• Éducateur de jeunes enfants, acteur de prévention précoce

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    Éducateur de jeunes enfants, acteur de prévention précoce

    Katia Rouff

     

    Réunie à La Rochelle, la Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants a rappelé l’importance des premiers liens familiaux et le rôle que jouent les éducateurs de jeunes enfants dans le dépistage des situations à problèmes

    La Rochelle, son vieux port, ses voiliers, ses rues sinueuses… La Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants (FNEJE) [1] a choisi cette ville à dimension humaine pour ses seizièmes universités d’automne du 10 au 12 octobre 2005. Les participants se rendent à pied à l’espace de conférences, se croisent midi et soir au détour d’une ruelle ou d’une terrasse. Un grand sac bleu ciel offert à chacun permet de se repérer dans la ville, d’engager la conversation, d’échanger sur ces trois journées consacrées au travail de prévention précoce réalisé par les éducateurs de jeunes enfants.

    L’éducateur de jeunes enfants, un travailleur social
    Chargé de l’éducation des enfants de 0 à 7 ans, il travaille dans tous leurs lieux d’accueil : crèches, haltes-garderies, ludothèques mais aussi services pédiatriques des hôpitaux, structures d’accueil pour enfants handicapés, foyers de l’enfance, pouponnières… Ses fonctions se situent à trois niveaux : éducation, prévention, coordination. Dans ce moment déterminant de la vie de l’enfant, il s’attache à favoriser son développement global et harmonieux en stimulant ses potentialités intellectuelles, affectives et artistiques. En créant un environnement adapté à son éveil, il lui permet d’acquérir la socialisation nécessaire à l’entrée à l’école maternelle.
    On estime le nombre d’éducateurs de jeunes enfants entre 10 000 et 15 000. S’ils ne représentent que 3 % des effectifs, les hommes restent plus longtemps dans la profession et obtiennent davantage de postes à responsabilités. L’éducateur de jeunes enfants accorde une grande importance à la relation avec les parents et prend en compte le milieu familial, social et culturel de l’enfant. Il exerce ses fonctions au sein d’une équipe pluridisciplinaire et prend en charge l’enfant dans sa globalité. Il associe ses collègues à la conception et à la rédaction du projet pédagogique, anime et coordonne l’action pour que l’établissement accorde à l’éducatif la place qui lui revient, met en œuvre les moyens nécessaires à l’ouverture de la structure, établit des liens avec les établissements concernés par la petite enfance et envisage sa mission en partenariat. Il a également une action de formation en accompagnant l’équipe, les stagiaires et les autres partenaires autour de la petite enfance dans une réflexion pédagogique sur les pratiques d’accueil de l’enfant et de sa famille.

    Politique de la famille et promesses non tenues

    630 participants. Martine Maurice, la présidente, évoque les grands dossiers portés par la fédération et interpelle Dominique de Legge, délégué interministériel à la famille, venu ouvrir ces journées. En 2003, lors des précédentes universités d’automne, la fédération s’inquiétait déjà des conséquences des choix politiques « qui ne cessent de refermer les familles sur elles-mêmes et privilégient l’accueil à domicile ». La fédération apprécie modérément les propositions de la dernière Conférence de la famille « pour aider les familles à mieux concilier vie professionnelle et familiale, elle n’a proposé qu’une réforme du congé parental, une nouvelle répartition de l’interruption d’activité pour les parents d’un enfant handicapé et l’augmentation du crédit d’impôts pour les frais de garde », regrette la présidente. Puis d’interroger « Que deviennent par ailleurs les préconisations du rapport Petit [2] sur les métiers de la petite enfance dans les structures collectives ? Et de renouveler ses inquiétudes face aux exigences du service marchand venant questionner la mission de service public des lieux d’accueil de la petite enfance. « Aujourd’hui nous nous retrouvons face à la Prestation de service unique (PSU) dont les modalités d’application se traduisent le plus souvent en techniques purement gestionnaires » ou « de quel accueil parlons-nous lorsque, par injonction, nous devons vendre aux familles des plages d’horaires de garde ? ». Dominique de Legge, lui, se félicite de la politique familiale du gouvernement, parle « du miracle français » que les autres pays nous envient. Il considère notamment positive la préoccupation des entreprises de créer des crèches pour faciliter la vie personnelle et familiale de leurs employés. Il s’inquiète qu’on ne trouve « pas moins de dix-huit intervenants possibles autour de la famille et de la petite enfance » et lâche « le moment est venu de cesser de multiplier leur nombre et de proposer une approche différente. Plutôt que de parler de travail social, il faut prendre l’habitude de parler de travail familial ». Des propos qui inquiètent Martine Maurice (lire interview).

