avec l’enfant est plus importante que la quantité de temps qu’ils vont passer avec lui. Or, quand ils récupèrent leur enfant, tout ne se passe pas toujours bien, la qualité n’est pas forcément au rendez-vous. Ils n’ont pas envie de faire le gendarme. Ils risquent de « lâcher » sur le plan éducatif en pensant ainsi conserver une bonne relation avec l’enfant. 

    -          La toute-puissance perçue de l’enfant et de l’enfant qu’ils ont en eux. Ils ne se sentent pas capable d’exercer leur autorité sur un enfant qu’ils pensent ne pas parvenir à faire obéir.

    -          Le doute sur « comment éduquer aujourd’hui » en raison des différents modèles éducatifs. Les parents sont partagés entre plusieurs modèles éducatifs, plus ou moins autoritaires [1].

    -          Les parents peuvent avoir une certaine représentation de l’avenir de leur enfant dans une société qu’ils voient difficile, exigeante et dans laquelle un enfant trop docile, trop obéissant ne pourra faire son chemin. Il leur semble meilleur que leur enfant ait « de la personnalité ».

    Les valeurs des parents sont différentes de celles des professionnels. Certains se renseignent, lisent, vont sur les forums. 

    Ainsi, la maman de Célia a peur que la sucette n’empêche sa fille d’apprendre à parler. Elle a un an, elle ne va pas tarder à prononcer ses premiers mots. Cette maman s’est documentée sur la question. Mais elle n’explique pas pourquoi elle a pris cette décision aux professionnelles qui ne le lui ont pas demandé. Célia ne dort toujours pas bien.

    D’autres parents ont des choix éducatifs, liés à leur propre histoire :

    La maman de Nina est seule pour s’occuper de sa petite fille, elle veut montrer qu’elle est une maman compétente. Pour elle, une maman compétente c’est une maman qui a une petite fille propre et bien habillée.

    Le papa de Sofian est sans doute très sensible à la différenciation des sexes et fier de son petit garçon. Le déguisement peut évoquer l’homosexualité.

    Que se passe t-il du côté des professionnels ? 

    Il existe des valeurs éducatives qui font partie de la culture professionnelle, ce qui permet une cohérence éducative au sein de l’équipe, mais qui peuvent être très différentes des valeurs des parents.

    Un jour, les professionnels qui ont conscience du besoin d’oralité de Célia « craquent » et lui donnent une sucette. Elle  s’endort immédiatement. Les professionnelles  n’osent pas le dire à sa maman.

    De la même façon, les professionnelles qui connaissent le plaisir de Sofian à se déguiser et hésitent à le laisser faire sans le dire au papa et en évitant que celui-ci ne le voit !

     Il peut néanmoins exister des valeurs personnelles différentes entre les professionnelles au sein des équipes, avec le risque d’un manque de cohérence éducative et de conflits. De plus les limites ne sont pas toujours explicites.

     Les professionnelles de la petite enfance ont un rôle difficile du point de vue de l’éducation car elles interviennent à un âge où tout est à mettre en place. C’est sans doute la période la plus difficile avec l’adolescence. On pourrait s’interroger sur ce que leur fait vivre le fait d’être toujours dans ce rôle de poser des limites.

    Il y aurait donc une réflexion à conduire sur les limites. Sont-elles toujours adaptées aux besoins du tout petit d’agir, de bouger, de crier, à utiliser son énergie. Quelles contraintes imposent-on aux jeunes enfants accueillis en collectivité? Quelle tolérance a-t-on vis-à-vis de l’expression de leur énergie et de leur pulsion ?

    Par ailleurs, il faut se donner les moyens de comprendre le comportement de l’enfant : expression des pulsions ou mal être, comme dans l’exemple de la morsure?  L’observation est essentielle afin de répondre au mieux. Derrière le visible, ce que l’on observe, il faut comprendre l’invisible et lui donner un sens. A-t-on le temps, la disponibilité psychique nécessaire, la formation… ?

    Que se passe t-il entre parents et professionnels ? 

    Depuis plusieurs années les parents sont reconnus comme étant les premiers éducateurs de leur enfant, ce qui n’était pas le cas auparavant quand les professionnels se positionnaient comme experts du petit enfant.

    Mais, nous avons vu qu’il existe des différences entre milieu familial et milieu collectif, entre les choix éducatifs des parents et les valeurs éducatives des professionnels.

    Il s’agit donc de :

    -          si possible écouter les motifs des choix éducatifs des parents.

    -          parfois négocier avec eux, en s’appuyant si besoin sur le projet éducatif de la structure, en expliquant le sens des pratiques éducatives.

