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  • L'attachement comme facteur essentiel de bon développement

     
        L'enfant développe très tôt des " stratégies d'attachement " pour que l'on s'occupe de lui. Il fait preuve de capacités d'adaptation considérables, repérant instinctivement ce à quoi sont sensibles ses proches. Il préférera même un rapport négatif à ses parents plutôt qu'une absence d'interaction. Ce qui est essentiel pour lui : se sentir pris en charge et protégé, par ses parents bien sûr, sinon sa famille plus large ou des adultes extérieurs. L'enfant agit en fonction de ce qui optimise sa propre protection. Raphaële Miljkovitch, docteur en psychologie, analyse ces mécanismes d'attachement.
         

    Raphaële Miljkovitch
    Docteur en psychologie,
    professeur, université Paris-Ouest - Nanterre La Défense, chef de projets de recherche, Institut mutualiste Montsouris, thérapeute familiale, Centre Monceau, Paris.

     

    L'attachement est un besoin primordial de l'enfant. Pour survivre, il a besoin d'au moins un adulte qui veille sur lui et le protège. Grâce aux réponses de ce dernier à ses manifestations de détresse, le bébé apprend progressivement à surmonter la peur. La présence de l'adulte lui permet en outre d'apprivoiser un environnement qui lui est au départ inconnu. En s'exposant en toute sécurité au monde, tant physique que social, l'enfant se familiarise avec les différentes choses et personnes qui l'entourent. Lorsque l'accompagnement parental1 fait défaut, il ressent une anxiété importante, qui nuit à son développement et peut précipiter la survenue de symptômes (1).


    Le minimum vital : la relation dyadique

    Afin de grandir harmonieusement, l'enfant a donc besoin à tout instant de se sentir en sécurité. Dès que celle-ci lui paraît menacée, que ce soit en raison d'une sensation désagréable qu'il ne comprend pas ou d'un aspect effrayant de l'environnement, il agit de façon à favoriser un rapprochement de l'adulte. Dès sa naissance, le bébé dispose d'un répertoire de comportements innés (tels que les cris), qui ont généralement pour effet d'interpeller et mobiliser le parent. Toutefois, il arrive que ces tendances naturelles ne suffisent pas à obtenir la sécurité recherchée. Dans ce cas, l'enfant en modifie l'expression.
    La manière dont l'enfant ajuste son comportement en vue de s'assurer de la présence de l'adulte dépend de la façon dont ce dernier réagit à ses demandes. Tout se passe comme si au moins l'un des deux membres de la dyade devait veiller à ce qu'il ne coure aucun risque. Généralement, le parent assume la responsabilité d'intervenir, si besoin est, et l'enfant n'a pas besoin d'être continuellement sur le qui-vive. Il lui suffit de lui signaler son besoin d'être rassuré quand il se trouve dans une situation alarmante. Son comportement (cris, agitation, etc.) a pour effet de faire venir l'adulte, ce qui fait disparaître sa détresse. À travers l'expérience répétée de ce genre de scénario, l'enfant apprend qu'il peut compter sur lui en cas de besoin et développe un sentiment de confiance et de tranquillité : on dit d'un tel enfant qu'il est " écure ". Il arrive toutefois, pour des raisons diverses, que le parent n'assure plus tout à fait cette fonction (2). Il revient alors à l'enfant de rester vigilant quant aux conditions de sécurité et de trouver des moyens qui lui permettent de pallier les manquements de l'adulte.


    Tout faire pour préserver le lien

    Les enfants, même petits, développent des stratégies variées, appelées " stratégies d'attachement ", pour parvenir à ce que l'on s'occupe d'eux. Aussi jeune soit-il, l'enfant saisit très bien les attentes de ses parents. Bien que, bébé, il n'ait pas encore la capacité de se mettre à la place d'autrui, il constate que certains de ses comportements sont mieux reçus que d'autres. Par exemple, si, pris dans les bras d'une autre femme, il se montre souriant et que sa mère s'empresse alors de le reprendre en le consolant, il comprendra que les autres personnes sont susceptibles de lui nuire et qu'il doit s'en tenir à l'écart. Même si les réactions de sa mère sont décalées par rapport à ce qu'il ressent véritablement, l'enfant va tout de même accepter ce qu'elle lui communique, car il s'en remet à elle (ou plus généralement à ses " donneurs de soins ") pour déterminer ce qui est le mieux pour lui. Très réceptif à ce qui lui déplaît, l'enfant cherche à ne pas la contrarier et risquer de compromettre le lien affectif qui existe entre elle et lui. Il apprend vite à éviter de provoquer chez elle des réactions négatives, qui éveilleraient en lui un sentiment d'insécurité. À l'inverse, le bébé remarque aussi ce qui est apprécié par ses parents et les met dans de bonnes dispositions.

    Cela étant, J. Bowlby (3) estimait qu'il valait mieux avoir une " mauvaise mère " que pas de mère du tout. Nous n'aborderons pas ici la question de la place de la mère par rapport à d'autres adultes en ce qui concerne la fonction d'attachement (4) mais, d'une manière générale, on constate effectivement que les enfants préfèrent un rapport négatif avec leurs parents à une absence totale d'interaction. Parfois, le simple fait de réussir à attirer l'attention sur soi, même si cela donne lieu à un échange violent ou douloureux, peut sembler relever de l'attachement. Qu'il soit bienveillant ou non, un parent reste, aux yeux de l'enfant, le havre de sécurité vers lequel se tourner en cas de peur. Tant qu'il n'est pas suffisamment mature pour se prendre en charge tout seul ou qu'il n'a pas la possibilité de se réfugier ailleurs, un tout-petit, même maltraité, reste aux côtés de ses parents. De son point de vue, c'est ce qui est le plus favorable à sa survie. Pour cette raison, les comportements qui permettent au minimum d'attirer l'attention sur soi et, au mieux, d'obtenir du parent une attitude protectrice ou réconfortante peuvent être considérés comme des comportements d'attachement (5). Le plus naturel consiste à signifier sa détresse par des cris ou des pleurs. Mais, lorsque ces signaux donnent lieu à un rejet, l'enfant peut alors éviter le parent pour ne pas représenter un poids pour lui ; il le met ainsi dans de meilleures dispositions. Une inversion des rôles où l'enfant se préoccupe du bien-être de l'adulte peut être un autre moyen de maintenir une forme de contact. Dans certaines circonstances, pour qu'on le remarque, l'enfant peut aussi en arriver à faire des crises. Même si cela donne lieu à un échange négatif, cela paraît préférable à une absence de lien (6).

    L'enfant peut aussi s'apercevoir que d'autres comportements, dont la finalité n'était pas, initialement, d'attirer le parent, peuvent néanmoins avoir cet effet. Par exemple, en se faisant mal accidentellement, il peut constater que l'adulte lui vient en aide, alors qu'il ne le fait pas autrement. Les blessures peuvent ainsi lui paraître d'une importance secondaire à côté du réconfort qu'elles permettent d'obtenir. L'enfant peut alors très vite user de ce type de comportement afin d'inciter l'adulte à s'occuper de lui. Ce qui est d'autant plus susceptible de se produire que des demandes plus directes ne parviennent pas à lui procurer les soins attendus. En somme, pour agir sur le parent de manière à trouver une réponse à ses besoins, l'enfant peut aussi développer des " stratégies d'attachement masquées ", en reproduisant des conduites autres, dont il s'est rendu compte qu'elles permettaient de mieux accéder à lui. Celles-ci peuvent aller de la prise de risques aux plaintes somatiques, en passant par l'agressivité.


    Les autres membres de la famille ont aussi leur importance

    Ce qui est essentiel pour un enfant, c'est de se sentir pris en charge et protégé. Bien sûr, un attachement à ses deux parents est optimal mais, lorsqu'un des parents est défaillant, l'intervention de l'autre parent peut plus ou moins combler les manques occasionnés par cette relation (7). Cela atténue ses effets délétères au niveau de l'équilibre psychologique de l'enfant mais aussi au niveau des liens qu'il tisse au cours de son développement. À la différence de la personne qui n'a connu que des relations difficiles au sein de sa famille, celle qui a bénéficié d'un soutien stable et rassurant arrive à concevoir les relations en termes positifs.

    L'impact négatif de l'insécurité dans la relation au parent peut donc être minimisé si l'enfant peut trouver au sein de sa famille un tiers sécurisant. On sait déjà que, s'il s'ajuste à chacune de ses figures d'attachement en fonction de leurs réactions spécifiques (8), il tient aussi compte de l'ensemble de son environnement dans son processus d'adaptation (5). Par exemple, il réagira très différemment à un père maltraitant selon qu'il vit seul avec lui, que sa mère cautionne les agissements de son mari ou qu'au contraire elle s'oppose à lui. L'enfant agit en fonction de ce qui optimise sa propre protection. C'est ainsi que, face à un père violent, si la mère n'est pas en mesure de le protéger, il aura meilleur intérêt à se montrer positif (ce qui peut l'amener à idéaliser son père) qu'à se montrer révolté et risquer de provoquer en lui encore plus de comportements hostiles. Il en ira tout autrement si la mère intervient.

    Par ailleurs, l'entrée dans l'adolescence peut être un de ces facteurs qui amènent l'enfant à se rendre compte de la situation dans laquelle il se trouve. Outre le développement de ses capacités cognitives, qui lui ouvre de nouvelles perspectives et lui procure une certaine autonomie de pensée, l'adolescent n'est plus totalement dépendant de ses parents pour assurer sa survie. Leur proximité ne lui est plus indispensable. Par conséquent, si la vie de famille présente certains risques en raison, par exemple, de la violence qui y règne, ceux-ci ne sont plus nécessairement compensés par ce que les parents peuvent lui apporter sur d'autres plans en termes de minimum vital (ne serait-ce qu'un toit). Si, de plus, l'enfant trouve d'autres personnes susceptibles de l'aider, il sera d'autant moins enclin à rester sous leur emprise. Dans ce contexte, une solidarité entre frères et sœurs peut se développer et lui permettre de faire front face aux adultes. L'accès aux grands-parents peut également servir d'appui. La possibilité d'établir une
    relation extérieure à celle avec le(s) parent(s) défaillant(s) rend celle-ci moins cruciale pour s'assurer de sa propre protection.

    Les ressources à l'extérieur de la famille

    Les relations que l'enfant établit en dehors de la famille participent aussi à son bon développement (9, 10). En particulier, s'il est gardé par une nourrice, une auxiliaire de puériculture ou une baby-sitter, il s'en remet totalement à elle pendant la garde pour qu'elle lui apporte les soins dont il a besoin. S'il n'arrive pas à être rassuré dans sa famille, ce type de relation aura d'autant plus d'importance qu'elle estompe l'influence néfaste des liens familiaux et lui apporte un modèle de relation plus positif, qui teinte sa vision des rapports interpersonnels. Les moments partagés avec elle sont autant de moments qui contribuent eux aussi de manière significative à son développement.