    Une prévention au quotidien

    L’éducateur de jeunes enfants travaille au quotidien à une prévention précoce. « En mettant tout en œuvre pour que l’enfant et sa famille soient bien accueillis et bien entourés, en apportant une attention toute particulière à ceux qui présentent une faille, nous évitons la survenue de pathologies », estime Christine Accolas-Bellec, déléguée nationale de la fédération. La prévention s’exerce donc au quotidien à travers ce que le sociologue Jacques Papay nomme « ces fausses simplicités ». « Le quotidien ne se réduit pas à ce qu’il donne à voir, il n’est pas ce que l’on en fait souvent (de la routine), au contraire, en son sein se nichent de l’extraordinaire et du complexe », affirme-t-il.
    La réflexion de Patrick Mauvais, psychologue clinicien et formateur à l’association Pikler Lóczy [3], porte sur la construction des premiers liens, leurs enjeux en termes de développement et sur le rôle des professionnels dans leur accompagnement. La stabilité et la qualité de ces premiers liens familiaux sont sources d’une socialisation satisfaisante qui facilitera la construction d’autres liens. Pourtant, même les familles dans lesquelles les choses se passent bien, peuvent avoir des conditions de vie fragilisantes et besoin d’une aide, autrefois apportée par le voisinage ou la parentèle. Aujourd’hui, transplantations géographiques liées au marché de l’emploi, anonymat urbain, isolement, conditions de travail précaires, temps de transports importants, multiplication des interlocuteurs auprès d’un enfant dans la journée… constituent autant d’éléments générateurs de discontinuités et de difficultés dans la vie quotidienne des familles. L’arrivée d’un bébé dans une famille est déjà à elle seule source de grands bouleversements et demande une réorganisation profonde, tant psychique que matérielle. À cela s’ajoutent les tensions que crée chez les parents une double exigence - souvent exacerbée aujourd’hui - de réussite éducative et d’épanouissement personnel. Le soutien à la famille doit pouvoir être envisagé très précocement, dès la grossesse, à la maternité, à la PMI et dans les lieux d’accueil de la petite enfance. Une attitude prévenante, une véritable écoute, des conditions d’accueil sous-tendues à la fois par le souci de la sécurité, du bien-être de chacun et par la mise en valeur des capacités de l’enfant et de celles de ses parents peuvent constituer autant d’éléments favorables dans l’accompagnement des premiers liens. Dans cette perspective, l’observation continue et précise réalisée en équipe pluridisciplinaire par les professionnels, peut constituer un outil de « soins », d’évaluation et de soutien des pratiques : soins directs s’appuyant sur une connaissance individualisée de l’enfant permettant de mieux répondre à ses besoins personnels ; évaluation de l’état de l’enfant, de son développement avec parfois orientation vers des structures de soins spécialisées ou des institutions de suppléance familiale ; enfin soutien des équipes dans leur recherche d’un meilleur ajustement des pratiques, particulièrement lorsqu’il s’agit d’enfants souffrant de troubles relationnels précoces.
    Maurice Titran, pédiatre et directeur du CAMSP de Roubaix a aussi observé l’importance du rôle joué par les EJE dans le repérage de certains troubles du développement de l’enfant que la sage-femme, le centre de PMI ou le médecin de famille n’avaient pas vus. Il conseille aux professionnels de « considérer l’enfant comme l’expert, de parler avec lui et de faire alliance avec sa famille ». Il précise qu’il est important qu’une équipe transmette « son capital confiance » à celle qui lui succédera dans l’accueil d’un enfant. Il parle de l’importance des lieux de parole et de prise de recul pour les équipes. Enfin, il insiste sur la connaissance que les professionnels doivent avoir du risque que représente la prise d’alcool durant la grossesse et de ses conséquences sur les troubles du développement psychomoteur de l’enfant.
    Si une grande majorité d’éducateurs de jeunes enfants travaillent en crèche, d’autres interviennent dans des lieux accueillant des enfants porteurs de handicap, en difficulté sociale ou malades. Des ateliers permettent de s’informer sur ces différents lieux d’accueil. La halte-garderie Petit Prince Lumière (Paris) par exemple, accueille depuis sa création (en 1993), 30 % d’enfants porteurs de handicaps (tous handicaps confondus), âgés de 1 à 6 ans. Dès le départ le projet a été conçu pour l’accueil de tous les enfants, handicapés ou non. Marie-Noëlle Rivière, la directrice, souligne que dans cette structure « ordinaire », la mission reste l’accueil et la socialisation du jeune enfant. Les enfants handicapés bénéficient des soins et thérapies dispensés par des structures adaptées comme un centre d’action médico-sociale précoce (CAMSP) ou un service d’éducation spécialisée et de soins à domicile (SESSAD). Pour sensibiliser les participants à l’accueil d’enfants handicapés, elle précise : « Nous avons un savoir-faire, mettons de côté les préjugés et les peurs à l’égard du handicap et fonçons. Nous accueillons ces enfants en lien avec les équipes spécialisées. Les choses deviennent simples quand elles sont pensées pour que chaque enfant trouve sa place. »