    Avec la maman de Célia, une auxiliaire de puériculture nouvellement arrivée a été choquée que l’on puisse mentir aux parents. Elle l’explique au cours de la séance d’analyse de la pratique. En accord avec l’équipe, elle décide de discuter avec la maman. Celle-ci explique le motif de son exigence. L’auxiliaire montre à cette maman ce qui est fait dans la structure vis-à-vis de la sucette, que celle-ci n’est pas donnée systématiquement, qu’il y a un endroit pour la ranger dans la journée etc. Elle évoque les difficultés d’endormissement de Célia. La maman comprend et accepte que l’on laisse la sucette à Célia au moment de la sieste.

    Avec la maman de Nina, la directrice qui a entendu et compris les enjeux de la propreté pour elle, explique à son tour l’intérêt du jeu dans le développement de l’enfant, elle explique ses valeurs professionnelles. Petit à petit, la maman de Nina accepte qu’elle ne soit pas impeccable quand elle la récupère à la crèche et qu’elle joue dans le sable. De leur côté, les professionnelles veillent à ce qu’elle ne se salisse pas trop.

    Pour Sofian, il a été impossible d’échanger avec son papa sur une dimension qui renvoie à la sexualité, ce qui paraissait beaucoup trop compliqué pour les professionnelles. Il a été décidé de dire à Sofian que son papa n’était pas d’accord avec son déguisement et qu’il ne pouvait pas le mettre.

    Afin de faciliter les échanges et de soutenir les valeurs de l’équipe, il est important de pouvoir s’appuyer sur un projet éducatif. Les occasions sont fréquentes : demandes de restriction de sommeil, apprentissage de la propreté engagé trop tôt…

    En guise de conclusion

    Il est nécessaire de pouvoir réfléchir en équipe et de savoir se remettre en question afin de garantir les points suivants :

    ·         Tendre vers une co-éducation avec les parents.

    ·         Expliquer le sens des pratiques éducatives et donc le connaître.

    ·         Savoir justifier auprès des décideurs qu’il faut avoir du temps pour  échanger entre parents et professionnels.

    ·         Faire mieux connaître les conditions d’un travail de qualité, rendre visible le travail dans la petite enfance qui n’est pas assez bien connu, par les parents, les décideurs, les hommes politiques.

     



    [1] Luce Dupraz : « de la difficulté d’éduquer aujourd’hui », in MP Thollon Behar « parents, professionnels, comment éduquer ensemble un petit enfant ? », Erès 1001 bébés.


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    ... La Méthode

     

     

     

    UNE DÉMARCHE DE SANTÉ GLOBALE

    Intégrant l’alimentation à l’hygiène de vie générale : activités physiques et sommeil.

     

     

    UNE INTERVENTION CENTRÉE SUR LE JEUNE ENFANT

    Justifiée par la précocité de l’installation du surpoids et la sensibilité de la petite enfance à l’acquisition d’habitudes alimentaires.

     

     

    UNE IMPLICATION DES PARENTS

    Reconnus comme les premiers éducateurs de leurs enfants, respectés dans leurs cultures et valorisés dans leurs savoirs et savoir-faire favorables à la santé.

     

     

    UNE VOLONTÉ DE COHÉRENCE

     

    Grâce à un partenariat élargi, cohérence des actions et des discours de chacun vis-à-vis des enfants et des familles et cohérence des cadres de vie offerts par la crèche et par le quartier avec la pratique des comportements favorables à la santé préconisés.

     

     

     

     

     


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  • Rôle de l’alimentation infantile dans le surpoids et l’obésité

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    Article paru dans les Dossiers de l’Allaitement n°61 (Octobre – Novembre – Décembre 2004)


    Early determinants of childhood overweight and adiposity in a birth cohort study : role of breast-feeding. KE Bergmann, RL Bergmann, R Von Kries et al. Int J Obes Relat Metab Disord 2003 ; 27(2) : 162-72. Mots-clés : alimentation infantile, surpoids, obésité.


    La prévalence de l’obésité augmente chez les enfants. Plusieurs études ont constaté que l’alimentation au lait in­dustriel augmentait le risque d’obésité. Le but des auteurs était d’évaluer l’impact de l’alimentation au début de la vie sur le risque d’obésité à l’âge de 6 ans.

