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    De l'intérêt des comptines et autres chansonnettes pour nos enfants...

    Les origines des comptines, comme celles des contes populaires, sont très anciennes. Elles font partie de notre patrimoine ; certains ethnologues ont même pris pour habitude de les enregistrer, de les retranscrire, de les compiler.  Transmises de génération en génération, elles semblent, en apparence, bien anodines. Et pourtant... elles ont une véritable fonction auprès des tout-petits et des plus grands. Etymologiquement, une comptine est une "Formule  enfantine (parlée ou chantée) servant à désigner celui à qui sera attribué un rôle particulier dans un jeu" (dixit Le Petit Robert). Aujourd'hui, ce terme tend toutefois à désigner toutes les formulettes, chansonnettes, berceuses, jeux rythmés, etc. du patrimoine oral des enfants. Leurs fonctions sont larges et complexes. En voici quelques-unes...

    - Rôle ludique : En premier lieu, une comptine est source de plaisir immédiat :
                * Le plaisir d'être dans la relation avec un adulte, notamment. L'apprentissage des comptines commence ainsi, très jeune, dans les bras de papa ou maman.
    Un exemple ? Qui n'a pas apprécié en tant qu'enfant ou que parent la proximité physique impliquée par la comptine "A dada sur mon bidet" ?
                * Le plaisir de jouer avec les mots, avec les rimes, avec les sons :
    Un exemple ? "Do, ré, mi, La perdrix, Mi, fa, sol, Prend son vol, etc."
                * Le plaisir lié aux gestes : les gestes que l'on fait soi-même ou les gestes d'un adulte qui guide un tout petit dans un jeu de doigts.
    Un exemple ? "Celui-ci est la mère, (L' index se lève), Celui-ci est le père, (Le pouce se lève seul) ; Celui-ci prépare la soupe, (Le majeur), Celui-ci mange la soupe, (L'annulaire), Et que fait le petit ? (L'auriculaire), Il lèche le plat ! (Il caresse la paume de l'autre main)"

    - Rôle affectif, sécurisant, apaisant :
        
            * Apprendre une comptine est rassurant. Courte, elle ne présente guère de difficulté d'apprentissages pour les enfants, surtout que cet apprentissage est souvent effectué auprès d'une mère, d'une grand-mère, d'un enseignant, de pairs. 
    Un exemple ? "Un petit bonhomme, Assis sur une pomme, La pomme dégringole, Le petit bonhomme s'envole, Sur le toit de l'école."            
                * De plus, les thèmes évoqués par les comptines abordent des thématiques qui sont très proches des préoccupations des tout-petits.
    Un exemple ? De nombreuses berceuses dans le monde entier ont pour but de rassurer le nourrisson quant à l'absence momentanée de sa mère. Elles expliquent alors les raisons de son départ et insistent sur son retour imminent.

    - Rôle socialisant :
                * La comptine suit des règles précises. Elle propose à l'enfant un mode de participation, d'intégration au groupe facilement  applicable.  Voilà en partie pourquoi l'entrée en Petite section est bien souvent suivie de l'apprentissage d'une comptine, même plus que basique.
    Un exemple ?  "A la queue leu leu, mon petit chat est bleu" pour apprendre à se mettre en rang dès le premier jour ! 
               * Etre intégré aux groupes de pairs implique également la connaissance de comptines seulement transmises au moment de la récréation, parfois inventées depuis peu et souvent assez transgressives.
    Un exemple (pas trop transgressif !) ? "Ma grand-mère a trois cochons : un qui rit, un qui pète, un qui sent la savonnette."