    EJE en crèche collective

    La crèche municipale Les Petits mousses du Plessis Robinson (92) accueille 70 enfants de 0 à 3 ans. Sophie Porte y occupe depuis trois ans un poste d’éducatrice de jeunes enfants à mi-temps et coordonne le travail de six auxiliaires de puériculture. Son équipe suit durant trois ans le même groupe de vingt enfants. Cette année, ils ont entre 1 et 2 ans. « Ce long suivi les sécurise et nous permet de bien suivre leur évolution. Chacun bénéficie d’une référente parmi les auxiliaires de puériculture ». Activités, repas et sommeil ponctuent la journée, dans le respect du rythme de chaque enfant.
    Le travail en crèche peut rapidement sembler routinier sans mise en place d’outils permettant la remise en question, comme l’élaboration du projet pédagogique en équipe avec le soutien de la directrice et de la psychologue. Le travail en équipe joue également un rôle important dans le dynamisme d’une structure. Sophie Porte encadre, stimule, soutient l’équipe et favorise les échanges « la communication est indispensable car nous portons chacune un regard différent sur l’enfant, pour autant, elle n’est pas toujours facile ». Depuis deux ans, des réunions régulières entre équipe, directrice et psychologue permettent de parler de chaque enfant, des fiches individuelles de noter les observations qui les concernent. Lorsque l’équipe observe une difficulté chez un enfant, elle en discute, en réfère à la directrice qui en parle aux parents. Si la difficulté est plus importante (enfant triste, replié sur lui-même…), elle demande conseil au médecin ou à la psychologue, présents dans la structure une journée par semaine. « Dernièrement par exemple, un enfant perturbé par les soucis de sa famille était très agité, illustre l’éducatrice ; la psychologue a reçu les parents et les a orientés vers un partenaire extérieur pour un accompagnement ». Si la situation l’exige, l’équipe travaille en partenariat avec les structures adaptées, comme pour l’accueil d’une fillette dont les parents ont un handicap mental. Elle travaille en lien avec la PMI et les éducateurs spécialisés qui accompagnent les parents. Avec la mise en place de la Prestation de service unique (PSU), l’accueil d’enfants en difficulté ou porteurs d’un handicap va devenir de plus en plus fréquent, Sophie Porte n’en éprouve pas de craintes majeures : « Il nous faudra être vigilants mais sans plus, il ne s’agit pas de chercher, voire de créer des problèmes ». Elle a été éducatrice de jeunes enfants en pouponnière et a donc déjà travaillé auprès d’enfants en difficulté, les professionnels de la crèche connaissent les familles en situation de précarité pour avoir longtemps accueilli les enfants d’un centre maternel voisin. Cependant, Sophie Porte aimerait bénéficier d’une formation complémentaire, mettre en place un travail de partenariat plus étendu et ne cache pas son appréhension de travailler avec des enfants handicapés moteurs : « N’ayant pas de connaissances en psychomotricité, je crains de leur proposer des activités non adaptées à leurs possibilités, mais je sais pouvoir bénéficier de l’aide du médecin, de la psychologue et de la PMI ».
    Après trois années passées dans la même structure, Sophie Porte « éprouve encore du plaisir à travailler », mais pense qu’un changement de poste régulier s’impose pour garder son dynamisme. Dès que ses enfants auront grandi, elle envisage la reprise d’un poste à temps complet, dans une petite structure d’accueil, comme une halte-garderie où elle pourra exercer des fonctions d’encadrement tout en restant en contact avec les enfants.


