• lire des livres aux enfants


     Projet d’éveil culturel

     

    « Eveil à la littérature du tout-petit »

     

     Les livres et les bébés 

    D’après

    Marie Bonafé « Les livres, c’est bon pour les bébés » Hachette littérature

    et Dominique Rateau « Lire des livres à des bébés » édition Hérès

       

    I – Pourquoi lire des livres à des enfants de moins de 2 ans ?

    Il est maintenant acquit que les petits se mettent à parler parce qu’on leur parle…Quant le livre fait partie de son univers familier, l’enfant peut, petit à petit ou très vite, regarder, observer, être attentif à la parole, comprendre les mots de l’histoire et l’histoire, penser. En retour l’adulte peut lire sur son visage l’intérêt, l’interrogation, la joie, la peur, l’émotion…c’est dans cet échange que le petit enfant entre dans le monde des mots du livre et grâce à eux, entre autres, dans le monde relationnel des humains et du plaisir de la vie.       

      A/ Le livre, un support de l’échange 

    Le livre est un support de l’échange entre les enfants et les adultes, et il relie aussi l’individu à la communauté à laquelle il appartient.

     1- la relation

    En ouvrant un livre, nous ouvrons un champs possible de questionnements. Nous sommes alors avec l’enfant dans une autre relation au monde que celle de la nécessité de combler ses besoins vitaux et chez le tout petit, les besoins d’échanges et de communication sont aussi impérieux que les besoins de nourriture.

    La « relation » est vitale pour la construction du psychisme de l’enfant.

    Quand son bébé réagit, la mère joue avec ses propres émotions, et il s’engage alors entre eux un véritable dialogue, qui contient toutes sortes d’expériences ou le langage n’est qu’un des éléments. Accompagnant les mots, il y a le plaisir des gestes, des regards, des sons, des modes de rencontre ou d’éloignement qui dessinent comme un paysage d’échange. Ces expériences n’ont aucun but concret et pourtant, sans elles, il n’y aurait pas de développement. C ‘est sur ce plaisir partagé, sur ce jeu au sens plein que s’appuie l’enfant depuis sa complète dépendance jusqu’à son autonomie.

     Quand on raconte une histoire à un bébé, le plaisir qu’il en tire rejaillit sur sa mère. Il possède un pouvoir extraordinaire : tout ce qu’il fait, ses mimiques, ses cris, les mouvements de son corps font réagir son entourage.

    L’adulte partage ces premières sensations qui accompagnent les premières conquêtes du monde.

     2- l’imagination

    Autour des livres, adultes et enfants partagent leurs capacités à rêver, à penser, à imaginer. Ceci est important, car pour pouvoir traiter la réalité ambiante, il faut pouvoir passer par l’imaginaire.

     c- la mémorisation

    Avec les livres, l’enfant va également découvrir, de façon naturelle, la fonction de mémorisation et de communication à distance de l’écriture

     d- les émotions

    Les albums sont des œuvres d’art c’est à dire des biens qui nous déchargent de nos peurs, de nos questions, qui nous renvoient à l’intime, à notre isolement, nous questionnent, nous rendent le monde plus clair ou plus obscur et qui seront des référents communs, d’incontournables objets de médiation, de transition entre l’enfant et l’adulte qui les lisent ensemble.

     

    B/ Le livre introduit le petit d’homme en tant que sujet parlant

    Le langage est une capacité exclusivement humaine et qui le différencie fondamentalement de tout autre mode de communication chez d’autres espèces animales.

     1- Exister parmi des Hommes

    Les petits d’hommes ont besoin de mots, de récits, d’histoires…pour construire leur propre histoire.

     En parlant à son bébé, la mère l’introduit dans le monde en tant que sujet parlant.

     Dans une perspective psychanalytique, parler, c’est se constituer comme sujet. C’est accéder au « je ». Albert Jacquard dit : ‘Mon « je » n’est pas dans mon patrimoine génétique. Le « je » vient des autres. Il est né, il a éclos, car on m’a dit « tu ». Tout est dans la rencontre. C’est l’humanité qui me fait « je ».’

     Françoise Dolto a vulgarisé l’idée que le tout petit enfant est un sujet en devenir et qu’il est important de s’adresser à lui comme un petit d’homme, porteur de langage, même s’il ne parle pas encore.