    - Rôle essentiel dans l'apprentissage :
                 * Un ensemble de savoirs peut être en partie inculqué par le biais de la comptine : compter, les jours de la semaine, les mois de l'année, les parties du corps, etc.
    Un exemple ? La très célèbre "1 2 3, nous irons au bois, 4 5 6, cueillir des cerises, etc..."     
                 * Expression orale et capacités de communication : 
                           ° Les comptines permettent d'améliorer la prononciation et l'articulation de certains sons.
    Un exemple ? "L'âne, Brouti brouta, L'âne a brouté, Trotti trotta, L'âne a trotté, etc."
                           ° Les comptines permettent aussi  de repérer certaines sonorités de la langue, de distinguer certains sons entre eux (discrimination auditive), etc.
    Un exemple ?  Le bain de Petit Pierre : "Petit Pierre dans sa baignoire, Maman lui donne son bain, etc." permet d'effectuer la différenciation entre les sons /p/ et /b/.
                            ° Elles permettent enfin de développer le vocabulaire, le lexique de l'enfant ainsi que sa syntaxe de part la grande variété de structures syntaxiques présentées par les comptines.
    Un exemple ? "Quelle heure est-il ? Il est midi. Qui te l'a dit ? La petite souris. Où donc est-elle ?, etc." pour la construction de la phrase interrogative.
                  * Exercices de mémorisation : Les comptines font travailler la mémoire à tous les niveaux : auditif, gestuel, visuel.
    Un exemple ? "Trois p'tits chats, chapeau de paille, paillasson, etc." Il faut un sacré effort de mémorisation pour retenir l'ensemble de cette comptine !

     En plus de tout cela, les enseignants de maternelle utilisent aussi beaucoup les comptines :
    - pour rythmer la journée, la semaine afin que les enfants se construisent progressivement des repères temporels.
    - pour développer la créativité des enfants : une comptine est allongée à la manière de... 
    Un exemple ? "L'était une p'tite poule grise qu'allait pondre dans l'église..." Les enfants peuvent alors inventer d'autres lieux avec d'autres couleurs : "L'était une p'tite poule violette qu'allait pondre dans l'assiette" !


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    "Les bébés ont besoin de caresses, de lait…
    et d'histoires."

    Patrick Ben Soussan, pédopsychiatre

     

    A la découverte du livre et des histoires...

     

    1 - Pourquoi donc lire des livres à des bébés ? (objectifs de l'activité)

     

    Lire des histoires aux bébés, c'est :

     

    • leur permettre de découvrir l'objet livre qui a une fonction différente de l'objet jouet.

    •  jouer avec les mots : rythmes, rimes, intonations et variations de la voix, répétitions etc.

    • un des premiers contacts avec l'imaginaire qui favorise chez l'enfant l'accès au langage, à la représentation etc.

    • transmettre à l'enfant par l'intermédiaire de la langue parlée, le plaisir d'écouter la langue écrite (transmission culturelle).

     

    Tout comme chanter une comptine aux tout-petits est un acte gratuit, qui n'a pas pour but de leur apprendre à chanter, les familiariser avec le livre n'a pas pour vocation immédiate de leur apprendre à lire ! C'est un plaisir que l'on transmet avant tout, un lien qui se crée entre l'adulte et le bébé, lien qui éveillera peut-être chez l'enfant devenu plus grand le désir d'apprendre à lire et celui de faire partager à son tour le contenu des récits merveilleux.*

     

    * pour plus d'informations à ce sujet consulter le livre de Marie BONNAFÉ
    Les livres, c'est bon pour les bébés coll. Pluriel, éd. Hachette Littératures, Paris, 2001

     

    Quels livres peut-on mettre à leur disposition ?

     

    S'il est plus facilement admis de proposer des livres "à toucher" aux bébés (découverte sensorielle), les lectures d'imagiers, de contes ou d'albums sont bien moins souvent pratiquées. Et pourtant tous ces genres présentent de nombreux intérêts :

     

    • les imagiers : les classiques (un objet / un mot) permettent à l'enfant de s'approprier le monde en nommant les choses. Les autres (illustrations sans écriture) offrent une quantité infinie de jeux entre la parole de l'adulte et celle de l'enfant (ou de ses gestes) : l'histoire, même si elle est toujours différente se construit sur des images identiques (continuité).

    • les contes : ces récits magiques par leur caractère universel enchantent les bébés aussi bien que les plus grands.

    • les albums en tout genre : comptines, bouts-rimés et poésies sont de formidables occasions de jouer avec les mots. Les histoires randonnées (à répétitions) offrent des récits dans lesquels l'enfant éprouve le sentiment de permanence, le plaisir de l'anticipation ainsi que celui de la nouveauté. D'autres types d'histoires répondent aux besoins des bébés : celles qui rassurent par la mise en scène d'un univers familier et l'expression de sentiments qu'ils peuvent partager, celles où le héros découvre le vaste monde (autonomie), ou bien celles qui sont particulièrement étranges (plaisir de l'inattendu)...