    EJE en centre d’action médico-sociale précoce

    Martin est venu en consultation au CAMSP Farandole de Fougères (35) avec sa mère, à l’âge de deux ans et demi. Des crises d’épilepsie ont lésé son cerveau et provoqué une petite paralysie latérale. Le bilan a montré des troubles moteurs peu importants nécessitant un simple suivi de kinésithérapie. En revanche, la psychologue, observant une relation trop fusionnelle entre la mère et l’enfant, a proposé une guidance mère/enfant. L’accompagnement vers la socialisation de Martin a été confié à Catherine Chesnais, éducatrice de jeunes enfants. Elle a travaillé sur la séparation par des séances ludiques. Quand Martin a été suffisamment à l’aise, elle l’a accompagné à la halte-garderie, restant avec lui durant plusieurs séances. La mère a pris le relais durant les vacances d’été et Martin s’est bien intégré. Catherine Chesnais a alors préparé son entrée en maternelle, rencontré la directrice avec la mère pour la rassurer sur l’autonomie de l’enfant. Mais un mois après la rentrée, l’institutrice a contacté le CAMSP : Martin présentait des troubles du comportement importants, n’intégrait pas les règles, devenait agressif avec les autres enfants… L’enfant vivait alors une situation familiale particulièrement difficile, responsable de ses angoisses. Catherine Chesnais l’a expliqué à l’institutrice, en respectant le secret professionnel, et a accompagné l’enfant une demi-journée par semaine à l’école, lui rappelant les règles sociales, discutant beaucoup avec lui, médiatisant ses relations avec les autres enfants. Tout cela a commencé à l’apaiser. Son temps scolaire a été allégé, Catherine Chesnais a participé aux réunions éducatives de l’école, servi de lien entre la mère, l’institutrice et le CAMSP pour dédramatiser la situation. Parallèlement, la mère continue la guidance avec la psychologue. Dès que Martin aura pris ses repères à l’école, une auxiliaire de vie scolaire prendra le relais de Catherine Chesnais. Cette médiation a permis d’éviter son exclusion scolaire : avec un groupe de trente enfants, l’institutrice et l’aide maternelle ne pouvaient plus gérer son comportement. Si l’éducatrice de jeunes enfants est intervenue seule à l’école, toutes les décisions concernant l’enfant ont été prises en équipe, notamment avec la psychologue.
    Le CAMSP Farandole prend en charge une quarantaine d’enfants de 0 à 6 ans avec un trouble du développement ou un handicap – dont la surdité - Ils bénéficient de la prise en charge d’une équipe pluridisciplinaire : directeur médical (pédiatre), chef de service, orthophoniste, psychomotricienne, psychologue, assistante sociale, EJE, professeur spécialisé dans la surdité, médecin ORL et audioprothésiste. Dans cette équipe, les deux éducatrices de jeunes enfants ont une vision globale du développement de l’enfant. « Mon rôle consiste à favoriser son éveil, la communication, l’autonomie et parfois l’aider à sa socialisation, en alternance et en complémentarité avec le travail des autres professionnelles », explique Catherine Chesnais. Elle valorise aussi les capacités de l’enfant auprès de ses parents, les aide à accepter le handicap, le rythme des apprentissages mais aussi l’idée qu’il ne pourra pas réaliser certaines choses. Elle intervient également en binôme avec ses collègues. Par exemple, parallèlement au travail de la psychomotricienne sur la posture de l’enfant, elle le stimule par le jeu afin de développer ses capacités de communication avec les autres et d’autonomie.