    Pour cette étude longitudinale prospective allemande, 1314 enfants ont été enrôlés à la naissance à partir de 6 servi­ces de maternité, et 918 ont pu être suivis pendant toute l’étude. Les enfants ont été vus régulièrement pour suivi des données anthropométriques. Le surpoids a été défini comme un index de masse corporelle supérieur au 90ème percentile, et l’obésité comme un index supérieur au 97ème percentile. L’existence d’un surpoids chez les parents (index de masse corporelle supérieur à 27 kg/m²) a aussi été pris en compte. Les enfants ont été répartis en 2 grou­pes suivant qu’ils avaient été allaités pendant 3 mois et plus, ou qu’ils avaient été allaités pendant moins de 3 mois ou pas du tout. Toutes les données ont été analysées par régression logistique multiple. L’impact potentiel des en­fants qui n’ont pas pu être suivis a été pris en compte.

    L’index de masse corporelle était similaire dans les 2 groupes à la naissance. A 3 mois, les enfants non allaités avaient un index de masse corporelle significativement plus élevé que les enfants allaités. A l’âge de 6 mois, le pourcentage d’enfants présentant un surpoids ou une obésité était plus important chez les enfants non allaités. Aux âges de 4, 5 et 6 ans, la prévalence du surpoids et de l’obésité était respectivement presque 2 fois et 3 fois plus éle­vée chez les enfants qui n’avaient pas été allaités ou l’avaient été pendant moins de 3 mois. Après analyse et correction pour les biais, les facteurs de risque pour le surpoids et l’obésité à l’âge de 6 ans étaient le surpoids ma­ternel, le tabagisme maternel pendant la grossesse, le non-allaitementt, et un statut social bas.

    Les auteurs concluent que le non-allaitement et le sevrage précoce favorisent la survenue d’un surpoids ou d’une obésité constatés  dès la première année, et confirmés à l’âge de 6 ans, parallèlement à d’autres facteurs de risque.


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    Qu’est-ce que les signes apportent aux petits bébés ? Les bénéfices des signes pour les bébés peuvent nous motiver pour les proposer aux bébés qui ont un handicap ou un risque.

     

     

     

    La proposition de signer avec les bébés n’est pas au départ imaginée pour les enfants en difficulté de communication. Hors, on sait maintenant que la communication vers les bébés accompagnée de signes et de gestes, permet une meilleure communication de l’adulte vers l’enfant et permet aussi à l’enfant de rentrer plus vite dans la communication symbolique et le langage.

     

     Les signes aident l’enfant à écouter…à comprendre. Et avec nos mains, nous lions tout à la fois ce qu’il voit, ce qu’il entend, ce qu’il ressent. Nos mains l’aident à comprendre ce que nous disons. :

     

     “Il écoute avec ses yeux…” ou bien : ”ils écoutent mieux quand je signe.”

     

    Quand je parle, il ne veut pas entendre ; quand je signe, il écoute.”

     

     Nos mains les aident à savoir où trouver les mots importants dans les phrases que l’on dit. Nos mains deviennent un surligneur, et permettent à l’enfant de “voir” les mots - clé.

     

     " La langue des signes oblige à communiquer d'une autre manière: regarder l'enfant, attendre le regard, capter son attention, prendre le temps de lui parler, diminuer le débit de parole."

     

     "Cela nous aide au quotidien avec les enfants, les signes apaisent les enfants, il y a moins de frustration. Lorsqu’un signe est acquis, que l'enfant comprend la signification, nous pouvons leurs apprendre de nouveaux signes, l'enfant est réceptif attentif ».

     

     Les mains vont l’aider à dire : dire simplement « encore », « manger », mais aussi partager ce qui l’intéresse, ce qui l’intrigue, ce qu’il aime : c’est le bébé qui dirige !

     

    On n’a pas besoin de deviner, il peut dire.

     

     « Satine, 10 mois, commence vraiment à signer.

     

    Vu de l’extérieur, tout est pareil, mais je vois qu’elle fait des distinctions entre les signes ”.

     

     Il y a des signes majeurs :

     

    •  Il s’agit de « regarde ».

     

    Regarde est un super signe pour aider le bébé, qui furète et qui regarde partout, à regarder ce qui est réellement important. C’est comme un minuscule fil, qui va des yeux du bébé … aux autres enfants, à papa qui rentre, à un animal, l’assiette… on voit bien comme il va aider les bébés en difficulté à s’ouvrir sur le monde.

     

    • Il y a ”donne” qui aide à prendre conscience des autres.

     

    • Et il y a « s’asseoir », un signe magique parmi les signes français, qui invite un bébé énergique à s’asseoir !