    Ces personnes extérieures peuvent aussi jouer un rôle dans la qualité des interactions entre l'enfant et sa famille. Elles peuvent en particulier repérer certains comportements problématiques chez l'enfant et orienter les parents vers les instances compétentes pour qu'ils puissent être aidés dans leurs difficultés. Si l'enfant se comporte avec n'importe quel adulte comme s'il s'agissait d'un parent, s'il se met en danger en présence de sa mère ou de son père, si de manière persistante il est incapable de s'en détacher et ressent une peur extrême face aux étrangers, s'il est excessivement agressif, il convient de s'interroger par rapport à la qualité de l'attachement établi au sein de son foyer (11).


    Conclusion

    En bref, l'enfant fait preuve d'incroyables capacités d'adaptation pour inciter ses proches à s'occuper de lui, repérant de manière instinctive ce à quoi ils sont sensibles. En outre, il a beaucoup de ressources pour trouver dans son environnement les personnes qui vont lui permettre d'obtenir la protection et l'aide dont il a besoin. Par conséquent, plus il est entouré de personnes susceptibles de lui apporter les soins nécessaires, plus il aura de chances de trouver la sécurité. Bien sûr, la relation à la principale figure d'attachement (généralement la mère), parce qu'elle est durable et quotidienne, joue un rôle essentiel. Son poids va cependant varier en fonction des autres relations que l'enfant établit, à commencer par celle avec l'autre parent, mais aussi celles avec des adultes en dehors de la famille nucléaire.

     

    Note

    1. La référence au " parent " renvoie ici à toute personne qui fournit à l'enfant les soins indispensables à son développement.

    Références bibliographiques

    (1) Bowlby J. Attachement et perte. 1 : L'attachement ; 2 : La séparation, angoisse et colère ; 3 : La perte, tristesse et dépression. Paris : Puf, coll. Le fil rouge, 1978. Vol. 1 (2002, 544 p.), vol. 2 (2007, 560 p.) ; vol. 3 (2006, 608 p.).

    (2) Miljkovitch R. L'attachement au cours de la vie. Paris : Puf, coll. Le fil rouge, 2001 : 288 p.

    (3) Bowlby J. Forty-four juvenile thieves: Their characters and home life. International journal of psycho-analysis 1944; (25)19-52: 107-27.

    (4) Pour une revue de la littérature sur les spécificités du père par rapport à la mère, voir
    Miljkovitch R., Pierrehumbert B. Le père est-il l'égal de la mère ? Considérations sur l'attachement père-enfant. Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseaux, 2005 ; 35 : 115-29.

    (5) Miljkovitch R. Les fondations du lien amoureux. Paris : Puf, coll. Le lien social, 2009 : 232 p.

    (6) Miljkovitch R. Les troubles de l'attachement. Journal des professionnels de l'enfance, 2004 ; 31 : 63-4.

    (7) Howes C., Spieker S. Attachment relationships in the context of multiple caregivers. In: Cassidy J., Shaver P.R. (Eds.). Handbook of attachment. Theory, research, and clinical applications. NY: Guilford, 2008: 317-32.

    (8) Fox N.A., Kimmerly N.L., Schafer W.D. Attachment to mother/Attachment to father: A meta-analysis. Child development 1991; 62: 210-25.

    (9) Lecomte J. Guérir de son enfance. Paris : Odile Jacob, 2004 : 382 p.

    (10) Lighezzolo J., Tychey (de) C. La résilience. Se (re)construire après le traumatisme. Paris : éditions In press, 2004 : 120 p.

    (11) Zeanah C., Boris N.W., Lieberman A.F. Attachment disorders of infancy. In: Sameroff A.J., Lewis M., Miller S.M. (Eds.). Handbook of developmental psychopathology, (2nd ed.). New York: Kluwer Academic/Plenum publishers, 2000: 293-307.

     
    LA SANTÉ DE L'HOMME 400 | MARS-AVRIL 2009 |

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  • je vous invite à vous informer sur ce collectif que je suis depuis 2010 (ma première grève c'était avec eux ...)

    Ils défendent le développement de mode d'accueil de qualité pour les enfants accueillis en crèche.

    http://www.pasdebebesalaconsigne.com/


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    Le dessin et la peinture

     

    Extrait « Guide de puériculture » Ch. Gassier ; M.J. Georgin

     

    Peindre ou dessiner est une activité d’expression très importante chez l’enfant, elle lui permet de communiquer et présente de nombreux intérêts. C’est en effet :

    •  un acte créatif : l’enfant peut laisser libre cours à son imagination et exprimer d’une manière inconsciente ses émotions ;
    • un langage : les traces laissées par l’enfant lui permettent de se connaitre et de communiquer avec autrui ;

    • un jeu donnant du plaisir. 

    Le dessin

    Le dessin ou activité graphique comprend 2 éléments :

    •  le fait de laisser des traces ;
    • l’intention de représenter quelque chose.

     Différentes façons de dessiner 

    1° Sur des grands tableaux (tableaux noirs et craies de couleur ou tableaux blancs et feutres). Ces tableaux installés verticalement au mur permettent des mouvements très larges, ce qui est intéressant pour le jeune enfant. En effet, l’enfant de 18 mois, 2 ans utilise pour dessiner tout son bras (et non pas seulement son poignet comme un enfant plus grand), il a besoin d’un tableau de 1m2 environ, afin de faire des tracés suffisamment étendus.

     Une éponge humectée sera laissée à la disposition de l’enfant afin qu’il puisse effacer et recommencer. L’utilisation de l’éponge lui fournit de nouvelles perceptions et sensations.

    2° Sur des grandes feuilles (feuilles blanches ou de couleur). Ces feuilles peuvent être posées sur le sol. Elles permettent de faire des gribouillis à l’aide, le plus souvent, de gros feutres de couleurs.

    Par terre, le mouvement est plus étriqué, l’enfant doit utiliser son poignet pour diriger le mouvement. Cette activité sera donc profitable pour les enfants de 2 à 3 ans.

     

    3° Sur des petites feuilles. Ces feuilles seront collées sur une table avec du papier collant. Des feutres fins seront proposés et permettront à l’enfant d’exercer sa motricité fine.

    L’usage des crayons de couleur n’est pas recommandé chez le jeune enfant, car ils sont trop fragiles, les mines cassent facilement…ce qui peut décourager l’enfant.

     Rôle de l’auxiliaire de puériculture

    Elle respectera la créativité de l’enfant et ne l’incitera pas à représenter un objet quelconque.

    Elle incitera l’enfant à parler de son dessin et écoutera en évitant de lui proposer ses propres interprétations.

    Elle identifiera le dessin par le nom, prénom de l’enfant ainsi que la date. Il est important de dire à l’enfant qu’on écrit là son nom, prénom et pourquoi. L’enfant plus grand « écrira » lui-même son nom et prénom d’une façon toute personnelle qu’il faut respecter.

    Elle mettra le dessin dans le casier de l’enfant pour qu’il puisse l’offrir à ses parents.

    Dans certaines crèches, un dossier des dessins datés et réalisés et remis aux parents au moment de la sortie de l’enfant ? Nous pensons que la première solution est préférable car :

    - l’enfant aime faire un « cadeau » à ses parents ;

    - les parents sont au courant des activités faites par l’enfant et peuvent échanger avec lui en commentant le dessin.

     

    La peinture

    L’activité peinture doit être proposées au jeune enfant dans le but de découverte et non d’apprentissage. Elle doit être et rester une activité créatrice lui permettant de faire ses propres expériences, et de communiquer ses émotions…

     Le respect par l’adulte de l’aspect créatif de la peinture est fondamental.

    Différentes façons de peindre

    1° Peindre avec ses mains.

    L’enfant aime jouer avec les couleurs et couvrir de grands espaces. Différentes couleurs seront proposées à l’enfant dans des récipients plats et suffisamment larges (assiette plate ou autre…). L’enfant sera nu ou protégé par un petit tablier souple.

     

    1.1. Avantages : l’exploration de la peinture par la main est généralement source de plaisir pour l’enfant.

    Le contact direct avec cette matière molle et de couleur lui permet de développer ses sensations tactiles et visuelles :

    - connaitre le matériau « peinture »,

    - trouver une compensation à la frustration de son souhait de toucher d’autres matières, telle que ses selles ( activité compensatoire).

    Cette « technique »permet à l’enfant de développer ses capacités sensori-motrices et créatrices : son mouvement est libre. Sa créativité n’est pas entravée par son incapacité ou sa difficulté à maitriser un instrument fin tel que le pinceau.

     Elle lui permet de mieux connaitre son corps par :

    - les sensations corporelles qu’elle procure,

    - les traces de la main laissées sur la feuille.

    1.2. Inconvénients : certains enfants n’apprécient pas le contact avec cette matière pour des raisons variées. Ils peuvent ne pas apprécier :

    - son contact visqueux,

    -les traces laissées sur le corps 

    - soit parce qu’elles « salissent » le corps ( important chez les enfants dont les parents interdisent de se salir),

    - soit parce qu’elles ne peuvent pas s’enlever facilement et que cela modifie leur perception corporelle.

    Il est donc fondamental de respecter le refus de l’enfant.

    2° Peindre avec les pieds :

    2.1. : Installation : pour réaliser cette activité, il faut disposer d’une grande salle, dont le carrelage se lave facilement.

    Le sol est recouvert de grandes feuilles de papier collées les unes aux autres pour couvrir une grande surfaces.

    La couleur est placée dans des récipients plats et suffisamment larges afin que l’enfant puisse y poser son pied.

     

    2.2. Déroulement de l’activité : cette activité est une activité libre et créatrice. L’enfant doit pouvoir la pratiquer à son propre rythme.

    L’enfant trempe le pied dans la peinture puis marche sur la feuille pour y laisser toutes sortes de traces. Les traces sont différentes suivant qu’il marche à plat ou sur la pointe des pieds, qu’il fait des grands pas ou des petits pas, qu’il écarte les pieds ou les rejoint…

     

    Rôle de l’auxiliaire de puériculture

     

    Elle participe avec l’enfant à l’activité et fait commenter ce qui est réalisé :

    - On compare les traces laissées par les pieds de l’un ou de l’autre enfant ;

    - On parle de couleurs ;

    - On parle de se qu’on ressent ;

    - On constate que deux couleurs qui se mélangent forment une autre couleur.

    L’activité se termine par un bon bain pour enlever toutes traces de peinture.

    Lorsque le panneau est sec, il est exposé en mentionnant le nom des enfants ayant participé à l’activité.

     

    3° Peindre avec des outils. L’utilisation d’outils variés permet à l’enfant de multiplier ses expériences.

    3.1. Matériel :

    - les pinceaux incitent l’enfant à dessiner rapidement et grossièrement plutôt qu’à peindre ;

    - Les rouleaux offrent peu de possibilités créatrices ;

    - Les objets divers tels que bouchons, tissus, éponges, morceaux de carton ondulé, peignes, brosses à dents, petites balles en caoutchouc, peuvent être proposés à l’enfant. En les employant, il va découvrir une nouvelle technique d’utilisation, de nouvelles traces…  

    3.2. Installation : la peinture avec des instruments peut se réaliser :

    - sur des feuilles collées au mur :

    - Une boîte de carton, percée de trous destinés à recevoir les pots contenant de la peinture, est placée près de l’enfant,

    - l’enfant, protégé par un petit tablier, est debout face à la feuille. Les enfants doivent disposer d’un espace suffisamment grand pour ne pas se gêner les uns des autres ;

    - sur des feuilles collés sur une table :

        • la peinture se trouve dans de petits récipients,

        • il est préférable que les enfants soient debout.