    EJE à l’hôpital

    « Durant toute ma carrière j’ai pris plaisir à travailler. Les quarante ans passés en milieu hospitalier – dont trente en pédiatrie – ont constitué une vraie richesse. Je ne me suis jamais ennuyée auprès d’enfants aux pathologies variées », raconte Geneviève Dias. En 1967, diplôme de jardinière d’enfants en poche, cette femme pétillante intègre le CHU de Grenoble. Elle travaille dans plusieurs services avant de rejoindre celui de pédiatrie en 1975. « Une surveillante en chef formidable et un jeune patron de pédiatrie très dynamique ont insisté pour que le service embauche une jardinière d’enfants. Ils ont compris l’importance du travail éducatif en complément du soin. Ils estimaient que notre action et nos observations apporteraient une aide dans la prévention des régressions de l’enfant lors du séjour hospitalier. À l’époque l’hospitalisme était fréquent », évoque-t-elle. De plus, dès 1976, le CHU de Grenoble innove en autorisant les parents à rester dans la chambre de l’enfant « une véritable révolution qui a obligé les équipes à évoluer, à créer des espaces adaptés aux parents mais aussi à les cadrer ».
    Chaque unité de soins de pédiatrie accueille des enfants âgés de 8 jours à quinze ans et demi, celle de Geneviève Dias compte 23 lits. Chaque matin, elle consulte le planning souvent très chargé de chaque enfant, se rend dans les chambres, les invite à la rejoindre dans leurs moments de disponibilité. Aux jeunes patients qui ne peuvent pas quitter leur chambre, elle prête livres et jouets. À 10h elle ouvre la salle de jeux, située au-dessus de l’unité et accueille les enfants, seuls ou avec un parent. Retrouver ce lieu et l’éducatrice chaque jour, mais aussi leur jouet préféré apporte aux enfants points de repères et sentiment de sécurité. Dans cette ambiance calme et ludique, Geneviève Dias est à l’écoute des désirs et besoins de l’enfant tout en restant en retrait si le parent est présent. Elle sert de lien s’il n’arrive pas à jouer avec son enfant par manque d’habitude ou par inquiétude et de relais s’il a besoin de souffler un peu. La salle de jeu constitue donc un complément aux soins, un lieu où se poser, parler d’autre chose que de la maladie et surtout prendre du plaisir. Elle diminue le stress de la famille et redonne confiance à l’enfant qui a parfois une image dévalorisée de son corps et de lui-même. Chaque semaine, l’enfant rencontre les clowns dans sa chambre s’il en a envie. Il assiste à des animations proposées par des intervenants extérieurs (percussions, théâtre…) et participe à des fêtes (carnaval, Noël…). Il peut aussi se balader ou jouer dans les espaces de verdure autour des unités de soins et – comble du bonheur - regarder les hélicoptères atterrir.
    Mais Geneviève Dias situe surtout son travail du côté de la prévention : « Les équipes médicales ne peuvent pas tout voir, nous observons très souvent des problèmes qui leur ont échappé : troubles de la marche, problèmes de comportement…. ». De plus, les parents vivent parfois des situations sociales ou familiales compliquées dont ils n’osent pas parler aux médecins et qu’ils lui confient volontiers. Selon l’importance du problème – et s’il n’est pas confidentiel — Geneviève Dias en réfère aux médecins ou au reste de l’équipe. Elle assiste également au passage de relais de l’équipe du matin à celle de l’après-midi et là encore, donne et reçoit les informations importantes.
    Dans un an, Geneviève Dias rend sa blouse. Quelles sont les qualités nécessaires pour exercer le métier d’éducatrice de jeunes enfants en milieu hospitalier ? « Avant tout un grand respect de l’enfant et de sa pudeur, puis un savoir être et un savoir-faire, estime celle dont le principal atout est de rester naturelle en toutes circonstances « je travaille au feeling et m’adapte aux situations inattendues ou difficiles en rassurant l’enfant, souvent inquiet ». La curiosité, l’ouverture à la vie de l’établissement, l’écoute de l’enfant, des parents et de l’équipe constituent aussi des qualités essentielles. Le dynamisme ne doit pas faire défaut ni le sens de l’accueil et du travail en équipe pluridisciplinaire. Travailler avec des groupes d’enfants d’âges et de pathologies diverses est difficile au quotidien. « Heureusement l’enfant malade vit dans le présent, possède une force de vie incroyable qu’il nous transmet. C’est lui qui ressource les équipes », souligne Geneviève Dias. À l’heure du bilan, éprouve-t-elle des regrets ? « Oui, la mise en place rapide de lieux de parole en cas de difficultés et notamment lors du décès d’un enfant m’aurait aidée. Heureusement ma vie de famille m’a toujours permis de me ressourcer. Je retrouvais le soir des enfants en pleine forme. Cependant côtoyer chaque jour des enfants malades m’a rendue inquiète pour la santé des miens jusqu’à leurs 15 ans et demi ! Là encore, un espace pour prendre du recul aurait été utile ». Mais plus que tout, Geneviève Dias retient surtout que son regard sur les enfants a été complémentaire de celui des soignants et leur a permis de mieux vivre leur hospitalisation. Et d’insister : « D’où l’importance de la continuité de ces postes… ».


    [1Fédération nationale des éducateurs de jeunes enfants - 2, rue du Maréchal de Lattre de Tassigny - 44000 Nantes. Tel. 02 40 47 53 64

    [2En mai 2003, les principales conclusions de ce rapport portent sur l’amélioration des perspectives de carrière et d’évolution professionnelle des éducateurs de jeunes enfants, en leur permettant d’accéder au cadre d’emploi des conseillers socio-éducatifs. Il insiste également sur la nécessité d’adapter leur formation pour mieux répondre aux nouveaux enjeux liés à la petite enfance et à la famille

    [3Elle rassemble des professionnels de la petite enfance qui s’inspirent des travaux d’Emmi Pikler sur le développement du bébé. Cette approche invite les adultes, parents et professionnels, à considérer le bébé et l’enfant comme un partenaire actif dans ses relations et comme un acteur de son propre développement (site de l’association Pikler)


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