     

    •  Et tous les signes qui permettent de dire à l’enfant ce qui va se passer pour lui ; toujours l’avertir. « Je vais te débarbouiller, changer ta couche… ». Et les résultats stupéfient toujours les adultes. La vie devient plus facile !!! Moins de pleurs…

     

    • Et à la crèche, les signes ritualisent les routines quotidiennes : les repas, la toilette, attendre…

     

    • Je voudrais faire une place particulière à l’expression des émotions. Aider les bébés à comprendre et nommer ce qu’ils ressentent. La colère, la tristesse, la joie, mais surtout, la vitale émotion de la peur… nous ressentons les émotions du bébé, nous les nommons, nous les expliquons: avec nos mains, avec nos mots, nous expliquons au bébé pourquoi il est triste, ou en souffrance, ou en colère, ce qui lui a fait peur … et on voit ce petit comprendre et se calmer. C’est à chaque fois tout à fait émouvant

     

    Les signes ancrent la communication dans le regard, lui donnent une armature. Nous nous donnons un outil pour mieux nous »brancher » l’un avec l’autre.

     

    On ne peut pas signer sans regarder l’enfant. On doit ralentir, se baisser également.

     

    « Signer calme les bébés agités, cela nous ralentit »

     

    Au moment des repas, plus de stress… ils sont là, ils nous regardent, ils signent, ils chantent”

     

    Quand nous signons, nous indiquons à l’enfant que ce que nous lui disons est important pour lui et pour nous”.

     

    «  c’est terrible, a dit une directrice, je me suis rendue compte que je ne regardais jamais les enfants quand je leur parlais »

     

    Le fait aussi que les adultes ne connaissent normalement que peu de signes, leur donne un cadre pour les aider à simplifier leur langage, à utiliser moins de mots..(sauf je l’avoue pour certaines mamans rencontrées qui se croyaient obligées d’utiliser tous les signes du dictionnaire)

     

    Une fois posés ces préalables, on voit déjà ce que la proposition des signes avec tous les bébés peut apporter aux parents et aux bébés ayant des difficultés de communication.

     

    Comment les choses se passent-elles en crèche ?

     

    On voit aussi des structures d’accueil des petits se former à l’utilisation des signes dans la collectivité. Et on les voit cheminer en parallèle dans l’accueil des enfants dits différents.

     

    Les signes devenant alors une vraie chance pour les enfants handicapés, de trouver leur place dans le groupe, la proposition de signer étant adressée à tous ne stigmatise pas les besoins spécifiques de l’enfant handicapé.

     

    "Du côté de l’équipe, il y a eu un changement dans la relation avec les enfants. En utilisant ce langage, nous observons que les enfants sont plus calmes. Ceux dont les parents n'ont pas suivi la formation sont également très intéressés et parviennent à utiliser ce langage. Personne n'est exclu. C'est au contraire un élément fédérateur. Nous avons l'habitude et la volonté de mélanger les tranches d'âge. Ce langage permet vraiment aux petits de trouver leur place et aux grands de s'amuser avec eux. "

     

    "Actuellement, les enfants baignent dans les signes. On parle en signant, on chante en signant. Les professionnelles signent, les parents signent lors des permanences. Les enfants se sont approprié ce langage. Ils regardent, ils comprennent et la plupart savent maintenant signer. Et tout le monde peut en apprécier les avantages"

     

    « Le LS au début est tout nouveau pour l'enfant, à la maison les parents n'ont jamais signé avec eux. Lorsque l'enfant sait un signe, qu'il le répète nous le communiquons aux parents. On laisse le choix aux parents de signer avec leurs enfants. Nous avons remarqué que les enfants sans frustration signent peu, juste pour "boire" "encore" "manger" "gâteau". »

     

    « Il se trouve que les ateliers ont commencé l'année où Antoine est arrivé à la crèche. Je dois dire que j'ai trouvé ça très rassurant.  D'autant plus rassurant que cela mettait a priori, Antoine sur le même pied d'égalité que les autres enfants (même si un bébé d'un an signait mieux que lui à deux ans !). Les signes créaient donc un socle commun entre tous les enfants, mais aussi les adultes (parents et professionnels). Je me souviens aussi d'un petit garçon russe qui ne maîtrisait pas du tout le français et pour qui les signes ont été d'un grand secours.

     

    Au départ, j'ai donc vraiment senti un véritable engouement de la part des parents et des professionnelles de la crèche. Cela a créé une émulation, notamment au moment des comptines, des chansons et au moment des repas (je ne pense pas qu'à aucun moment les signes aient été intégrés sur une journée entière et utilisés systématiquement à chaque prise de parole). »

     

    "Mon fils est porteur de trisomie 21 .C'est une chance inespérée pour lui qui "baigne" ainsi du matin au soir dans les signes, qu'il soit à la crèche ou à la maison. A 2 ans et demi, notre fils ne parle toujours pas mais il maîtrise une bonne dizaine de signes qui lui permettent de s'exprimer et de participer à de nombreux échanges avec son entourage. Son premier signe a été "encore" (voir photo "encore du gâteau au chocolat"); les autres correspondent aux moments clés de la journée : les repas (manger, pain, gâteau, encore, fini...), les temps de jeux (signes des animaux, ballon, cubes, livre...), le bain, le coucher.