     Rôle de l’auxiliaire de puériculture :

    Elle va :

    • participer à l’activité ;

    • veiller à ce que la plus grande liberté soit laissée à l’enfant ;

    • être à l’écoute de l’enfant ;

    • lui proposer un choix varié de couleurs ;

    • vérifier régulièrement de l’état du matériel ;

    • entretenir le matériel ;

    • tenir les parents informés de l’activité peinture et de ses intérêts ;

    • ranger les peintures identifiées dans le casier de l’enfant.

     

     


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    Langage gestuel : comment communiquer autrement avec son bébé ?

    Geste_parole

    Le langage gestuel permet aux bébés de communiquer avec leurs parents bien avant la mise en place de la parole. Le point sur cette nouvelle pratique avec la rédaction de Picoti, aidée de Nathanaëlle Bouhier-Charles, fondatrice du réseau “Signe avec moi”, et de Sandrine Higel, fondatrice de “Signes2mains Formation” et formatrice en crèches.

     

    Le langage gestuel

     

    Tout droit venue des États-Unis, cette pratique découle d'un constat physique : un jeune enfant maîtrise les muscles de ses bras et de ses mains avant ceux de sa bouche. Il est donc très tôt en mesure d'exprimer, au moyen de gestes simples, ses demandes, ses envies et ses émotions. Dès l'âge de 9 mois, un enfant commence naturellement à imiter ses parents. Il fait oui ou non de la tête, au revoir de la main, ou, pour jouer, il se cache les yeux derrière les mains.

    La création du langage gestuel vient de l'envie d'élargir cette palette de signes afin, comme l'explique Nathanaëlle Bouhier-Charles, de “permettre aux tout-petits de limiter leurs frustrations, de signifier leurs émotions et d'être mieux compris de leur entourage”.

     

    Un langage proche de celui des sourds ?

     

    Bien que de nombreux gestes en soient issus, le langage gestuel n'est pas, à proprement parler, la LSF (langue des signes française). Nathanaëlle Bouhier-Charles explique qu'il est essentiel de faire la distinction entre les deux : “La langue des signes est une langue propre, avec un système de grammaire et de vocabulaire particulier.” Le langage gestuel ne permet pas de construire des phrases, mais simplement d'exprimer des idées de façon très générale : “J'ai faim”, “J'ai mal”, etc.

     

    Un mode de communication ludique

     

    On peut se demander si le fait d'échanger par signes avec un enfant qui n'a pas de difficultés particulières pour communiquer n'est pas une lubie totalement artificielle. Pourquoi inculquer un savoir à un tout-petit qui a tellement de choses à apprendre par ailleurs ?

    “Les utilisateurs de cette pratique ne sont pas dans une optique de performance ni de méthode. Nous n'attendons aucun résultat, et il ne s'agit pas du tout d'enseigner une langue à l'enfant”, avance Sandrine Higel. Nathanaëlle Bouhier-Charles insiste sur ce point : “Le langage gestuel n'est pas déconnecté d'une relation d'affection. Il faut avant tout que cela reste ludique.”

     

     

    Le 10 novembre 2010 Charlotte Derville, pour le magazine Picoti


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  • article issu de : http://heloisejunier.com/

    Comment parler aux tout-petits ?

    Source photo : naître et grandir

    Chez les plus jeunes, l’émotion prévaut sur les mots. Dès lors, comment 
leur parler ? À quel rythme évolue leur compréhension des événements ? 
Y a-t-il des sujets tabous ? Entretien avec Marie-Noëlle Clément, psychiatre, psychothérapeute et auteur de « Comment te dire ? Savoir parler aux tout-petits » (Éditions Philippe Duval, 2013).

     

    Qu’est-ce qu’un jeune enfant comprend 
d’une situation complexe, tel que le divorce 
de ses parents, ou le décès de son grand-père ?


    Les enfants les plus jeunes, jusqu’à 2 ans, ne peuvent comprendre grand-chose sur le fond. Mais ils ont une forme d’intelligence perceptive qui leur permet de saisir avec une extraordinaire acuité toute forme de changement dans leur quotidien ou dans l’humeur de leurs proches. Si, par exemple, une personne décède dans la famille, ils ne peuvent pas saisir la teneur de cet événement. Mais ils ressen­tent que l’atmosphère familiale a changé, que leurs parents sont tristes, moins disponibles pour jouer ou communiquer. Et c’est la raison pour laquelle on ne peut pas faire comme si de rien n’était ! Le bébé structure son rapport au monde à travers les relations qu’il entretient avec les adultes qui s’oc­cupent de lui : il relie progressivement les situations qu’il vit avec les mots posés par les adultes pour nommer les événements et les émotions qui les accompagnent. Si l’on décide d’attendre que la compréhension soit parfaitement au rendez-vous pour parler à l’enfant, alors on peut repousser indéfiniment l’échéance, car les situa­tions de la vie sont souvent d’une telle complexité qu’on peut toujours se réfugier derrière cet argument pour ne rien en dire. Et puis, parler aux enfants de tout ce qui les concerne, dès le plus jeune âge, est aussi une manière pour l’adulte de s’habituer à trouver les mots et à les prononcer. L’échange entre le tout-petit et son entourage s’ins­crit ainsi dans un continuum dans lequel l’enfant se repère de mieux en mieux au fil des mois. Lorsqu’un événement familial, notamment douloureux, est passé sous silence sous prétexte qu’un tout-petit ne parle pas, il est fréquent qu’il ne soit pas réabordé par la suite. À l’inverse, s’il est nommé, il continuera à faire partie des échanges familiaux.

    Comment évolue la compréhension du tout-petit 
au fil de son développement ?


    Le tout-petit appréhende d’abord le monde au travers de ses sensations, de ses éprouvés corporels, de ses perceptions sensorielles. Les mots des adultes viennent peu à peu nommer et structurer ce vécu sensoriel, lui donner du sens. Puis, à partir de 2 ans, l’enfant passe progressivement d’une compréhension perceptive du monde et des événements à une compréhension narrative : le langage se développe, et il comprend d’ailleurs les mots avant de pouvoir les prononcer et les utiliser lui-même. Enfin, entre 3 ans et 6 ans, les repères spatio-temporels se mettent en place. Il saisit alors le sens des adverbes de temps et d’espace : « avant », « maintenant », « après », « ici », « ailleurs », etc.

    Les mots ont-ils pour l’enfant une valeur moindre
que les émotions, que l’infra-verbal ?


    En effet. L’enfant parle avant tout le langage du corps et des émotions, et c’est d’autant plus vrai qu’il est plus jeune. C’est pourquoi, face à un enfant, il est particulièrement important de mettre son discours en accord avec ses émotions. C’est le fameux « parler vrai » que préconisait Françoise Dolto. Cela signifie qu’il n’est pas judicieux de dire que l’on est content si l’on est triste, même avec la louable intention de protéger l’enfant… car alors il ne sait plus à quel saint se vouer !

    Généralement, l’enfant ressent parfaitement lorsque sa mère est sombre, énervée, peu disponible. Or, elle lui assure que tout va bien : n’est-ce pas troublant ? Doit-il se fier à sa propre perception ? Doit-il se fier à la parole de l’adulte ? Plus l’enfant est jeune, moins il est assuré dans la construction de ses propres repères, et plus il privilégie la seconde option… au risque de perdre toute confiance en sa capacité à comprendre le monde qui l’entoure, puis, plus tard en la parole des adultes.

    Existe-t-il justement des études soulignant 
la prévalence, chez le bébé, de la communication 
non verbale et des émotions sur le langage verbal ?


    Il existe des études sur le « mamanais », cette forme de communication universelle que toute personne en position de prendre soin d’un bébé utilise spontanément. La voix devient chantante, le vocabulaire est simplifié, avec une hyperarticulation, une accentuation des voyelles, des formes interrogatives ou exclamatives, et une intense participation affective et mimogestuelle. C’est donc une forme de communication multimodale, dans laquelle le sens du discours occupe une place tout à fait secondaire. Les travaux de Colwyn Trevarthen, professeur de psychologie de l’enfant et de psychobiologie à l’université d’Édimbourg, montrent que les réactions du bébé, notamment mesurées par l’intensité de ses vocalises et de ses mouvements corporels, sont proportionnelles à la qualité et à l’intensité du mamanais utilisé par l’adulte. Si la voix de la mère est monotone, sans prosodie, et s’il n’y a pas de participation mimogestuelle, les « réponses » du bébé sont faibles ou inexistantes. Si, au contraire, la voix produit des pics prosodiques importants, et que l’adulte participe avec ses mimiques et son corps, alors le bébé entre dans le dialogue, par des vocalises et des mouvements corporels. Et même, au moment où la stimulation de l’adulte retombe, le bébé continue dans un premier temps à appeler la poursuite de ce dialogue en vocalisant, en accrochant son regard à celui de l’adulte, le corps toujours animé de mouvements.

    Quelle parole préconisez-vous pour l’enfant, 
sur le plan de la forme et du fond ?


    La forme doit évidemment être adaptée, car elle détermine la possibilité pour l’enfant d’accéder progressivement au sens du discours. L’information doit être donnée à l’aide de mots simples, de phrases courtes, affirmatives, et au présent, car il n’y a pas de notion de temporalité avant l’âge de 3 ans. Puis, il est souhaitable que l’adulte se place physiquement au niveau de l’enfant, car c’est moins impressionnant. Enfin, joindre le geste à la parole permet au tout-petit de mieux comprendre, de même qu’exagérer les mimi­ques lorsqu’il s’agit de nommer les émotions. Précisons qu’il vaut mieux que l’adulte ait pu se familiariser préalablement avec la situation dont il parle, de façon à ne pas être débordé par un trop-plein émotionnel qui pourrait angoisser l’enfant. Et n’oublions pas de rassurer l’enfant sur le fait qu’il n’est pas responsable de la situation difficile en question. Les tout-petits étant au centre des préoccupations de leurs proches, ils sont enclins à se penser à l’origine de toutes les émotions qui habitent leurs parents, leurs joies comme leurs peines.

    Noyer un enfant sous un flot de paroles ne peut-il pas constituer un risque ?


    Tout d’abord, il ne s’agit pas de « noyer » l’enfant de paroles, mais de se demander en quoi un événement le concerne, et quelle information lui est utile pour comprendre les changements qui affectent sa vie ou l’humeur de ses proches. Dès lors, il convient de lui parler avec un discours adapté, en évitant un excès de détails. Trop de paroles, trop de précisions incompré­hensibles, c’est en effet plus angoissant que rassurant pour un tout-petit. Nos enfants ne sont pas nos confidents. Nous ne leur parlons pas pour nous soulager ou nous déculpabiliser, mais pour les aider à se structurer et à se construire au monde. Il faut donc savoir raison garder : le silence est délétère, la profusion d’informations l’est aussi.