     

    2 - Comment lire à ces bébés ? (mise en œuvre de l'activité)

     

    ► Quand ? (le temps)

     

    L'objectif étant de familiariser le bébé avec le livre afin qu'il puisse s'en saisir librement, un accompagnement de l'adulte de manière progressive est primordial.

     

    Cette découverte peut se faire lors d'un temps dans la journée jugé opportun par l'adulte (en fonction du nombre d'enfants, de leur rythme, des siestes et repas etc.). Les enfants installés, l'adulte peut démarrer par la lecture "collective" d'un album, ritualisé par une formulette : sensibilisé au contenu de cet objet, l'enfant peut déjà repérer le début et la fin de l'histoire. Il peut s'en suivre un temps de manipulation libre des livres par les enfants.

     

    On peut se donner un temps de 15 à 30 minutes de durée moyenne de l'activité mais généralement, l'intérêt des enfants est le guide.

     

    Enfin, une lecture peut être réalisée de manière individuelle, lors de moments qui ré-activent la séparation et où l'attente est de mise : celle du parent le soir, goûter des autres enfants, etc.

     

    ► Où ? (l'espace)

     

    Aménager un endroit douillet (tapis, coussins, transats, U en mousse etc.), toujours le même, afin de constituer un repère pour les enfants. Les jouets sont enlevés de ce lieu même s'il n'est installé que temporairement afin de permettre aux enfants de différencier le livre de l'objet jouet.

     

    Pour un temps de lecture collective, l'adulte lecteur se place dos au mur : ceci invite l'enfant à porter son attention sur lui et évite que des mouvements derrière son dos ne viennent perturber l'activité. Les enfants sont invités à s'installer confortablement en petit demi-cercle afin d'être à la fois proche et à distance de la personne qui lit.

     

    Un temps de lecture individuelle répond plus particulièrement à une demande de l'enfant. Moment privilégié, la lecture peut se faire par exemple sur les genoux de l'adulte.

     

    ► Pour combien d'enfants ?

     

    Quel que soit le nombre d'enfants, l'adulte a une présence attentive. On peut néanmoins envisager le rapport « nombre d'enfants / nombre d'adultes » suivant :

     

    • pour une lecture collective, un petit nombre d'enfants est nécessaire afin que les adultes puissent les accompagner réellement dans leur découverte. 2 adultes pour 4 à 5 enfants maximum, sachant qu'un de ces adultes a pour tâche de lire l'histoire et que l'autre se charge de contenir le groupe d'enfants (il s'assoit d'ailleurs avec eux et peut en porter un sur ses genoux si un enfant en ressent le besoin…). Il en va de même pour un temps de manipulation libre.

    • pour un temps de découverte individuelle, répondant à un besoin exprimé par 1 enfant, la présence d'1 adulte auprès de lui est aussi nécessaire.

     

    ► Comment ? (le rôle de l'adulte)

     

    La présence de l'adulte est indispensable, grâce à des repères clairs, posés au préalable, il a une fonction essentielle d'initiation au rêve :

     

    • sélectionner des livres qui plaisent à l'adulte permet une transmission plus évidente du plaisir de lire.

    • proposer peu de livres à la fois mais divers dans leur contenu, leur forme, leurs illustrations, etc.

    • en temps de manipulation libre, observer l'enfant dans ses préférences. Ré-introduire à chaque fois des succès (continuité) et proposer en même temps quelques nouveautés (évolution de l'enfant et de ses intérêts).

    • se retenir de vouloir expliquer les mots compliqués : cela ne nous viendrait pas à l'esprit de s'arrêter de chanter une chanson pour leur en expliquer le sens… L'enfant saisi ce dont il a besoin à ce moment là, peu importe qu'il comprenne tout ou pas...

    • ne pas hésiter à re-lire une histoire surtout si c'est une demande des enfants : se répétant inlassablement, elle peut répondre à un besoin de continuité.

    • laisser l'enfant libre de ses mouvements : on peut au départ l'inviter à se mettre en demi-cercle avec les autres. Cependant s'il ne souhaite pas rester dans le groupe et qu'il ne dérange pas, laissons-le s'éloigner : ce n'est pas parce que le bébé fait autre chose qu'il ne se saisit pas de l'histoire racontée. L'observer dans ces moments peut même être intéressant.