     

    Le projet est vraiment une très belle idée qui permet à tout enfant et adulte de communiquer autrement que par la parole, et de fait, contribue à l'enrichissement de chacun."

     

    "La langue des signes participe a la mise en place d’une relation collective différente au sein de la structure petite enfance. L'accueil doit avant tout être respectueux de l'individu tout en s'établissant dans un environnement collectif. L'adulte, parent ou professionnel, cherche à établir une relation individuelle pour répondre aux besoins de enfant. La méthode “signe avec moi” facilite cette démarche, car elle demande à tous les interlocuteurs de porter attention aux autres. Le dialogue se construit par de l'attention, par la recherche de réponses, puis petit à petit un vocabulaire d'échange collectif se met en place, le signe mettant le mot en résonance. Le langage verbal et le signe sont complémentaires, ils aident a créer une relation de partage. Chacun s'approprie ce qui lui semble indispensable dans son développement.

     

    La formation "Signe avec Moi " a été initiée par un groupe de parents, mais ce sont les enfants qui nous convainquent vraiment, soit parce qu’ils n'ont pas encore acquis le langage verbal, soit parce qu’ils ne connaissent pas la langue française, soit parce que leur culture est différente, ou soit parce que cela permet un mode d’expression plus complet où le corps est mis à contribution tout comme la parole. Le geste accentue l’implication et souligne le sens. Souligner chaque intention témoigne d’une réelle volonté de relation et chacun se sent concerné. C’est très agréable car nous prenons du temps pour se parler.

     

    Il parait important de souligner ici à quel point la proposition de signer à des structures petite enfance (crèches, garderies) vont ouvrir les professionnels à l’accueil des enfants handicapés.

     

    Les signes ne seront pas réservés à l’enfant en difficulté, stigmatisation de plus : on signe parce que cet enfant a un handicap, et on montre encore un peu plus ses difficultés. Non, on signe pour tous les enfants, et il va en profiter, comme les autres, peut-être plus que les autres, mais avec les autres. Et ça change tout !

     

    Pour les parents de l’enfant en question, c’est vraiment important : la crèche ne fait pas une démarche qui entre encore et encore dans la rééducation, la focalisation sur ses difficultés. Non, la crèche fait une démarche pour tous, qui répondra plus particulièrement à ses besoins spécifiques. Mais sans le montrer du doigt !!

     

    «  Je suis persuadée que les signes sont un outil supplémentaire pour un enfant, même ordinaire, et qu'ils participent à la construction de la personnalité de l'enfant, au même titre que le jeu par exemple. Bien sûr un enfant ordinaire peut s'en passer, mais qu'est-ce qu'un enfant ordinaire ? Tout enfant est susceptible de rencontrer un problème de communication à un moment donné de par son  origine, sa personnalité, son milieu familial, un accident ... et même sans parler de problème éventuel, les gestes participent au développement des sens, à la construction de l'enfant et à la mise en contact avec l'autre. »

     

    En crèche aussi, il est intéressant de voir que les signes utilisés dans le groupe des grands ( 2 ;3 ans) pour aider un enfant qui ne parle pas, alors que les autres parlent, oblige les éducatrices à mettre des mots sur le handicap. «  Tu vois, Théo n’arrive pas bien à parler avec sa bouche, alors on l’aide en parlant avec nos mains »

     

    La difficulté en crèche semble être de tenir sur le long cours !! Cet outil peut être fragile dans les crèches : le personnel bouge beaucoup, il faut de la ténacité, se donner les moyens, entretenir les signes, y croire encore. Echanger avec d’autres structures… de ne pas perdre l’enthousiasme des débuts, continuer à signer avec les nouveaux enfants, motiver les nouvelles éducatrices…

     

    « Actuellement, Antoine continue à aller quelques après-midi à la crèche. J'ai donc beaucoup moins de visibilité sur les activités qui se pratiquent avec les signes (si elles se pratiquent encore). Je peux juste dire qu'à mon niveau, les signes sont devenus imperceptibles.

     

    Idéalement, il faudrait que les ateliers aient lieu tous les ans, qu'en quelques sortes, ils fassent partie des missions que se fixe la crèche. »

     

    D’où l’importance d’en faire un projet d’équipe, porté par l’équipe et la direction !