    À quoi voit-on qu’un jeune enfant qui ne parle pas encore vit mal une situation ? Quels sont les marqueurs de sa souffrance psychologique ?


    Un tout-petit exprime sa souffrance par un changement de comportement : il est moins joueur, plus replié sur lui-même, moins appétant sur le plan relationnel. Il peut se montrer très agité, comme pour attirer sur lui une attention qu’il ne perçoit plus comme suffisante. Des troubles du sommeil, de l’appétit, des difficultés de séparation peuvent aussi se manifester.

    Depuis quand les spécialistes préconisent-ils 
aux parents de parler à leurs jeunes enfants ?


    Parler aux enfants, et particulièrement aux tout-petits, est une préoccupation relativement récente. En premier lieu parce que, pendant des siècles, la forte mortalité infantile contrariait leur investissement : il fallait d’abord s’assurer qu’ils vivent ! Au XXe siècle, les pro­grès de la médecine aidant, cette inquiétude est peu à peu devenue moins prégnante. Pourtant, la notion de « sujets » avant l’âge de 3 ans a continué de faire débat, jusqu’à ce que le travail des psychanalystes de l’enfant ne permette plus de remettre ce principe en question. Françoise Dolto reste la psychanalyste qui a radicalement changé le regard sociétal porté sur l’enfant dans notre pays. L’idée du bébé considéré comme une personne s’est véritablement imposée dans les décennies 1970-1980, même si les habitudes de communication parents-enfants ont été plus longues à évoluer. Aujourd’hui, les parents qui se présentent en consultation ont en effet l’idée qu’il est important de parler aux plus jeunes, et même aux bébés, mais d’abord ils souhaitent en être bien sûrs et demandent pourquoi. Ensuite, ils ne savent pas forcément comment s’y prendre pour communiquer avec un enfant chez qui le langage est peu ou non développé.

    Compte tenu de l’évolution des mœurs, consacrer 
un livre à la manière de parler aux tout-petits aurait-il été envisageable il y a une cinquantaine d’années ?


    Il y a cinquante ans, l’organisation sociale et familiale reposait encore sur un modèle très patriarcal. Les enfants avaient peu droit à la parole dans les familles, et on ne les considérait pas en droit de savoir quoi que ce soit de la vie familiale, voire de la vie en général.

    De plus, beaucoup de sujets étaient « tabous » (voir encadré ci-contre), notamment tous ceux portant sur les questions de filiation. Le principe même de parler aux enfants restait à conquérir, et Françoise Dolto a énormément apporté de ce point de vue. Donc, un ouvrage de ce genre aurait paru totalement incongru. Probablement même n’aurait-il pas pu être imaginé car le principe de base n’en était pas acquis.

    Dans votre propre ouvrage, Comment te dire ? 
Savoir parler aux tout-petits, vous conseillez 
les parents dans leur manière de s’adresser à 
leur enfant, dans une pluralité de situations (Comment te dire que ton grand-père a un cancer, 
que ta maman est en prison…). Finalement, cela 
ne revient-il pas à orchestrer une attitude qui 
se voudrait naturelle et intuitive pour les parents, mais qui, dans les faits, ne l’est pas forcément ?


    C’est une très bonne question car c’est précisément ce que je voulais éviter en écrivant ce livre ! Il s’agit de donner à connaître des éléments essentiels sur le « pourquoi » et le « comment » communiquer avec les plus jeunes, mais en aucun cas de prescrire un discours dans son contenu. C’est ensuite à chacun de trouver sa propre « voix » ! Cependant, au-delà des principes utiles pour bien communiquer avec les tout-petits, je ne voulais pas éluder la question de la formulation. Pour chaque thématique abordée, je me suis donc pliée à l’exercice, en précisant bien que ce ne sont que mes mots, et qu’ils ne constituent pas un « prêt-à-dire » qui serait valable pour tous. Ils ont pour seule vertu de montrer qu’il est en effet possible de parler aux tout-petits de tout ce qui les concerne, y compris des sujets qui semblent les plus délicats.

    D’ailleurs, pourquoi certains adultes éprouvent-ils 
tant de difficultés à parler à leur jeune enfant ?


    La communication avec un tout-petit passe par divers canaux : les mots, le corps, et les mimiques qui tra­duisent les émotions. Notre désir de communiquer avec les enfants dépend beaucoup des habitudes d’échange que nous avons rencontrées dans notre propre famille durant notre enfance ou notre adolescence, de l’ex­périence que nous en avons. Mais notre capacité à le faire dépend aussi de la manière dont nous investissons chacun de ces canaux de communication. Considérons tout d’abord la parole. Certaines personnes parlent pour donner une information. D’autres parlent même lorsqu’elles n’ont rien à dire : c’est ce que l’on appelle la fonction « phatique » du langage, celle qui sert avant tout à aller à la rencontre de l’autre, à s’assurer que l’on est bien ensemble.

    Communiquer avec un jeune enfant suppose de pouvoir investir cette fonction du langage. Si on parle de tout et de rien, tous les jours, tout le temps, alors il devient plus simple de prendre la parole lorsqu’on a en effet quelque chose de notable à dire. En ce qui concerne la mimogestualité, particulièrement importante avec les bébés, certains adultes sont parfois inhibés dans ce domaine : ceux-là se sentiront alors plus à l’aise pour échanger avec un enfant plus âgé, qui s’exprime déjà verbalement. Communiquer avec les plus jeunes suppose de pouvoir retrouver en soi le tout petit enfant que nous avons été… Ce n’est pas évident pour tout le monde !

    Mais il est des sujets qui demeurent difficiles à aborder pour la plupart d’entre nous : ce sont principalement les questions ayant trait à l’essence même de l’existence, à savoir l’origine et la mort. Il faut d’abord être en mesure de penser et se formuler les choses pour soi-même avant de pouvoir les transmettre. •


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  • Sommeil et sécurité : Liens entre le développement de l’enfant et le rituel du coucher

    21 mai 2013. Nathalie Pages.

    MySommeil est allé à la rencontre de Nathalie Pages, docteur en pharmacie spécialisée dans l'accompagnement des parents pour les aider à gérer le sommeil de leurs enfants.

    Bonjour Nathalie Pages, vous êtes spécialisée dans l'accompagnement du sommeil de l'enfant, pouvez-vous nous parler des liens qui existent entre la sécurité et le sommeil des enfants ?

    Vous avez raison de commencer par cette question car il est essentiel de le préciser. Je vous propose de retrouver sur le site Larousse.fr trois définitions :

    - Sommeil  : « état physiologique périodique de l’organisme pendant lequel la vigilance est suspendue et la réactivité aux stimulations amoindrie. »Il en ressort que tout ce qui va permettre la baisse de la vigilance et de la réactivité de l’organisme, va favoriser le sommeil. 

    - Sécurité : « Situation, dans laquelle quelqu’un, quelque chose, n’est exposé à aucun risque, en particulier d’agression physique,  d’accident, de détérioration » Assurance, confiance, couverture, protection, refuge, sûreté, tranquillité…
    Il en découle que tout ce qui favorise l’absence de risque, la confiance, la protection, va aller dans le sens du sommeil.

    La troisième notion essentielle est liée au lâcher-prise. Retournons sur larousse.fr :

    - Lâcher-prise  : Abandonner ce que l’on tenait, cesser l’attaque, renoncer à une action / Relâcher, abandonner, renoncer, livrer, libérer…
    Il s’agit bien là de lâcher ce qui concerne l’éveil…

    Pour résumer : l’endormissement et le maintien du sommeil sont liés à la baisse de vigilance et de réactivité, permise par le lâcher-prise, possible en situation de sécurité physique et affective.

    En quoi est-ce important pour le sommeil de nos enfants ?

    Trois raisons de rester vigilants au sommeil de nos enfants.

    - Dès la naissance, la maturation du cerveau et le développement corporel sont totalement liés aux stades de sommeil. Les (nombreuses) étapes de maturation physique et psychique, largement décrites par tous les grands spécialistes du développement de l’enfant, s’accompagnent de ce que le Pr André Kahn appelait les  troubles "normaux" du sommeil. C’est le cas par exemple des bébés âgés de 7 à 9 mois, lors de l’apprentissage de la séparation, l’apprentissage du langage ou de la propreté, la phase d’Œdipe, l’adolescence et ses énormes bouleversements….

    - Tout au long de la vie, notre sommeil est acteur et gardien de nos forces et compétences physiques et psychiques. Des perturbations supplémentaires répétitives et chroniques peuvent avoir de réelles conséquences sur le développement et les comportements de l’enfant.

    - Notre cerveau, depuis la nuit des temps, veille sur nous..et sur notre sommeil.  Lorsque nous dormons, une partie de notre cerveau s’assure en continu de la sécurité de l’environnement. Assurer le sentiment de sécurité au bon moment favorise le lâcher-prise, et le sommeil.

    Les plus grands spécialistes de l’enfant s’accordent pour indiquer qu’il n’y a pas de développement sans sécurité. Favoriser cette sécurité physique et affective permet le lâcher-prise nécessaire à se laisser aller vers le sommeil, en toute tranquillité.

    Comment assurer le sentiment de sécurité de l'enfant ?

    Dans ma pratique, je me base sur le «  Holding and Handling » de Winicott ; ceci consiste au soutien de l’enfant, tant physiquement que psychiquement, au travers des soins, contacts, échanges, variables selon l’âge.
    2 sentiments existent :
    - Sécurité affective
    Confiance, environnement affectif ; peau à peau, bras, portage, lit parental ; rituels, doudous, tétine, regard, parole ;
    - Sécurité physique
    Contenant, enveloppement, repères, couchages, lumière, sons, musique, tissus…             
    Satiété, absence de douleur, confort corporel…

    Deux points restent essentiels cependant :

    Lien entre mère et enfant- Un paradoxe apparent est que, plus le bébé ou l'enfant en bas-âge est sécurisé, plus l’apprentissage de l’autonomie sera, ensuite, favorisé. C’est ce que les spécialistes appellent « Bien s’attacher pour mieux se détacher ». Lui répondre, à tout âge, est essentiel, par le toucher, le regard, la voix, que l'on va progressivement distancer, même si la raison de ses pleurs nous échappe ; s’il se sent entendu, il pourra apprendre peu à peu à se laisser aller au sommeil, dans la confiance de sa mère, de son père ou de la personne qui s'occupe de lui.

    - D’autre part, à tout âge,  le sentiment de sécurité de l’enfant et indissociable de la sphère des émotions familiales ; pas de panique, la vie est une succession de bons moments et de mauvaises passes, les variations sont donc inévitables, mais il est important de garder le cap d’une transition calme et apaisante vers le sommeil, et ceci d’autant plus que la journée a pu être compliquée… Comme pour nous, les adultes.