     L’être humain reste longtemps dans un été d’immaturité pendant lequel il accumule un nombre considérable d’acquisitions, sans aucune utilité immédiate . Plus tard, le langage deviendra pour l’enfant un véritable instrument. C’est grâce aux jeux du langage que la vie mentale pourra s’organiser en créant des liens rattachant entre elles toutes ces expériences. Dès le début, l’enfant est aussi sensible au son et au rythme de la voix de sa mère qu’aux mots qu’elle prononce.

    Le livre accompagné, présenté par un adulte qui y trouve lui-même de l’intérêt, peut sans doute jouer un rôle essentiel dans l’histoire d’un enfant et dans l’histoire de son langage.

    2 du langage à la pensée

    C’est à partir d’une communication polysensorielle que va naître le langage. L’enfant s’approprie le langage dans un bain de paroles ;celles qui lui sont directement adressées, mais aussi celles qui ne sont pas dites à son intention.

    La plupart des nourrissons sont confrontés à deux modes d’échange durant la première années de la vie :

    -  un langage qui s’adresse directement à lui, que l’on peut rapprocher de la langue des faits : langue utilisée lorsque les interlocuteurs sont en présence l’un de l’autre. L’échange est rapide, souvent injonctif. Tout n’est pas formulé car les mimiques, les gestes, l’environnement donnent autant d’informations que les mots dits.

    Ex : on aide un enfant à s’habiller : « attends ! là…tiens toi.

    Donne !Ton pied ! l’autre. Non pas comme ça…tourne…

    dans l’autre sens… »

    -  un langage parlé autour de lui, assimilable à la langue du récit, celle de la narration, celles qui situe un évènement dans le temps et dans l’espace. Le sens est entièrement compris dans l’énonciation. C’est la langue qui sert à raconter, c’est celle aussi que l’on peut écrire. Elle a des fonctions particulières. Elle  permet notamment l’accès à l’imaginaire, au symbolisme et à la pensée.

     Parler n’est pas seulement reproduire des mots entendus. C’est accéder au symbolique. (ex : « une table » c’est le meuble au milieu de la cuisine mais aussi le meuble qui est dans la cuisine de mamie, dans le salon…)

    Le livre tout seul ne jouera aucun rôle particulier. Le livre est un objet, un porteur d’images. Les images sont une représentation. Le petit découvre alors une nouvelle forme de représentation (ex : table)

    La naissance du langage est une histoire particulière à chacun. Ce n’est pas l’adulte qui décide de la progression d’un enfant ;c’est l’enfant qui s’approprie ce qui le touche, ce qui le concerne.

    Pour la mère et son enfant, un travail fondamental des premières années va consister à se séparer, à exister l’un sans l’autre. Elaboration du langage et élaboration du processus de séparation sont liées. Pourquoi parlerions nous si nous éprouvions tous les mêmes choses au même moment, provoquées par les mêmes évènements ? C’est la conscience d’être différent qui nécessite de dire.

    C/ Le livre et les notions de temps, de rythme et de permanence

    1- La permanence de l’écrit 

    Dans un monde en perpétuel mouvement, l’enfant va  découvrir les histoires, les lire et les relire. Il va les retrouver, toujours les mêmes, rassurantes. La permanence de l’histoire l’apaise.

    Il est important pour l’enfant que l’histoire garde sa forme stable, que l’enchaînement et la fin restent les mêmes pour que l’inquiétude liée à l’appréhension de la séparation puisse être calmée.

     2- Le temps 

    Avec les livres et les histoires lues à haute voix, on propose une rencontre avec une double temporalité : le temps pendant lequel on raconte croise le temps du récit (Ex : lire en cinq minutes une histoire de toute une vie !). L’enfant accède de cette façon à une conscience du temps. La narration lui permet de l’organiser.

    Le livre fermé signifie que nous avons quitté l’histoire ; nous sommes revenus dans la vie de tous les jours. L’aventure est terminée.

     3- Le rythme 

    Lorsqu’on raconte ou qu’on lit une histoire, le début fait attendre la fin. Le récit se déroule en séquences, brèves ou prolongées, et la façon dont elles s’enchaînent entre elles donne un rythme au texte.

     

    II – Comment lire des livres à des enfants de moins de 2 ans ? Quelques pistes.

    A / Particularités de l’âge des enfants

    -          il n’y a pas d’âge minimum pour lire une histoire à un enfant.

    -          Il faut accepter la fugacité de l’attention de l’enfant, accepter sa mobilité, ne pas faire de commentaires sur la lecture, ne pas se poser de question pour savoir si l’enfant à compris, ce qu’il a retenu…

    -          Le livre ne doit pas servir à vérifier les connaissances d’un tout-petit.