     

    "Cela fait deux ans que je signe à la crèche sur les deux sections que j'ai faite (les bébés et les moyens) nous signons avec mes collègues de travail que je trouve très motivées, car sans elles le LS ne serait pas possible. »

     

    "Des séances d’auto-formation puis de formation ont vu le jour très rapidement à la crèche. Les parents et les professionnelles de la crèche et du quartier ont été invités à participer.. Parmi elles, tous les professionnels de la crèche. La dynamique était lancée et c’est sans doute ce qui a favorise la transmission de ce langage aux autres enfants et aux autres familles de la crèche"

     

    « Je dois vous dire que c'est un travail qu'il faut être tenace car au quotidien cela demande de l'énergie et de la ténacité »

     

    Malheureusement, il me semble que si l’enthousiasme est réel dans un premier temps, il retombe très vite. Au bout de quelques mois, très peu de parents continuaient à pratiquer et il en était de même pour les professionnels.  J'ai d'autant plus de facilité à le dire, que moi la première, j'ai eu beaucoup de mal à m'y mettre et qu'il est très difficile de s’astreindre à pratiquer. »


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  • Ressources documentaires :PetitMonde.com Journal des Professionnels de l’Enfance, n°23 Formation "Initiation à l’Eveil du tout-petit" "Vivre en crèche, remédier aux douces violences", de C. Schuhl, Ed° Chroniques Sociales Spirale, n°38, juin 2006, Ed° Erès

    Les mots qui blessent

     

    L’ingrédient essentiel de l’autorité est la communication, verbale ou non-verbale. La parole et notre attitude avec les enfants sont importantes pour donner une image positive de lui-même à l’enfant, le valoriser en tant qu’individu, établir une relation de confiance avec lui.

     

    C’est sur cela qu’il s’appuiera pour se construire, à l’intérieur d’un espace sécurisé que nous aurons balisé (limites).
    L’enfant doit se sentir exister, reconnu avec ses compétences (surtout s’il "n’entre pas dans le moule"), en tant qu’individu au milieu des autres.
    Mais nos paroles manquent de cohérence. Au contraire, elles sont souvent blessantes, voire traumatisantes pour un enfant qui prend les mots au pied de la lettre.

    Il ne faudrait pas :

    Ne pas faire correspondre les paroles aux intentions :
    Quand on dit à un enfant : " est-ce que tu vas t’arrêter ? ", il n’entend pas "arrête toi". Pour lui, c’est juste une question à laquelle n’existent que deux réponses (oui-non) ; il ne comprend pas que l’on désire qu’il s’arrête.

    Transmettre une émotion comme seul message :
    Avant 3 ans, 90% de la communication est non-verbale.
    Lorsqu’on s’adresse à l’enfant dans un accès de colère, l’enfant se focalise avant tout sur la colère. Il ne fait plus le lien avec le comportement que l’on essaie de modifier, d’éviter.

    Dépersonnaliser l’enfant :
    "Vous vous asseyez" : le tout-petit n’entend pas son prénom, il ne sait pas qu’on s’adresse à lui !
    Petit à petit, l’enfant intègre cette notion de collectif ("vous"), ce qui permet l’usage de ces termes ; mais il faut toujours penser à individualiser l’enfant dans le groupe, plusieurs fois au cours de la journée, au travers d’activités, de moments individualisés.

    Etouffer les sentiments des enfants :
    Avec des phrases apparemment anodines, du type "c’est ridicule, d’avoir peur",
    "tu ne devrais pas être triste",
    "tu ne t’es pas fait mal",
    "tout va bien",
    "là, c’est fini",
    "c’est rien, voyons"
    Et comme le souligne la psychologue Anne Bacus : " les sentiments des enfants ont le droit d’être exprimés et doivent être respectés ".
    Exemple de ce qu’il convient de dire : « Je comprends que tu sois en colère, mais ça ne te donne pas le droit de mordre, taper… ». On reconnaît le sentiment de l’enfant, tout en lui expliquant l’interdit.

    Donner des étiquettes ou des jugements définitifs :" Tu es méchant ",
    " Tu es un paresseux ",
    "Tu es un vrai cochon"...
    Ces phrases sont autant de jugements définitifs prononcés au quotidien par des adultes qui ne mesurent pas assez l’impact de leurs discours.
    Or, les mots peuvent faire très mal, comme l’explique la psychologue Anne Bacus : " Les étiquettes appliquées à l’enfant sont toujours déconseillées. L’enfant va avoir tendance à s’y conformer (pourquoi essayer de changer, puisque de toute façon je suis comme ça ?) ".
    L’enfant devient le "mauvais objet".