    Il s’agit donc de nous servir de l’observation, du bon sens, de la simplicité, pour assurer la sécurité physique et affective, totalement indissociable du lâcher-prise, du sommeil, du développement de l’enfant, quels que soient son âge et son stade de développement. C’est par exemple le rôle des rituels du coucher, des doudous, si importants dans ces apprentissages.
    L’anxiété, l’insécurité, stimulent la peur, la vigilance, et s’opposent au sommeil. Il est donc capital de veiller à préserver le sentiment de sécurité physique et affective du bébé et de l’enfant, tout comme chacun de nous veille à préserver son cocon sommeil…..

    Quelles sont les erreurs à éviter ?

     

    Tout ce qui peut perturber le sommeil des bébés ou des enfants, et le vôtre !
    On peut en effet facilement arriver à un conditionnement : l’endormissement ou le maintien du sommeil sont conditionnés à …. Biberon, présence de papa ou maman, main dans la main, tout ou partie de la nuit dans le lit parental, etc….  
    Ceci représenterait environ 80% des troubles du sommeil dans la tranche d’âge des enfants de 3 mois à 3 ans.

    Jacky Israël (« Comment dorment les bébés ») en a clairement décrit le processus :
    Un comportement ponctuel et parfaitement adapté peut devenir par la suite systématique, et surtout inadapté puis carrément addictif et régressif. Par ex : un endormissement systématique dans les bras ou en tétant parfaitement normal à 2 mois devient inadapté quelques mois après, puis régressif ! Il est nécessaire néanmoins de garder en mémoire que cela dépend aussi étroitement des limites d'acceptation parentales.
    Il y a donc nécessité d’une transition. On peut par exemple débuter vers 4 mois (chez un bébé à terme et sécurisé) un apprentissage à l’endormissement autonome, en espaçant progressivement le sommeil de la tétée, puis de tout ce qui concerne l’éveil, et en commençant à le coucher éveillé.

     

    Quelles sont les erreurs les plus courantes ?

     

    - Considérer  le bébé comme un petit homme : c’est un petit d’homme, qui a une énorme route à construire, au travers de ses éveils, de son sommeil, de la confiance et de la sécurisation ;
    - Réveiller systématiquement un tout petit, pour le bain, le changer, la visite de la famille… laissons-le dormir en paix ! (Une exception cependant, la nécessité de le réveiller pour le nourrir sur avis médical) ;
    - Oublier les rituels, ou au contraire trop les prolonger : ils sont essentiels. Une présence parentale avant l’endormissement est nécessaire, rassurante et favorise la transition vers le sommeil.
    Mais excessive ou persistant pendant le sommeil, cette présence parentale peut devenir contre-productive ;
    - A éviter également l’anxiété de résultat (« il faut qu’il dorme », car pas plus que nous il ne peut dormir sur commande !), l’énervement, le stress parental lié au sommeil de l’enfant, ou à  la journée qui s’achève….;
    - Les écrans peuvent l’occuper un moment, mais vont stimuler sa vigilance et peut-être ses peurs ;
    - le biberon est un repas, pas un rituel de sommeil ;
    - le bain est plutôt stimulant en général ;
    - le lit est un lieu de sommeil, pas un terrain de jeu ni un espace de punition.
    Et puis, rien ne remplacera un câlin, une chanson, un moment personnel, court, précieux, qui sera là pour préparer la séparation de la nuit et du sommeil.

    Pour conclure, je dirai que l’observation nous indique si nous faisons bonne route : le comportement de l’enfant de nuit comme de jour, la qualité de notre propre sommeil. 
    La dernière erreur serait de rester seul face à un problème de sommeil, là où « on n’en peut plus ». Nous sommes des humains, avec nos stress et nos angoisses, pas des super-héros de l’éducation et de l’apprentissage. Il est indispensable de savoir demander de l’aide, car la qualité du sommeil de l’enfant impacte sa qualité de vie et donc celle de toute la famille. Et nous avons tout à y gagner.

     


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  • un article assez complet pour comprendre le lien en le développement de la personnalité et l'attachement, les notions d'individuation et séparation entre autre (les films n'y figurent pas dommage ...)

     


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  • Pierre Moisset – Petit 1 Lille – 13 octobre 2010

    Education partagée ou coéducation

    Le thème de cette rencontre petit 1 est « tous acteurs ». C'est pourquoi je me propose de vous parler aujourd'hui de coéducation, ou plutôt de débattre autour de la question de la coéducation appliquée à l'accueil des jeunes enfants. Avec la coéducation, parents et professionnels sont sensés être acteurs – chacun depuis leur place propre – dans l'éducation d'un enfant qui, du fait de son accueil, connaît plusieurs scènes éducatives et se trouve donc – théoriquement – en situation de coéducation.           
    La coéducation est un terme, une notion en vogue aujourd'hui tant dans l'accueil de la petite enfance que dans d'autres politiques publiques comme la protection de l'enfance ainsi que dans des réflexions plus générales sur la parentalité et certaines fragilités parentales. Ce terme et cette attention refléterait notamment l'accent nouveau mis sur la nécessaire richesse relationnelle dans l'éducation des enfants. Comme le note Marine Boisson[1] « La fille-mère, stigmatisée hier du fait de son écart par rapport à la norme familiale traditionnelle (la famille conjugale), se retrouve, en tant que “parent isolé”, de nouveau à distance de la norme familiale, nouvellement conçue comme une “co-éducation” avec la mise à disposition de l’enfant de soutiens multiples (maintien des liens avec l’autre parent et avec la famille élargie, établissement avec un nouveau conjoint, négociation d’une co-éducation avec des professionnels, etc.) ». Ainsi, d'après le même auteur « La valorisation des “nouvelles parentalités” semble traduire un impératif social d’abondance relative des ressources relationnelles, la pauvreté relationnelle apparaissant désormais comme un des principaux écarts par rapport à la norme éducative dominante. » (Ibid)

    Parallèlement à cette sensibilité aux ressources relationnelles nécessaires à l'éducation d'un enfant, l'importance du thème de la coéducation renvoie à la volonté de placer les parents et citoyens – usagers de service de la petite enfance ou d'autres services publics – dans une position active, participative, correspondant à une évolution de la démocratisation des relations. Il s'agit de faire avec les parents, de coéduquer avec eux afin de ne pas les laisser dans une position passive ou extérieure à la structure d'accueil. De fait, la notion de coéducation porte avec elle l'idée d'une participation égale, ou du moins sans relation de hiérarchie, des parents et des professionnels à l'éducation d'un enfant et ce depuis des places différenciées « En matière éducative, chaque adulte doit connaître sa place et la conserver. D’où l’impérieuse nécessité de définir les rôles des uns et des autres. Jusqu’où partage-t-on l’éducation de l’enfant ? Sur quoi porte le partage ? Il est important que chacun comprenne sa spécificité et celle de l’autre. Autant de questions qui s’inscrivent dans la démarche de co-éducation. »[2]

    Ces notions de partage de l'éducation, d'élaboration de places différenciées permettent d'échapper apparemment à tout ce que la thématique du soutien à la parentalité charrie : des parents en difficultés, ou démissionnaires qui auraient besoin d'être accompagnés, soutenus. On passe d'une charge et d'une responsabilité supplémentaire pour les professionnels de la petite enfance (soutenir les parents, savoir lire leurs besoins et demandes), à une perspective plutôt positive : coéduquer avec eux. La notion de coéducation supposant une place et des compétences parentales que le soutien ou l'accompagnement à la parentalité suppose moins consistantes, plus soumises à des difficultés.

    Pour autant, une fois que l'on a remarqué cette nécessité pour la coéducation que chacun identifie clairement sa place par rapport à l'enfant, les problèmes commencent. En effet, une phrase fétiche ressort lorsque l'on évoque la coéducation « Il faut tout un village pour élever un enfant ». Si elle souligne la nécessité d'une communauté éducative et l'importance des ressources relationnelles, cette phrase fait justement référence – en terme d'image – à une communauté villageoise que l'on peut supposer relativement indifférenciée, une communauté d'adultes face à une communauté d'enfants. Or, il n'en est pas de même dans nos sociétés différenciées et individualistes, et il en est encore moins de même dans l'accueil de la petite enfance où se retrouvent face à face des parents et des professionnels, des personnes donc qui sont loin de constituer de manière évidente un « village ». Comment se définit la place des parents et des professionnels autour de l'accueil d'un jeune enfant dans la perspective d'une coéducation? Jusqu'où va le rôle des uns et des autres? En quoi est-il possible de s'articuler autour de cet accueil du jeune enfant? Il me semble que, pour répondre correctement à ces questions pour ce qui concerne le champ particulier de l'accueil de la petite enfance il faut justement prendre en compte le cadre particulier que constitue l'accueil d'un jeune enfant. Plus précisément, il faut prendre en compte que l'enjeu de la coéducation va alors se poser entre des parents qui recourent à un service d'accueil de leur jeune enfant et des professionnels de l'accueil des jeunes enfants. On verra que derrière leur apparente évidence, ces expressions renferment nombre d'enjeux.

    En effet, une des principales lacunes à mes yeux, dans la perspective qu'a ouvert la notion de travail avec les demandes des parents, et en écho celle de coéducation vient du fait qu'elle ne précise pas en fonction de quels critères, au nom de quelle spécificité, les professionnels de l'accueil de la petite enfance peuvent s'articuler avec les demandes des parents? En fonction de quels critères peuvent-ils coéduquer. En l'absence de tels critères, on peut avoir l'impression que les professionnels, s'ils ne veulent pas rester dans leur ancienne position d'experts et de « professionnels » ne peuvent que suivre les demandes des parents. Qu'ils n'ont rien à leur opposer, en tout cas rien de légitime. D'où, selon moi, un malaise et le possible retrait de certains professionnels sur l'intérêt et les besoins de l'enfant utilisés comme critère ultime de positionnement professionnel. D'où également l'affirmation de deux figures repoussoirs des parents liées à cette mise en avant de leurs demandes : le parent consommateur (celui qui veut et demande en perdant de vue le fait que l'accueil de son enfant n'est pas tout à fait un produit) et le parent démissionnaire (celui qui ne demande rien ou bien si peu qu'on a l'impression qu'il se moque et de son enfant et de son accueil)

    Aussi, je vous propose dans cette communication d'explorer non pas des modalités concrètes de coéducation dans le domaine de l'accueil de la petite enfance mais plutôt – à travers différents exemples – les conditions nécessaires à cette coéducation.  
    Une dernière remarque avant de rentrer dans le vif du sujet, au niveau des textes encadrant l'accueil de la petite enfance – que ce soit les décrets ou les livrets d'accompagnement au projet éducatif et au projet social des structures -on ne trouve pas le terme de coéducation, mais plutôt celui de places, de participation et d'accueil des familles, d'implication des parents. Pourquoi alors parler de coéducation alors que les professionnels de la petite enfance ont déjà bien assez à faire avec le décret du 7 juin 2010 remettant en question la qualité de leurs missions et leur professionnalité? Comme je vous l'indiquais plus haut, il me semble intéressant de parler de coéducation déjà parce que cette notion traduit aussi toute une sensibilité sociale à l'ouverture des institutions d'éducation envers les parents (évolution qu'il s'agit d'encourager), mais également parce qu'elle permet de s'interroger sur ce qui constitue la consistance propre des espaces d'accueils, sur ce qui constitue votre professionnalité. Aussi, ce thème de débat me semble aussi utile dans une perspective de résistance et de proposition à l'encontre d'une politique petite enfance revue à l'aune d'une perspective gestionnaire. Elle permet justement de faire voir, de souligner tout ce que la mise à mal des taux d'encadrement, les débordements de taux d'occupation remettent en question à rebours d'une évolution profondément démocratique.