    • accompagner l'enfant dans sa manipulation :

      • tant que l'enfant ne le dégrade pas, le laisser manipuler le livre comme il le souhaite même si ce n'est pas très conventionnel (tourner les pages en arrière, tenir le livre à l'envers etc.)

      • expliquer lorsque c'est nécessaire pourquoi on ne peut pas le détériorer : le livre doit pouvoir resservir une autre fois pour d'autres enfants ou pour eux-même (transmission culturelle).

      • si la mise en bouche (premier mode de découverte du bébé) a tendance à se prolonger, proposer à l'enfant un jouet à mâcher et pourquoi pas lui faire découvrir pendant ce temps le contenu de cet objet si savoureux…

      • si un accident de déchirure se produit malgré tout, réparer le livre en présence de l'enfant et pourquoi pas, le faire participer s'il est plus grand, toujours dans l'idée que le livre resservira une autre fois.

     

     

     


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  • Publié le 20-11-2014 Par Arnaud Gonzague dans "l'OBS"

    Dans plusieurs crèches de France, on fait la conversation à des enfants défavorisés pour limiter l’échec scolaire. Une méthode appelée "parler bambin", qui donne des résultats mais fait débat.

    A la crèche de Courcouronnes (Essonne), on discute avec les enfants pour les aider. (Bruno Coutier / L'Obs) 
    A la crèche de Courcouronnes (Essonne), on discute avec les enfants pour les aider. (Bruno Coutier / L'Obs)
     

    A première vue, cela ressemble à une petite conversation tranquille. Emilie César, auxiliaire de puériculture à la crèche Françoise-Dolto de Courcouronnes (Essonne), présente un imagier à Bazi et Dalila, 2 ans et des poussières. Posés sur des coussins dans une salle dédiée, loin du brouhaha infantile environnant, ils tournent les pages et commentent ce qu’ils voient.

    "Boi tafé" dit Bazi en désignant le dessin d’une tasse. "Oui, c’est vrai, on boit le café dans une tasse", reformule Emilie. Apercevant un téléphone, Dalila porte la main à l’oreille. "Qui est-ce que tu appelles au téléphone ?" demande Emilie. "Man" - "Et qu’est-ce que tu lui dis à maman ?" - "Anô ?"

    Plus tard, les deux petits parleront de "totettes et tulottes" (chaussettes et culottes), de "pillon vo’" (papillon qui vole) et du fait que "moi si a mat’" ("moi aussi j’ai une montre").

    Limiter la casse

    Cet échange d’un quart d’heure n’a rien d’un bavardage au fil de l’eau. Il a une ambition bien précise : faire parler, parler, parler les deux bouts de chou et les aider à développer leur aisance à manier la langue pour leur faire trouver une place dans cette grosse crèche (62 bambins), où le groupe écrase souvent les enfants les moins préparés. A terme, il s'agit aussi de limiter la casse quand ils entreront à l’école... dans un an.

    Toute cette démarche s’appuie sur une méthode tout à fait scientifique appelée le "parler bambin". Venue du Canada, elle est expérimentée en France depuis une dizaine d’années et mise en pratique actuellement dans les crèches d’une demi-douzaine de villes (Lille, Fontenay-aux-Roses, Nantes, Le Havre…).

    Si elle s’adresse à tous les enfants d'un établissement, elle met un accent en priorité sur ceux dont les équipes ont décelé les risques d’échec scolaire avant même qu’ils aient mis un orteil en maternelle.

    On sait en effet que la maîtrise du langage oral est cruciale pour la réussite à l’école, explique Guillemette Pouget, médecin à l’Education nationale, qui a expérimenté le dispositif avec des chercheurs de l’université de Grenoble-Pierre-Mendès-France. Un enfant manquant de vocabulaire ne comprendra jamais bien ce qu'il lit. Donc, il faut mettre la priorité sur le langage."

    "Il ne comprend pas ce que vous dites…"

    Cette mauvaise maîtrise de la langue ne tombe pas du ciel : elle est le plus souvent liée à des questions sociales et culturelles. Pas simplement parce qu’une famille aisée emploie un panel de mots plus varié qu’une famille pauvre, mais aussi – et peut-être surtout – pour des raisons quantitatives :

    En une semaine, un enfant issu des milieux supérieurs entend en moyenne 215.000 mots. Un enfant des classes moyennes 125.000 mots. Un enfant de l’Assistance publique 62.000 mots", décrit Guillemette Pouget.