    Donner un surnom, ou utiliser une appellation impersonnelle :
    "petit garçon",
    "grande fille",
    "ma louloute",
    "Paul, viens ma puce",
    "mon poussin", "mon chaton"...
    Ces termes sont un déni de l’identité. Quelle image peut avoir l’enfant de lui-même, pour la construction de son identité ? Il s’agit ni plus ni moins de respect de l’individu. Pas de “troisième personne” : "Marc, il va arrêter", "Il va pas commencer à pleurer, hein !"
    Eviter les surnoms permet aussi de conserver une bonne neutralité professionnelle (pas de "mon chéri").

    Culpabiliser l’enfant :
    "Tu me rends malade ",
    "Tu me rends folle "…
    Ces formules ont toutes une portée culpabilisante pour les enfants qui prennent les mots au pied de la lettre. Il faudrait toujours avoir en tête qu’ils n’ont pas les outils nécessaires pour décrypter nos messages.

    Il convient de :

    Utiliser un vocabulaire convenable (on donne l’exemple) :
    On entend parfois des choses incroyables, qui nous écorchent littéralement les oreilles !! Dans les exemples à oublier et éviter :
    "finis ta bouche"
    "viens changer tes fesses"
    Ce ne sont pas des messages clairs pour l’enfant, Il prend tout au pied de la lettre : que doit-il faire de ces demandes ?
    "tu en reveux ?" (ce n’est pas grammaticalement juste – verbe "revouloir" inexistant)
    Il faut utiliser un vocabulaire précis, simple, convenable, compréhensible pour l’enfant. Expliquer, verbaliser les interdits ; et féliciter pour les bonnes choses, les bons comportements.


    Profiter de tous les moments pour individualiser le langage ; parler à tous les enfants, avec un langage adapté.
    Utiliser "tu", "je" plutôt que "il" ou "on".

    Etre attentif aux messages que l’on délivre :
    Il faut préférer "Je ne suis pas du tout d’accord avec ce que tu as fait" à "Tu es vraiment méchant" ! Essayons de trouver des phrases positives pour exprimer même un interdit. Par exemple, si l’on ne veut pas que l’enfant grimpe par la pente du toboggan, par raison de sécurité, on évitera "Ne grimpe pas comme ça", et on dira de préférence "Passe plutôt par l’escalier". C’est aussi offrir une alternative à l’enfant pour ses actions.

    De même, certaines paroles adressées à l’enfant décrédibilisent les parents et le milieu familial aux yeux de l’enfant : "Ici, c’est pas comme à la maison, tu n’as pas le doit de tout faire !" C’est un jugement que les professionnels portent devant l’enfant sur une partie de sa vie ! Je pense qu’il est possible d’expliquer à l’enfant que la crèche possède certaines règles (liées aux locaux, à la collectivité), qu’il ne retrouve peut-être pas chez lui, mais auxquelles il doit se conformer.
    Si l’on n’y prend garde, on entre facilement en conflit avec l’enfant, c’est l’escalade jusqu’au cri. Il vaut mieux être un exemple pour l’enfant, rester calme, répondre posément : cela l’aidera aussi à se calmer.

    Il faut utiliser un ton correct, calme : ferme si nécessaire, mais ne pas crier.Dans notre position à l’enfant, dans le portage, dans nos mouvements parfois brusques, il se peut que l’enfant reçoive un message de stress, d’agressivité, d’énervement.

    Il faut toujours rester calme, être maître de ses mouvements.
    Avant de parler à l’enfant (et cela est valable aussi lorsque l’on s’adresse à une collègue, un parent), il faut bien prendre sa respiration, être détendue dans son corps.
    Il convient de parler à l’enfant en se mettant à sa hauteur et en face de lui (surtout si l’enfant est en colère, très énervé !! Cela permet de faire baisser la tension petit à petit).

    Faire correspondre son discours à ses actes
    Ne pas entrer dans le « fais ce que je dis, ne fais pas ce que je fais ». Rester un exemple pour l’enfant, à tout moment ; rester cohérent soi-même et entre professionnels.
    Exemple : demander à l’enfant de ne pas s’asseoir sur une table, et le faire soi-même plus tard, dans une autre salle, pour une lecture d’histoire, par exemple.

    Eviter de parler devant l’enfant des difficultés occasionnées par son comportement :C’est là lui donner un pouvoir tout à fait angoissant : « Si l’adulte ne sait plus quoi faire, qui va savoir ? ».

     

     


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    • Par Lefigaro.fr avec AFP, Mis à jour le 16/02/2015 à 16:58, Publié le 16/02/2015 à 16:57

    Les ministres François Rebsamen (Travail) et Laurence Rossignol (Famille) ont signé lundi avec les partenaires sociaux un accord-cadre visant à valoriser et développer les métiers de la petite enfance. Cet accord national d'engagement de développement de l'emploi et des compétences (Edec), conclu pour la période 2015-2018, concernera le secteur privé de la petite enfance (crèches associatives, particuliers employeurs d'assistants maternels ou de gardes à domicile, entreprises de crèches), ont précisé les deux ministères dans un communiqué.
    L'Etat apportera jusqu'à 1,5 million d'euros et les organismes paritaires finançant la formation professionnelle des salariés jusqu'à 3,5 millions, soit un total de 5 millions d'euros.