    Coéduquer dans le cadre de l'accueil de la petite enfance

    Coéduquer contre les parents

    On pourrait déduire de l'idée de coéducation qu'il faut pour les professionnels être toujours en accord voire en harmonie avec les parents. Qu'il faudrait pouvoir se mettre d'accord le plus rapidement possible.   
    Aussi, la coéducation est-elle compatible avec le fait que les professionnels refusent certaines demandes des parents? Voyons cela avec le témoignage d'une assistante maternelle – Isabelle Fabre.[3] Cette assistante accueille une petite fille qui a de sérieux problèmes d'alimentation. L'accueil se passe bien hormis le fait que la fillette n'a pas grand appétit ce qui finit par devenir de plus en plus présents dans les demandes de la mère :

    Au sujet des repas, la maman a choisi de les préparer, elle connaît ses goûts, ses habitudes. Que ce soit chez ses parents ou chez moi, Alix a un petit appétit, elle  ne réclame jamais ses repas. Elle n’est pas enthousiaste devant son assiette, et n’est pas curieuse et envieuse de l’assiette des autres enfants. La maman est soucieuse des repères alimentaires, afin de se rassurer, elle me questionne sur les quantités de nourriture prises par son enfant. Les questions fusent, Alix a t’elle mangé des légumes, de la viande, des laitages ? Cela devient une véritable obsession pour la maman.

    Au fil des mois, la situation empire, les demandes et les inquiétudes de la mère deviennent de plus en plus présentes :

    Les jours passent et après plusieurs mois, je vis très mal le questionnement quotidien de la maman. Je me surprends même à envisager de répondre positivement à ses questions. Mais cela ne reflèterait pas la réalité. Plus les repas sont « négatifs », plus la maman est inquiète. Les conflits journaliers autour de la prise de nourriture me pèsent de plus en plus, et je ne peux plus gérer les angoisses d’Alix.

    On voit que cette assistante maternelle se sent envahie dans son accueil et dans sa relation à cette petite fille par les demandes de la mère, aussi elle demande conseil autour d'elle pour trouver la bonne attitude (PMI, psychologue, collègues)

    Suite aux innombrables questions que je me pose depuis des semaines, je me fixe la règle à suivre. Le fait de renseigner la maman sur la nourriture engendre un malaise constant et je décide de concentrer l’information journalière, information donnée à la maman en soirée, sur les différents éléments de la journée en faisant abstraction de tout ce qui à un lien avec la nourriture.

    Cependant, j’ai l’obligation d'informer au préalable la maman d’Alix de cette décision.  Je me suis préparée à cet entretien, pour le bien d’Alix, il est indispensable de le faire.

    A la surprise de cette assistante, la mère accepte bien cette décision. Elles conviennent ensemble d'une attitude commune autour des repas et il s'ensuit des effets plutôt positifs :

    Les jours suivant notre conversation, je n’ai pas remarqué de changement relationnel entre nous. Bien au contraire, j’ai trouvé une maman soulagée de ne plus gérer seule le problème alimentaire de sa fille et de pouvoir enfin se détacher d’une inquiétude obsessionnelle. Au fil du temps, nos relations et nos partages se sont concentrés sur d’autres points forts de la journée. Il n’y a plus eu de focalisation sur un point en particulier.

    Ce changement d’habitude a permis à Alix de vivre autrement ses repas, qu’on lui fasse confiance sur ses besoins alimentaires, de "sortir" des angoisses parentales. En effet, l’enjeu affectif entre la maman et sa petite fille était trop fort.

    On voit bien dans ce dernier extrait, que face à cette question de l'obsession de la mère au sujet de l'alimentation de la jeune fille, il s'agissait pour cette assistante maternelle de « protéger » son espace d'accueil. D'éviter que l'angoisse de la fillette face aux repas se « transmette » également chez elle et qu'elle finisse par reconduire « l'enjeu affectif » existant entre cette mère et cette fillette. Et c'est au nom de la protection de cet espace d'accueil qu'elle a interpelé la mère, parce qu'elle voulait éviter que sa propre relation à l'enfant devienne une « annexe » de la relation de cette mère à cette fillette, qu'elle en reproduise les tensions. Cette assistante ne s'est donc pas prévalue de sa professionnalité, ou d'une expertise sur les problèmes d'alimentation de l'enfant, elle a invoqué le fait que – dans le cadre de la circulation de cette enfant entre deux espaces de vie – elle souhaitait que son espace soit préservée d'une tension particulière.

    A-t-on à faire à un exemple de co-éducation? Non, si on considère que l'assistante maternelle et la mère s'oppose à un moment sur la question des repas de la fillette et le fait que l'assistante décide – après en avoir informé la mère – d'arrêter de lui parler des repas. L'idée de « co »éducation est mise à mal par cette séparation, cette opposition à un moment. Par contre, le dénouement de l'histoire le fait que la mère accepte le comportement de l'assistante maternelle et que cela aboutisse à un mieux être de la fillette chez son assistante maternelle, renoue avec l'idée de coéducation puisque et l'assistante et la mère convienne que cette décision a été finalement bénéfique. 
    Cet exemple sensibilise à deux éléments très importants à garder à l'esprit concernant la coéducation :  celle-ci ne signifie pas un accord, ou une mise en accord constante entre parents et professionnels. Elle peut et probablement elle générera des divergences, puisque cette coéducation suppose qu'existe plusieurs scènes éducatives sur lesquelles l'enfant a des comportements différents, sur lesquelles il joue des choses différentes. Mais, point important, il me semble que ces divergences, du côté des professionnels, ne pourront plus se justifier par un savoir professionnel que les parents ne seraient pas sensés avoir, mais par la nécessité de préserver ce qui se joue sur leur scène éducative, on y reviendra avec notre troisième exemple.

    Coéduquer sans les parents

    Autre question redoutable que pose aux professionnels la notion de coéducation : comment coéduquer avec des parents qui ne disposent pas des pratiques, savoir faire et savoir être pour se sentir parents? C'est-à-dire des parents qui instaurent, de par leur situation, une asymétrie du rapport parents-professionnels. Une asymétrie qui ne semble pas permettre un travail avec ces parents une coéducation, mais plutôt un travail « sur » au nom du savoir que les professionnels ont et que ces parents demandent. Une responsable de halte-garderie[4] aborde cette question avec le cas d'une jeune mère ne disposant pas des connaissances culinaires de base pour faire des repas suffisants pour sa fille. 

    Lilou a douze mois quand elle arrive à la crèche, c'est une petite fille menue de petit gabarit, sa maman est jeune (21 ans) elle vit seule avec elle, c'est un premier enfant. Lilou vient trois après midi par semaine.

    Dès son arrivée sa maman nous explique qu'elle nous a mis un biberon de lait qu'elle risque de réclamer très vite car elle n'a rien mangé à midi. En effet très vite Lilou hurle et nous comprenons qu'elle a faim.

    A travers le décalage entre le discours de cette mère disant que sa fille n'a rien mangé avec elle et l'appétit de la fillette dans la structure, la responsable découvre bientôt que cette jeune mère ne sait pas quels repas préparer à son enfant :

    Au prochain accueil de Lilou je demande à sa maman si elle a du temps à m'accorder pour que nous discutions des repas de sa fille. La maman de Lilou saisie vite mon offre puisque nous discutons immédiatement et à travers son discours je découvre que cette maman est « perdue » qu'elle n'a pas de modèle auquel se référer pour élever sa petite fille et qu'elle ne sait pas vraiment comment faire. Je ne veux pas lui donner des conseils je ne veux pas être celle qui sait face à celle qui ne sait pas par conséquent je lui donne des revues que nous « collectionnons » à la crèche sur la diversification alimentaire et les besoins des enfants mais aussi un document ou il y a des menus types. Elle est ravie et nous en restons là.

    Cette jeune mère demande donc des conseils que l'équipe lui donne sous différentes formes.  Premièrement, via des supports (revues et menus types) qui évitent l'instauration d'une relation asymétrique professionnel-parent. Mais aussi, à l'inverse, en personnalisant le conseil pour qu'il ne semble pas émaner que d'une professionnelle.

    Quand elle revient à 16h30 elle me demande si je connais la semoule fine car on en parle dans les menus pour le repas du soir ; je lui explique, je lui dit aussi comment je l'agrémentais pour mes enfants.

    Aussi, même si, du fait de la situation de cette jeune mère, la responsable se retrouve obligée de travailler « sur » elle, sur sa demande, elle le fait en évitant de se confondre avec une position purement professionnelle. Ce afin de rester aussi « avec » cette jeune mère, au nom d'une commune confrontation à la maternité.    
    Dans ce deuxième exemple, la coéducation parait impossible du fait qu'il manque un des partenaires (le parent). De fait, sur la question de la nourriture (qui ne résume pas toute la question de l'éducation) la mère est en position d'élève face aux professionnels. Par contre, il me semble que la façon de faire de l'équipe permet une possible coéducation parce que même si elle transmet des contenus à la mère, elle le fait de telle façon à ce qu'elle ne sente pas élève face à des professionnels, donc comme quelqu'un qui saura toujours un petit peu moins bien qu'eux. Mais comme un partenaire que l'on réintroduit dans la ronde ou dans la danse par une manière de dire et de faire qui là encore ne se présente pas comme principalement professionnelle mais animée par un souci commun de l'enfant.

     

    Coéduquer avec et malgré les parents

    Comment mettre en place une coéducation avec des parents qui ne veulent pas travailler avec les professionnels? En effet, des parents peuvent recourir à un accueil de leur enfant sans vouloir se coordonner ni se mettre spécialement d'accord avec les professionnels. Comment alors permettre une coéducation? Et surtout au nom de quoi interpeller les parents pour qu'ils se « mettent en réseau » avec les professionnels. Nous retrouvons la halte-garderie de notre exemple précédent. La responsable nous livre là un exemple[5] où elle estime avoir travaillé à tort sans une mère. J'interprète cet épisode autrement. Faisons en d'abord le récit :

    Il s'agit du cas d'un petit garçon de deux ans et demi qui a une grande soeur et dont la mère est enceinte d'un troisième enfant.

    Paul vient 2 fois par semaine dans la structure c'est  un enfant réservé (il parle peu, sourit timidement, joue souvent seul), il aime les jeux calmes (encastrement, dessin, livres, peinture...), à la maison il n'a pas accès à la télévision, il est habillé de façon classique....