    Mais pourquoi les parents de milieux modestes s’adressent-ils moins souvent à leurs progénitures que les autres ? "Parce que beaucoup ne réalisent pas qu’un enfant qui n’est pas en âge de parler comprend tout à fait ce qu’on lui raconte", analyse la médecin. Laquelle narre une scène observée dans une crèche : la directrice de l’établissement adressant la parole directement à l’enfant (sur le thème : "Voilà ce que tu vas faire ici…") et suscitant l’incompréhension parentale : "Mais madame, il ne comprend pas ce que vous dites…"

    "Honte" de la langue

    Une réalité méconnue, mais qui n'étonne personne à la crèche Françoise-Dolto, située dans un quartier pas facile de Courcouronnes, elle-même l’une des villes les plus pauvres de l’Essonne (on y compte trois fois plus d’employés et ouvriers que de cadres). "C'est vrai que les familles modestes tiennent vis-à-vis de leurs enfants plus souvent un langage 'fonctionnel' ["Mange ta soupe", "Mets tes baskets", NDLR] que des conversations à proprement parler", confirme Nathalie Encinas, responsable du service petite enfance à la mairie de Courcouronnes.

    Egalement parce qu’une partie des familles modestes, notamment en banlieue, sont issus de pays étrangers et éprouvent parfois une certaine "honte" d’utiliser leur langue natale – ce qui les conduit à réduire les échanges oraux avec leurs enfants.

    Or, l’un des intérêts majeurs du "parler bambin" est précisément d’associer systématiquement les parents des enfants repérés – une attitude rarissime dans le système scolaire français. Tout d'abord, par des questionnaires aux parents qui permettent de savoir si la langue maternelle est bien utilisée à la maison. Puis, en leur prêtant un imagier, par exemple, pour qu’ils l’utilisent à la maison. "Mais attention, prévient Nathalie Encinas, ce ne sont pas 'devoirs' à faire. Avec les parents, nous ne nous plaçons jamais dans la posture du ‘faites comme je vous dis, je sais mieux que vous’. Nous expliquons plutôt ce que nous faisons et pourquoi c’est un plus pour leurs enfants." Libre ensuite aux parents de prendre part ou non à la démarche.

    "Surstimuler" les enfants

    Et les résultats semblent là : une comparaison scientifique a été réalisée sur 65 enfants de 2 ans à deux ans et demi dans deux crèches de Grenoble accueillant toutes les deux des publics très défavorisés. La moitié d’entre eux a pratiqué pendant 6 mois le "parler bambin" et l’autre aucune méthode. Résultat : "Le 'QI verbal' [qui mesure la capacité de raisonnement avec le langage, NDLR] du groupe qui a expérimenté le parler bambin a bondi de 10 points, alors que dans l’autre crèche, il n’a pas bougé", expose Guillemette Pouget.

    Pour autant, cette évaluation a été conduite sur un trop petit panel d’enfants pour être totalement concluante – une étude nationale est prévue à partir du printemps 2015. Mais d’ores et déjà, le parler bambin est l’objet de critiques de la part notamment d’un certain nombre d’acteurs de la petite enfance, dont des psychanalystes.

    Ils nous reprochent de ‘surstimuler’ les enfants ou de stigmatiser les classes populaires en les ‘évaluant’ trop précocement", s’agace Guillemette Pouget.

    "Laisse-moi tranquille"

    Bernard Golse, psychanalyste et pédopsychiatre à l’hôpital Necker, compte parmi ces sceptiques : "Tous ces efforts reposent sur cette idée très anglo-saxonne qui veut faire de ces enfants de bons citoyens ‘rentables’ pour la société, explique-t-il. Mais bombarder des enfants avec des mots, ce n’est pas les faire accéder au langage. Où est le plaisir de s’exprimer avec des adultes qui aiment leur parler ?"

    Une critique rejetée par Guillemette Pouget : "Le dispostif recherche avant tout le plaisir de la conversation. Il s'agit bien de parler avec les enfants et non simplement aux enfants, en leur faisant apprendre ou répéter des mots". Les intervenantes de la crèche de Courcouronnes sont elles aussi majoritairement convaincues du bien-fondé du dispositif.