    Ces sommes serviront à financer des actions de soutien aux salariés (professionnalisation, développement des compétences, prévention des risques professionnels) et aux employeurs (gestion des ressources humaines, recrutement). Il permettra notamment l'accès à la qualification, par exemple en promouvant la validation des acquis de l'expérience vers le diplôme d'auxiliaire de puériculture, selon le communiqué. Il vise aussi à mieux faire connaître les métiers de la petite enfance. "C'est la première pierre d'un plan pour les métiers de la petite enfance que je présenterai prochainement", a déclaré Laurence Rossignol, citée dans le communiqué.

    Pour François Rebsamen, "il est indispensable de valoriser (ces métiers) qui constituent un gisement d'emplois (...)".
    Il a souligné qu'une partie des employeurs du secteur est confrontée à des difficultés de recrutement, et que de nombreux départs à la retraite, notamment d'assistants maternels, sont prévus dans les prochains mois, selon le texte de son discours. Parallèlement, les parents sont demandeurs d'accueil sur des horaires "atypiques ou décalés". Le gouvernement a fixé l'objectif d'accroître de 275.000 le nombre de places d'accueil de jeunes enfants entre 2012 et 2017 (+20% en cinq ans): +100.000 places de crèches, +100.000 places chez des assistantes maternelles et +75.000 places en écoles maternelles.


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  • L'importance du jeu

    Le jeu est fondamental pour le bien-être et le développement de tout enfant. Quand les enfants jouent, ils développent leurs habiletés sur plusieurs plans. Ils réfléchissent, résolvent des problèmes, s’expriment, bougent, coopèrent, font appel à leurs impressions et exercent leur conscience morale.

    Apprendre grâce au jeu

    Au cours des premières années de leur vie, les enfants explorent ou jouent en faisant les mêmes choses encore et encore.

    Les bébés, par exemple, vont saisir des blocs, les manipuler et les porter à leur bouche. Les tout-petits vont construire des tours avec leurs blocs simplement pour les faire tomber.

    Cet entraînement répété leur permet d’apprendre et de développer leur confiance en eux. Les enfants apprennent ce que sont les objets et ce qu’ils peuvent en faire. Ils commencent à comprendre leur univers.

    Pour les tout-petits, le jeu est une façon naturelle d’apprendre. Il se rapproche de la manière dont nous apprenons dans la vie de tous les jours. Au lieu d’intégrer un concept à la fois, comme on le fait en classe, les enfants doivent apprendre et utiliser plusieurs idées et objets en même temps.

    Jouer, c’est aussi joindre l’utile à l’agréable. Le jeu rend les enfants heureux ce qui facilite leur apprentissage et le rend même plus efficace.

    Jouer à faire semblant

    En grandissant, les enfants jouent à faire semblant et montrent ce qu’ils savent. Par exemple, quand ils portent un bloc à leur oreille et disent : « Allô! », ils montrent qu’un objet peut être un téléphone « pour rire » et qu’un téléphone sert à parler aux gens. Quand ils décident de construire un château ou un aéroport, ils doivent réfléchir à la manière de s’y prendre pour atteindre leur but. Ils doivent donc faire preuve de créativité et de capacité à résoudre les problèmes.

    Quand ils jouent à faire semblant, les enfants comprennent le monde en essayant des choses qu’ils ont apprises et qu’ils ont vues, et en réfléchissant à leurs impressions. Ils « font le tri » entre l’imagination et la réalité. Rien qu’en regardant votre petit jouer, vous pouvez apprendre beaucoup de choses sur ce qu’il ressent et sur ce qu’il pense.

    À peu près au moment où ils commencent l’école, les enfants se mettent à jouer à des jeux régis par des règles, auxquelles ils doivent se plier. Cela les incite à se servir de stratégies, de logique et de leur jugement moral. Des jeux de table, comme le Jeu des serpents et échelles, les jeux de cartes et les sports d’équipe comportent tous des règles. Ils aident les enfants à apprendre à jouer à tour de rôle, à négocier, à résoudre des problèmes et à s’entendre avec les autres.

     

    Naitre et grandir.com

           Révision scientifique : Liane Comeau, Ph. D., consultante scientifique en petite enfance
          Traduction et adaptation : Équipe Naître et grandir
          Mise à jour : Août 2013


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