    Si je pose ce contexte de vie c'est pour dire que cette famille a choisi son mode éducatif et elle en parle très bien. La maman de Paul est peu causante quand elle vient elle nous dit bonjour mais prend par contre le temps de dire au revoir à son fils de façon posée et sereine. Quand elle revient le chercher elle ne pose aucune question elle semble se contenter de récupérer son fils et s'adresse d'ailleurs à lui plutôt qu'à nous.

    L'équipe constate au fil des mois que Paul devient de plus en plus renfermé et moins serein dans son rapport à la halte-garderie :

    L'équipe se dit que la grossesse de sa mère doit le « perturber » et c'est normal « peuchère »il va changer de rang dans la famille; la place du milieu c'est la moins facile etc ....alors l'équipe essaie de « compatir » avec l'enfant.

    J'essaie d'en parler avec la maman qui ne semble pas avoir envie d'aborder la question alors pendant des semaines je lui parle de tout autre chose, d'elle de sa grossesse de la grande qui est à l'école de mes propres enfants j'essaie d'entrer en relation et de créer le lien qui va me permettre ensuite de lui parler de Paul.

    Au bout de ces différentes approches, cette responsable parvient enfin à parler avec cette mère du comportement de son fils :

    Quand je sens que le dialogue est établi j'en profite pour lui dire que je trouve que Paul à changé de comportement à la crèche et que je pense que c'est peut-être lié à sa grossesse. Elle me répond : « oui mais c'est comme ça il faut qu'il  fasse avec et tout ira bien parce-que je l'aime »

    Ce jour là je me suis pris « une gifle » et d'un coup j'ai vu la situation autrement, d'un coup cette maman en m'offrant sa vision de la situation m'a permis de comprendre que nous faisions fausse route avec cet enfant, qu'évidemment l'arrivée d'un bébé pouvait se voir sous un autre angle tout dépendait de comment on voulait regarder ! J'ai transmis à l'équipe cette phrase et ensemble nous avons discuté de notre vision des choses pour nous rendre compte qu'il fallait regarder autrement et que si nous arrivions à le faire, nous serions aidantes pour l'enfant et non compatissantes !

    Pour cette professionnelle, la mère, en livrant sa vision, a dédramatisé la situation. Elle a montré qu'elle prenait acte et qu'elle comprenait le changement de son fils mais qu'elle était prête à y faire face, à l'accompagner parce que : elle l'aime. Aussi, cette responsable en tire une rude leçon :

    Nous avons décidé donc de changer de tactique d'être positives avec cet enfant de le bousculer un peu , de jouer avec lui de rire de parler du petit frère qui allait arriver  et Paul s'est ouvert petit à petit et s'est remis à jouer. Si cette maman et moi n'avions pas mis en commun notre pensée sur son enfant , l'équipe de la crèche aurait continué à faire fausse route et n'aurait pas joué son rôle de professionnelle pour cet enfant.

    Alors si les parents eux n'ont pas besoin de nous nous nous avons besoin d'eux et nous ne pouvons pas faire l'impasse de se dialogue avec eux au nom du bien être de leur enfant, c'est notre devoir me semble t-il !

    Mais on peut aussi reprendre cet exemple dans un autre sens. C'est-à-dire pour signaler que la coéducation demande aussi un effort aux parents, une participation de leur part. En effet, cette mère a tendance à travailler sans les professionnels., à se maintenir seule en position d'éducatrice bien que son fils aille en halte-garderie. Or le mal-être de son enfant s'exprimait dans l'établissement, et à ce titre il concernait les professionnels et les impliquait. Même si cette mère souhaite faire sans les professionnels et est parfaitement au clair dans son rapport à son enfant, son absence de communication a mis à mal l'équipe en ce sens où elle ne lui a pas permis de recueillir rapidement sa vision et son rapport à son enfant. Aussi, alors que la responsable n'a pu recueillir la vision de cette mère qu'à l'issue de tout un travail relationnel et d'établissement de confiance, elle aurait aussi pu faire remarquer à cette mère qu'elle ne peut se passer d'une coordination minimale avec les professionnels parce qu'elle est impliquée avec eux  dans une même coéducation. Il nous semble que les professionnels peuvent interpeller les parents qui ne souhaitent pas travailler avec eux au nom de cette commune implication dans une coéducation de leur enfant[6]. Et cette interpellation, encore une fois, ne se fait pas essentiellement depuis une position de professionnel mais depuis la position de personnes qui prennent soin et ont aussi à charge l'enfant et doivent donc se coordonner avec les parents.

    L'espace de délégation, un espace co-construit

    A travers ces trois exemples, nous avons décidé d'explorer la coéducation par ses marges, là où elle est problématique, remise en question. Qu'est ce que cela nous permet d'observer? Par rapport à cette image du village et cette idée d'un réseau de figures d'éducation autour des enfants, il me semble que ces exemples soulignent le fait que la définition des rôles ne se fait pas tant par un partage entre parents et professionnels, mais par la mise en réseau des différentes scènes éducatives autour d'un enfant. Bien sûr parents et professionnels n'ont pas la même place autour de l'enfant. Mais leur mise en accord, ou en tout cas leur travail ensemble passe beaucoup par le fait que chacun puisse d'une part affirmer la consistance, la nécessité de préserver sa propre scène, et puisse faire référence aux autres scènes éducatives, puisse les prendre en compte. Et cela ne se fait pas principalement depuis des positions statutaires : parents, professionnels.... Mais depuis une place dans un réseau, une place spécialisée en fonction du statut (parent, professionnel) mais d'abord une place. Ainsi, dans le premier exemple, l'assistante maternelle parle moins en tant que professionnelle qu'en tant que « carer », soignante d'un enfant qu'elle veut préserver sur sa scène d'un enjeu avec sa mère. Dans le deuxième exemple, les professionnelles aident la mère en tant que personnes également concernées par son enfant, expérimentées auprès des enfants et enfin, dans le dernier exemple, les professionnels auraient pu interpellé cette mère en tant qu'elle est mère d'un enfant accueilli.

    En effet, il me semble que la coéducation nécessite un double décalage pour devenir plus qu'un voeu pieu. Elle demande que les professionnels ne soit pas que des professionnels mais des « professionnels de l'accueil des jeunes enfants », dont la maîtrise et la responsabilité s'exerce dans ce contexte spécifique d'un accueil. Et elle demande que les parents ne soient pas que des parents, mais des parents d'enfants accueillis, qui doivent donc à ce titre se coordonner et faire avec l'équipe ou les professionnels qui accueillent leur enfant et non pas camper sur leur position singulière de parent particulier. Ce qui nous amène à la notion d'espace de circulation de l'enfant. Cet espace est justement ce qui est rendu possible par ce double décalage, il est constitué par la circulation de l'enfant entre plusieurs scènes éducatives qui, au-delà de leurs différences de positions et de statuts, se réfèrent les unes aux autres parce qu'elles sont concernées par un même enfant. Autrement dit, ce n'est pas parce qu'il y a accueil de l'enfant qu'il y a espace de circulation à mon sens ou coéducation. Cet espace s'instaure quand ces différentes scènes se réfèrent les unes aux autres. Ce que le curriculum écossais de la petite enfance désigne très bien en indiquant « L'expertise et l'expérience tant des parents que des éducateurs de la prime enfance ont plus de valeur quand elles sont partagées. »

     

    Pour conclure, en quoi ce détour par la coéducation et l'espace de circulation de l'enfant permet d'interroger la politique actuelle de la petite enfance. Parce que, même si la coéducation demande à ce que les professionnels se décalent de leur position initiale, elle nécessite aussi qu'ils soient professionnels, qu'ils puissent être professionnels, de même qu'elle demande à ce que les parents soient des parents d'enfants « circulants » et qu'ils aient donc le temps de se coordonner avec les accueillants de leur enfant. Aussi, l'idée de coéducation demande que l'on reconnaisse la spécificité des pratiques, des regards et des liens que les professionnels de l'accueil nouent aux jeunes enfants. Elle demande donc à ce qu'ils soient reconnus comme des professionnels de l'accueil, des professionnels que l'on ne peut donc pas surchargés sans réfléchir, que l'on ne peut pas faire exercer dans n'importe quel cadre, qui ont une certaine formation. La coéducation demande aussi à ce que les parents ne soient plus placés en position de responsables tout puissant de leurs enfants, mais comme des parents d'enfants « circulants » encore une fois, qui doivent avoir le temps, les moyens (supports de communication, lieux spécifiques au sein des lieux d'accueil), ce qui suppose – pour élargir le débat – des conditions de travail moins tendues, des horaires moins décalées, moins irrégulières, une réflexion élargie sur les temps de vie....

     



    [1]               Boisson Marine, 2008, Petit lexique contemporain de la parentalité. Réflexions sur les termes relatifs à la famille et leurs usages sociaux, Informations sociales n°149, pp.8-15

    [2]              Cécile Ensellem « La responsabilité parentale : une question politique ? », in Que veut dire être parent aujourd'hui ?, érès, 2008, p. 139-150.

    [3]              Témoignage issu de son article « A propos de la coéducation : un exemple chez une assistante maternelle. », Pour un accueil de qualité de la petite enfance : quel curriculum?,. Sylvie Rayna, Catherine Bouve, Pierre Moisset (dir), Editions Erès, Toulouse, 2009.

    [4]              Lucile Rouillé dans son article « Travailler avec sur et sans les parents », , Pour un accueil de qualité de la petite enfance : quel curriculum?,. Sylvie Rayna, Catherine Bouve, Pierre Moisset (dir), Editions Erès, Toulouse, 2009.

    [5]              Dans le même article que celui cité précédemment.

    [6]              Interpellation au nom d'un espace de délégation partagée qui n'a rien à voir à nos yeux avec l'interpellation des parents au nom du bien-être de l'enfant ou des besoins de l'enfant dont les professionnels se placeraient en interprètes légitimes et privilégiés.


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  • Des pulsions du jeune enfant aux pratiques quotidiennes en crèche : l’implication éducative de l’adulte, parents et professionnels 

                Marie-Paule Thollon-Behar, Psychologue, docteure en psychologie du développement        

    La petite enfance est le moment où l’enfant commence à passer du principe de plaisir au principe de réalité, ce qui va lui permettre de se socialiser, c'est-à-dire de faire partie d’un groupe en en respectant les règles. Ce processus de socialisation peut se mettre en œuvre grâce à l’éducation qui est apportée. Or, nous allons voir qu’il est difficile d’éduquer aujourd’hui pour différentes raisons. L’une d’entre elle est que nous vivons dans une société de consommation qui privilégie la satisfaction immédiate des désirs, c'est-à-dire le principe de plaisir : « faites vous plaisir tout de suite, vous paierez plus tard ».

    Je m’appuie dans cette présentation sur la psychologie du développement, qui est centrée sur ce qui est observable, c'est-à-dire ce qui est visible. Je pars également de ma pratique de psychologue, exerçant auprès de professionnels de la petite enfance et de l’enfance.

    La question articulant les pulsions et les pratiques quotidiennes en crèche, interroge la relation entre les parents et les professionnels autour de l’éducation. En effet, les parents sont maintenant et à juste titre, pris en compte par les professionnels, ce qui n’a pas toujours été le cas. Il faut donc travailler à une complémentarité entre parents et professionnels dans les places et les rôles de chacun, pour aider chaque enfant accueilli à grandir.