    -          En lisant un livre à des jeunes enfants, nous proposons un champ de mots, d’émotions, de rythmes ou chacun puise ce qui le concerne, ce qui l’intéresse, ce qui fait écho en lui. Nous sommes alors, sans a priori sur le niveau de compréhension des personnes qui nous entourent. Nous ne savons pas ce que l’enfant y puise et nous acceptons ce « non-savoir ».

    -          Les enfants qui ne savent pas encore bien parler ne sont pas aptes à passer par un raisonnement, et exiger d’eux une « compréhension » à notre manière produit un échange en complet décalage.

    -          Il n’est pas nécessaire que les petits « comprennent » une histoire pour qu’elle leur plaise : ils peuvent s’arrêter sur une image, une mélodie, un mot inconnu ou s’attacher à l’objet livre lui même

    -          L’activité de manipulation des livres par les bébés peut être valorisée par l’adulte au détriment de la lecture à haute voix et c’est bien un tord, car chez les petits la manipulation du livre est un élément que l’on ne peut dissocier de l’écoute : la manipulation ne précède pas l’activité intérieure de la pensée, elle l’accompagne dès le début de la vie.

    -          L’enfant qui utilise un livre peut décider d’introduire le désordre (livre à l’envers, commencer l’histoire par le milieu …) ; Cependant, la fidélité au texte, avec le déroulement des images et des mots tels qu’ils sont dans le livre doit être respecté par l’adulte. Il est très important pour l’enfant que le texte et le déroulement du récit soient permanents ; Cette permanence est garante de la permanence de la présence de tout son univers proche.

     B / L’adulte-conteur

    Lire un livre à un tout petit, c’est à la fois banal et exceptionnel. Le tout-petit fait un travail psychique et intellectuel tout à fait extraordinaire, mais ce travail n‘est possible que si la rencontre est ludique .

    Un adulte qui raconte une histoire doit se faire plaisir. Il ne faut pas raconter si on en a pas envie. Il ne faut pas se forcer.

     La personne qui raconte les livres a certes un talent personnel, mais avant tout elle respecte les réactions des enfants, se laisse piloter par leur intérêt, leur appétit, sans jamais les mettre en difficulté. Ainsi les enfants seront son guide autant comme spectateurs que comme acteurs.

    Le plus important est de s’adresser vraiment à l’enfant. A sa personne. Françoise Dolto disait : « si on s’adresse à un bébé sans s’adresser à sa personne, peu à peu , il n’écoute plus ».

    L’adulte qui connaît bien l’enfant peut choisir le livre en fonction du moment et des évènements se déroulant dans l’univers de l’enfant ; dès la naissance, les récits accompagnent l’évolution de l’enfant dans ses échanges avec l’adulte, et, à chaque étape du développement, on peut retrouver des éléments forts d’un genre de récit qui correspond au vécu intérieur et à la relation de l’enfant avec son entourage.

     C / Les livres

    Dans un album tout raconte : le titre, le format, la couleur, les techniques utilisées, la mise en page, les caractères, l’image, l’éclairage, …

     Quelques styles : Histoires de coucou, de cache-cache, histoires qui font peur, imagier, album accordéon, livres « animés », couverture cartonnées, livres en tissus rigides, livres plastifiés, livres de petits formats, les très grands albums…

     

    Conclusion :

    Il faut lire pour le plaisir de lire et donc de faire plaisir, lire pour aider l’enfant à nourrir son imaginaire, lire pour partager avec lui d’une autre façon

     Si le livre proposé au tout petit l’intéresse, il va l’attraper et selon son age…le mettre à la bouche ! parce que c’est sa façon à lui, à un certain âge d’entrer en relation avec le monde. Mais une fois qu’il a découvert le livre dans sa réalité physique, à nous de lui transmettre l’autre dimension du livre, en lui lisant. Et là, on met en route nos imaginaires.

     L’imaginaire captive bien mieux l’enfant que la simple réalité, et ce va et vient entre un monde fantasmatique et le quotidien de la vie en famille est beaucoup plus amusant et intéressant que le récit plat de la vie de tous les jours, prôné par une variante actuelle de littérature édifiante pour les petits

    Le fait de rester à l’écart de la culture écrite contribue à couper le sujet de la peinture, de la musique, du théâtre, car le livre donne aussi accès autres pratiques culturelles. Diffuser des livres contribue à diminuer les inégalités culturelles dont on connaît bien les effets.

     


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