    "Je me souviens d’une petite fille qui parlait très peu, très mal et que nous avons impliquée dans le programme l’année dernière, raconte Pascale Mache, puéricultrice à Françoise-Dolto. Je l’ai revue il y a quelques temps avec un petit garçon qui l’embêtait. Elle lui a répondu ‘Laisse-moi tranquille’ d’une manière très distincte. Sans le programme, elle n’aurait sans doute jamais été capable de cela."

    Arnaud Gonzague


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  • Savez-vous que les comptines améliorent la connaissance du langage du bébé? Et savez-vous qu’elles jouent un rôle important en l’aidant à apprendre à lire et à comprendre la structure grammaticale de la langue? Et vous qui pensiez qu’Am, stram, gram ne servait qu’à amuser votre bébé!

     

    Favoriser l’acquisition du langage

    Découvrir le rythme de la langue

    Les chercheurs ont montré que les enchaînements de mots rythmiques, aux rimes amusantes, sensibilisent au rythme de la langue. Et si on bat des pieds ou des mains au rythme d’une histoire, on aide en fait l’enfant à prendre conscience des syllabes et des sons qui forment les mots. Par exemple, on peut taper des mains à chaque syllabe des mots qui sont placés à la fin des vers et qui riment avec d’autres, comme colégram: co-lé-gram (3 battements).

    Am, stram, gram,
    Pic et pic et colégram
    Bour et bour et ratatam
    Am, stram, gram.

    Le fait de réciter des comptines familiarise aussi les bébés avec le rythme de la parole et l’intonation, et aussi avec la structure grammaticale de la langue. En effet, dans les comptines, on exagère souvent l’intonation en comparaison avec la langue de tous les jours (notre intonation monte à la fin d’une question, par exemple). On peut aussi changer d’intonation pour souligner certains mots ou certaines expressions. Amusez-vous à chanter une même comptine comme « Dans la forêt lointaine ». plusieurs fois, en mettant l’accent sur différents mots.

    Chanter ou fredonner agrémente les échanges avec bébé tout en stimulant son apprentissage du langage.  

    En route vers la lecture

    Dans la forêt lointaine
    On entend le coucou
    Du haut de son grand chêne
    Il répond au hibou
    Coucou, coucou, coucou,
    Hibou, coucou.

    Les comptines préparent également les enfants à la lecture: elles leur permettent de prendre conscience de leur propre langue et de la façon dont les sons sont associés de sorte à former des mots qui se ressemblent, comme « coucou » et « hibou ».

    La mélodie aide l’enfant à capter le sens d’un message, avant même d’en comprendre le sens des mots. Chantez au sujet des choses qu’il commence à connaître pour renforcer de nouvelles découvertes (par exemple, « J’ai deux yeux » pour les parties du corps ou « Dans la ferme à Mathurin » pour les animaux).

     

    Pour une meilleure articulation

    Meunier, tu dors,
    Ton moulin, ton moulin va trop vite.
    Meunier tu dors,
    Ton moulin, ton moulin va trop fort.
    Ton moulin, ton moulin
    Va trop vite
    Ton moulin, ton moulin
    Va trop fort.

    Les comptines permettent aussi aux enfants de mieux articuler, et de prononcer les consonnes plus clairement. Par exemple, dans « Meunier, tu dors, Ton moulin, ton moulin va trop vite », le « t » est répété plusieurs fois et associé à plusieurs sons. L’enchaînement des mots fait bouger la langue différemment et changer la position des lèvres contre les dents. Les comptines permettent donc aux enfants de parler avec plus de facilité et de mieux prononcer les sons qui leur posent des problèmes.

     

    Quelques activités

    Essayez les activités suivantes en vous appuyant sur les comptines traditionnelles ci-dessous.

    • Faites remarquer à votre enfant qu’il y a des mots qui riment et demandez-lui de trouver d’autres mots qui ont la même rime.
    • Attirez l’attention de votre enfant sur les mots qui commencent par un certain son et demandez-lui de penser à d’autres mots qui commencent par ce son.
    • Marquez chaque syllabe des comptines par un battement rappelant celui d’un tambour; servez-vous pour cela d’un crayon et d’une boîte de fer blanc, par exemple.
    • Si votre enfant connaît une comptine sur le bout des doigts, récitez-en des bouts et laissez-le les compléter. Par exemple, laissez-le dire les mots qui riment à la fin des vers, comme « coucou » et « hibou ».

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