    J’ai choisi un fil rouge dans cette présentation en évoquant trois petites histoires tirées de séances d’analyse de la pratique :

    - La maman de Célia, 1 an tout juste, annonce un matin que Célia n’a plus de sucette. La sieste se passe très mal, Célia ne parvient pas à s’endormir, elle est grognon dans la journée… les jours passent et le comportement de Célia ne s’améliore pas.

    - La maman de Nina, 2 ans et demi,  ne supporte pas qu’elle se salisse, elle demande à ce que Nina ne joue pas dans le sable. La directrice, un jour, un peu contrariée,  lui demande : vous préférez qu’elle soit propre et qu’elle s’ennuie, ou qu’elle se salisse et qu’elle s’amuse ? La maman de Nina répond : «  qu’elle soit propre et qu’elle s’ennuie ».

    - Sofian, un petit garçon de 3ans adore se déguiser avec une robe à fleurs et à volants et des chaussures à talon orange. Le papa de Sofian ne supporte pas de retrouver son fils déguisé ainsi. Il demande aux professionnels d’interdire à son fils de mettre ces vêtements là.

    Que se passe t-il du point de vue de l’enfant ? 

             L’enfant doit apprendre à contenir ses pulsions pour se socialiser. Cette contenance va passer par la compréhension des limites. Pour cela, il doit faire le lien entre l’action qu’il effectue et l’effet que cela produit sur l’adulte. Il s’agit d’une compétence socio-cognitive, la causalité interpersonnelle qui se manifeste vers l’âge de 8- 9 mois.

             Pour que ce lien s’établisse, l’adulte doit réagir d’une façon cohérente, toujours plus ou moins de la même façon, sinon le lien ne pourra s’effectuer. De la même façon, il faudrait que tous les adultes réagissent entre eux, de la même façon, vis-à-vis de ce qu’il fait.

             Petit à petit, l’enfant va intérioriser progressivement ces limites, et vers l’âge de 6 ans, cette intériorisation permettra la construction des valeurs : le bien, le mal, la justice, l’amitié, le mensonge etc.

    Auparavant il doit accepter des limites et vivre des frustrations. Il peut exister un paradoxe entre le respect du rythme de chaque enfant qui est préconisé dans la petite enfance et les contraintes de la vie en collectivité, sources de frustration. Ne sommes nous pas à certains moments dans une idéalisation de la vie que peut avoir un enfant en collectivité, idéal impossible à atteindre et donc qui va générer un sentiment de culpabilité chez les professionnels ?

    Fil rouge : la sucette de Célia renvoie au stade oral, les jeux avec le sable, le fait de se salir au stade anal et le déguisement de fille de Sofian rappelle la différenciation des sexes du stade phallique.

     Que se passe t-il du point de vue des parents ?

    Il existe un certain nombre d’obstacles à la contenance éducative:

    -          La culpabilité  de le laisser « en garde » pendant toute la journée, de ne pas passer suffisamment de temps avec lui. On dit souvent aux parents que la qualité de la relation avec l’enfant est plus importante que la quantité de temps qu’ils vont passer avec lui. Or, quand ils récupèrent leur enfant, tout ne se passe pas toujours bien, la qualité n’est pas forcément au rendez-vous. Ils n’ont pas envie de faire le gendarme. Ils risquent de « lâcher » sur le plan éducatif en pensant ainsi conserver une bonne relation avec l’enfant. 

    -          La toute-puissance perçue de l’enfant et de l’enfant qu’ils ont en eux. Ils ne se sentent pas capable d’exercer leur autorité sur un enfant qu’ils pensent ne pas parvenir à faire obéir.

    -          Le doute sur « comment éduquer aujourd’hui » en raison des différents modèles éducatifs. Les parents sont partagés entre plusieurs modèles éducatifs, plus ou moins autoritaires [1].

    -          Les parents peuvent avoir une certaine représentation de l’avenir de leur enfant dans une société qu’ils voient difficile, exigeante et dans laquelle un enfant trop docile, trop obéissant ne pourra faire son chemin. Il leur semble meilleur que leur enfant ait « de la personnalité ».

    Les valeurs des parents sont différentes de celles des professionnels. Certains se renseignent, lisent, vont sur les forums. 

    Ainsi, la maman de Célia a peur que la sucette n’empêche sa fille d’apprendre à parler. Elle a un an, elle ne va pas tarder à prononcer ses premiers mots. Cette maman s’est documentée sur la question. Mais elle n’explique pas pourquoi elle a pris cette décision aux professionnelles qui ne le lui ont pas demandé. Célia ne dort toujours pas bien.

    D’autres parents ont des choix éducatifs, liés à leur propre histoire :

    La maman de Nina est seule pour s’occuper de sa petite fille, elle veut montrer qu’elle est une maman compétente. Pour elle, une maman compétente c’est une maman qui a une petite fille propre et bien habillée.

    Le papa de Sofian est sans doute très sensible à la différenciation des sexes et fier de son petit garçon. Le déguisement peut évoquer l’homosexualité.

    Que se passe t-il du côté des professionnels ? 

    Il existe des valeurs éducatives qui font partie de la culture professionnelle, ce qui permet une cohérence éducative au sein de l’équipe, mais qui peuvent être très différentes des valeurs des parents.

    Un jour, les professionnels qui ont conscience du besoin d’oralité de Célia « craquent » et lui donnent une sucette. Elle  s’endort immédiatement. Les professionnelles  n’osent pas le dire à sa maman.

    De la même façon, les professionnelles qui connaissent le plaisir de Sofian à se déguiser et hésitent à le laisser faire sans le dire au papa et en évitant que celui-ci ne le voit !

     Il peut néanmoins exister des valeurs personnelles différentes entre les professionnelles au sein des équipes, avec le risque d’un manque de cohérence éducative et de conflits. De plus les limites ne sont pas toujours explicites.

     Les professionnelles de la petite enfance ont un rôle difficile du point de vue de l’éducation car elles interviennent à un âge où tout est à mettre en place. C’est sans doute la période la plus difficile avec l’adolescence. On pourrait s’interroger sur ce que leur fait vivre le fait d’être toujours dans ce rôle de poser des limites.

    Il y aurait donc une réflexion à conduire sur les limites. Sont-elles toujours adaptées aux besoins du tout petit d’agir, de bouger, de crier, à utiliser son énergie. Quelles contraintes imposent-on aux jeunes enfants accueillis en collectivité? Quelle tolérance a-t-on vis-à-vis de l’expression de leur énergie et de leur pulsion ?

    Par ailleurs, il faut se donner les moyens de comprendre le comportement de l’enfant : expression des pulsions ou mal être, comme dans l’exemple de la morsure?  L’observation est essentielle afin de répondre au mieux. Derrière le visible, ce que l’on observe, il faut comprendre l’invisible et lui donner un sens. A-t-on le temps, la disponibilité psychique nécessaire, la formation… ?

    Que se passe t-il entre parents et professionnels ? 

    Depuis plusieurs années les parents sont reconnus comme étant les premiers éducateurs de leur enfant, ce qui n’était pas le cas auparavant quand les professionnels se positionnaient comme experts du petit enfant.

    Mais, nous avons vu qu’il existe des différences entre milieu familial et milieu collectif, entre les choix éducatifs des parents et les valeurs éducatives des professionnels.

    Il s’agit donc de :

    -          si possible écouter les motifs des choix éducatifs des parents.

    -          parfois négocier avec eux, en s’appuyant si besoin sur le projet éducatif de la structure, en expliquant le sens des pratiques éducatives.

    Avec la maman de Célia, une auxiliaire de puériculture nouvellement arrivée a été choquée que l’on puisse mentir aux parents. Elle l’explique au cours de la séance d’analyse de la pratique. En accord avec l’équipe, elle décide de discuter avec la maman. Celle-ci explique le motif de son exigence. L’auxiliaire montre à cette maman ce qui est fait dans la structure vis-à-vis de la sucette, que celle-ci n’est pas donnée systématiquement, qu’il y a un endroit pour la ranger dans la journée etc. Elle évoque les difficultés d’endormissement de Célia. La maman comprend et accepte que l’on laisse la sucette à Célia au moment de la sieste.

    Avec la maman de Nina, la directrice qui a entendu et compris les enjeux de la propreté pour elle, explique à son tour l’intérêt du jeu dans le développement de l’enfant, elle explique ses valeurs professionnelles. Petit à petit, la maman de Nina accepte qu’elle ne soit pas impeccable quand elle la récupère à la crèche et qu’elle joue dans le sable. De leur côté, les professionnelles veillent à ce qu’elle ne se salisse pas trop.

    Pour Sofian, il a été impossible d’échanger avec son papa sur une dimension qui renvoie à la sexualité, ce qui paraissait beaucoup trop compliqué pour les professionnelles. Il a été décidé de dire à Sofian que son papa n’était pas d’accord avec son déguisement et qu’il ne pouvait pas le mettre.

    Afin de faciliter les échanges et de soutenir les valeurs de l’équipe, il est important de pouvoir s’appuyer sur un projet éducatif. Les occasions sont fréquentes : demandes de restriction de sommeil, apprentissage de la propreté engagé trop tôt…

    En guise de conclusion

    Il est nécessaire de pouvoir réfléchir en équipe et de savoir se remettre en question afin de garantir les points suivants :

    ·         Tendre vers une co-éducation avec les parents.

    ·         Expliquer le sens des pratiques éducatives et donc le connaître.

    ·         Savoir justifier auprès des décideurs qu’il faut avoir du temps pour  échanger entre parents et professionnels.

    ·         Faire mieux connaître les conditions d’un travail de qualité, rendre visible le travail dans la petite enfance qui n’est pas assez bien connu, par les parents, les décideurs, les hommes politiques.

     



    [1] Luce Dupraz : « de la difficulté d’éduquer aujourd’hui », in MP Thollon Behar « parents, professionnels, comment éduquer ensemble un petit enfant ? », Erès 1001 bébés.


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    ... La Méthode

     

     

     

    UNE DÉMARCHE DE SANTÉ GLOBALE

    Intégrant l’alimentation à l’hygiène de vie générale : activités physiques et sommeil.

     

     

    UNE INTERVENTION CENTRÉE SUR LE JEUNE ENFANT

    Justifiée par la précocité de l’installation du surpoids et la sensibilité de la petite enfance à l’acquisition d’habitudes alimentaires.

     

     

    UNE IMPLICATION DES PARENTS

    Reconnus comme les premiers éducateurs de leurs enfants, respectés dans leurs cultures et valorisés dans leurs savoirs et savoir-faire favorables à la santé.

     

     

    UNE VOLONTÉ DE COHÉRENCE

     

    Grâce à un partenariat élargi, cohérence des actions et des discours de chacun vis-à-vis des enfants et des familles et cohérence des cadres de vie offerts par la crèche et par le quartier avec la pratique des comportements favorables à la santé préconisés.

     

     

     

     

     


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